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n bonheur n'arrive jamais seul. Parce qu'il s'accompagne alors d'autres bonheurs consécutifs, faisant de votre vie une avalanche rose bonbon de joies de toutes sortes ? Non, parce que pour tout bonheur éprouvé, il faut supporter le retour de bâton : chaque bonheur s'accompagne d'un malheur équivalent... C'est en tous cas ce que James, dans un élan manifeste de pessimiste, se voyait contraint de penser désormais. Depuis qu'il était avec Ethan, il vivait comme en dehors des réalités. Il savait pertinemment que ce n'était pas juste, il avait pleinement conscience que sa plénitude à lui faisait la douleur de celle qui, pour l'heure, était encore son épouse, il savait que la morale elle-même répudiait ce qui éveillait tant de plaisir en son coeur... Manifestement, il fallait qu'il paye son trop plein de béatitude, il fallait qu'un pan d sa vie se fracasse. Bien sûr, c'était simplissime que de réduire ce qui s'était passé à une histoire quelconque de karma, il n'empêche que c'était à se demander... alors qu'il lui semblait n'avoir été jamais aussi bien de toute sa vie, voilà qu'il expérimentait l'une des douleurs les plus fortes qui lui ait jamais été donnée d'éprouver.

Nemesis était morte. Pire encore, elle avait été assassinée. Sa meilleure amie n'était plus, et James avait beau retourner la situation dans tous les sens, il ne comprenait pas. Seule demeurait la douleur, d'autant plus terrible qu'elle était brutale. Et il lui était d'autant plus complexe de faire son deuil qu'il était parfaitement incapable de comprendre ce qui avait bien pu se passer. Désemparer, ne voulant pas accabler Ethan avec ses problèmes, il avait voulu rendre visite à son meilleur ami restant. Leur relation s'était quelque peu... refroidie depuis que James avait tout appris à Angus de ses inclinations, mais il restait malgré tout un ami fidèle et loyal. S'il y avait quelqu'un avec qui il pouvait partager ses angoisses et, qui sait, oublier sa tristesse, c'était bien lui, et c'est à sa porte qu'il songea en premier lieu à toquer. Sauf que quand la porte en question s'ouvrit, ce ne fut pas à Angus qu'il eut affaire, mais à Sasha, sa soeur. James et Sasha ne s'étaient jamais vraiment parlés, mais n'avaient jamais vraiment cherché à le faire non plus. On ne pouvait pas franchement dire qu'ils s'appréciaient, tous les deux... Enfin, James n'avait rien contre elle, il ne s'était seulement jamais senti d'affinités avec elle. Et par conséquent, il n'avait pas forcément envie de passer du temps en sa compagnie. Déjà qu'il n'était pas au meilleur de sa forme... Apprendre qu'Angus n'était pas là déçut beaucoup James. Il aurait véritablement besoin d'une présence amie... Mais c'était de sa faute, aussi, il aurait dû prévenir de sa visite et il ne l'avait pas fait, préférant passer à l'improviste, s'étant décidé sur un coup de tête. En définitive, il serait bien parti de suite, du coup, mais ça ne se faisait pas, et ça se faisait encore moins maintenant que Sasha avait constaté son état.

-Non j'ai... été mieux. Il ne se voyait pas nier les faits, d'autant que cela se voyait comme le nez au milieu de la figure. Toi non plus, ça n'a pas l'air d'aller fort. remarqua-t-il en la considérant plus attentivement du regard. Visiblement, il n'était pas le seul à ne pas être au meilleur de sa forme.

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ames hésita un peu quand Sasha lui proposa de rester afin d'attendre Angus. Il n'avait pas la moindre idée du temps qu'il lui faudrait patienter avant que son meilleur ami ne revienne, et visiblement, la soeur de ce dernier non plus. Il n'avait rien en particulier contre Sasha, mais il n'était pas certain que leur conversation puisse aller et mener bien loin s'ils devaient rester dans la même pièce tous les deux... En même temps, il avait vraiment besoin d'une présence amie. Il se sentait comme au trente-sixième dessous, et il n'y avait qu'Angus qui saurait lui apporter le soutien et le réconfort dont il avait besoin. Certes, il pourrait également aller trouver Gabrielle, mais si peu de temps avant son mariage, il ne voulait pas qu'elle ait à porter le poids de ses problèmes à lui, il ne voulait lui offrir que le plus positif. Alors finalement, il hocha la tête à la proposition de Sasha d'attendre Angus à l'intérieur. De toute façon, à présent qu'elle l'avait proposé, il se voyait vraiment mal refuser. Il pénétra donc à l'intérieur, et se laissa tomber sur l'un des canapés du salon quand Sasha lui proposa à boire.

-Une bière, ce sera très bien. répondit-il d'un ton presque absent.

Il n'était pas dans sa nature de boire de l'alcool, pas même une bière de temps en temps. Il fallait vraiment que la situation soit particulière pour qu'il ne néglige pas une bière au profit d'un simple verre d'eau, mais le fait est que, à cet instant précis, n'importe quoi qui soit susceptible de lui embrumer l'esprit et de faire ses pensées plus légères était bon à prendre. Alors qu'il attendait donc qu'elle les serve, il observa Sasha plus attentivement. Il n'avait suivi que de loin ce qui était arrivé à la jeune femme. Il savait qu'elle avait été en prison, il savait qu'elle en était sortie in extremis, mais il n'avait pas su exactement quelles avaient été les circonstances de tout cela. Angus avait crié à l'erreur judiciaire, et le libraire l'avait cru sur parole, car après tout, même s'il n'appréciait pas outre mesure Sasha Davis, il ne l'imaginait pas une seule seconde capable de commettre le moindre crime. En tous cas, cela justifiait clairement qu'elle ne semble pas aller au mieux. Il hésitait à revenir là-dessus. Ce n'est pas le genre de choses qui se font... Et en même temps, difficile d'occulter le sujet et de faire comme si de rien n'était.

-Je suis soulagé de te revoir, tu sais, j'étais inquiet pour toi. Rapport à ....

Il préféra ne pas préciser son propos, ce qu'il sous-entendait paraissait des plus évident. Avait-il été inquiet pour Sasha... Pour tout dire, il l'avait surtout été pour Angus. Il savait à quel point il était proche de sa soeur. Les Davis n'avaient plus de parents, ils étaient tout l'un pour l'autre. C'était une chose dont James avait conscience et qu'il avait toujours respecté. Il but une première gorgée de bière, qui lui donna un prétexte pour ne pas finir sa phrase. Il n'avait pas forcément envie de rappeler à Sasha de mauvais souvenirs... Il pensait juste qu'il serait plutôt difficile de faire comme si de rien n'était.

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a question que lui posa Sasha était franche et on ne peut plus direct, cependant, James ne pouvait pas vraiment lui reprocher de lui faire une telle remarque, quand bien même, en ce qui le concernait, jamais il n'aurait osé aborder les choses si frontalement. En fait, il se serait contenté de garder le tout pour lui, ce n'est pas comme s'il était du genre à extérioriser dans tous les cas... Mais bon, ils avaient des tempéraments très différents, l'un et l'autre, ce n'est pas nouveau, et c'est pour cette raison, d'ailleurs, qu'ils n'avaient jamais véritablement essayé de s'entendre et s'étaient contenté de vivre leurs vies en parallèle sans chercher plus loin à se connaître. Pas besoin de mieux se connaître, ou même de se parler, après tout... Sauf dans des situations telles que celles-ci. Finalement un peu gêné, James tenta de dissimuler le tout en buvant une gorgée de sa bière. D'accord. Elle avait sans doute raison, le fait est que s'il n'y avait eu que Sasha dans cette affaire, et si elle n'avait pas été la soeur d'Angus, son sort en prison ne l'aurait pas vraiment intéressé. C'était assez honteux de l'admettre mais bon, c'était un fait.. Il n'avait pas l'intention de démentir le propos de Sasha, tout ce qu'il pourrait dire semblerait hypocrite. Et en plus, déjà qu'il n'était pas un grand menteur, s'il devait commencer à se justifier, déstabilisé comme il l'était, il ne ferait que s'enfoncer davantage. Autant admettre les faits. C'était bel et bien pour Angus qu'il s'était inquiété. Et au fond, il s'inquiétait encore.

-Oui, il a eu peur pour toi.

Il ne fallait pas être devin pour l'avoir constaté, en même temps, quand bien même James n'avait pas été le meilleur ami d'Angus, il l'aurait sans doute deviné assez rapidement. La situation avait été violente et brutale, et même si James n'avait pu suivre les choses que d'assez loin, il savait combien cela avait été dur pour Angus. Au fond, il semblait que ça les arrangeait l'un et l'autre de changer de sujet, en bref, de ce que tous les deux avaient en commun, c'est à dire le frère de Sasha.

-Je m'en veux un peu, du coup, de venir là, avec mes problèmes...

Et en même temps, il ne savait vraiment plus à qui se confier. Il n'y avait qu'une personne avec qui il avait envie de parler, et elle habitait ici, et qu'importe qu'une certaine tension ait trouvé place au sein de leur relation depuis qu'Angus savait pour lui et Ethan... Il ne savait pas vraiment pourquoi il venait de mettre ça le tapis. Si c'était pour passer pour un geignard, en tous cas, ça devait être clairement réussi, mais il n'avait pas vraiment réfléchi avant de parler. James était venu là sans s'avertir parce qu'il avait besoin de parler, et comme il n'en avait pas encore eu l'occasion, ce besoin n'avait pas disparu. Et Sasha risquait fort de se retrouver le récipiendaire de ses malheurs et de ses angoisses s'il n'y prêtait pas garde.

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ames n'était toujours pas certain d'avoir bien fait en ayant entrouvert la porte en laissant entendre à Sasha qu'il avait des problèmes, des problèmes suffisamment lourd pour qu'ils lui pèsent terriblement sur la conscience, pour qu'il veuille se confier à Angus.... ou même à sa soeur, seulement pour se délester de ce poids sur son coeur, de ce noeud à l'estomac, de cette impression de perdre complètement pied... Quand Sasha lui demanda ce qu'il lui arrivait, sans doute plus par pure curiosité que parce qu'elle se souciait véritablement de ses problèmes, il songea, bien sûr, à rebrousser chemin, parce que s'il fallait qu'il se confie, ce n'était pas auprès d'elle, avec qui il n'avait jamais vraiment eu d'atomes crochus, qu'il était supposé le faire... Mais il avait vraiment besoin de parler. Il avait le sentiment que son crâne allait exploser, à ce rythme, s'il ne confiait pas ses peines et son désarroi à quelqu'un, n'importe qui, même si ça devait être la première venue, eh bien soit. Au moins, il cesserait pour de bon d'intérioriser.

-Je... j'ai perdu quelqu'un à qui je tenais... la meilleure amie que j'ai jamais eu, avec Angus.

Et même, l'on pouvait dire que Nemesis et Angus étaient ses seuls véritables amis. Avec Gabrielle, également, qui était arrivée dans sa vie plus récemment. Oh, des connaissances avec lesquelles il s'entendait bien, il y en avait d'autres, bien sûr. Un certain nombre, même. Mais ce n'était pas pareil, il n'avait pas avec eux la même complicité. À Nemesis comme à Angus et Gabrielle, James avait osé tout dire, confier jusqu'à ses inavouables secrets. Nemesis, en dépit de son caractère... instable, avait été présente pour lui et surtout, l'avait soutenue (peut-être parce qu'elle était heureuse qu'ils puisse ensemble former leur petit club d'adultères, certes...), et lui il n'avait pas su voir qu'elle avait des problèmes... Et elle était morte assassinée.

-Tu en as peut-être entendu parler ? Nemesis Colloway, l'avocate...

C'était en tous cas sous ce titre très officiel qu'elle avait été présentée dans les quelques feuilles de choux qui avaient rapporté l'affaire. Il faut dire que son nom était apparu même dans la Gazette. C'est ce qui arrive, quand on a une certaine réputation, un statut social, et surtout que l'on meurt dans de mystérieuses circonstances que personne, absolument personne, n'est capable d'expliquer. Sauf les principaux concernés, bien sûr. Les criminels, donc.

-Je suis... complètement perdu.

Complètement perdu, parce qu'il n'y comprenait rien. Rien ne l'avait préparé à ce qu'on le prive si brutalement de sa meilleure amie. Tout semblait aller si bien, pourtant !! Il avait voulu croire que tout allait si bien... Que pour une fois, les choses abondaient dans son sens. Mais non. C'est comme si une instance, quelque part, le punissait pour ses choix, des choix que la société dans laquelle il vivait réprouvait entièrement, bien sûr.

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n évoquant les raisons de son chagrin et de sa morosité, James ne s'était pas attendu à une telle réaction de la part de Sasha. Il le savait autant que la plupart : la mort ne nous affecte que lorsque nous nous sentons concernés par elle. Combien de fois, en lisant La Gazette du Sorcier, le libraire avait-il laissé son regard trainer du côté de la rubrique nécrologique sans verser la moindre larme ? Pour lui, ils n'étaient jamais que des noms, des noms et rien de plus. Ces gens, pourtant, avaient une famille et des amis qui eux, souffraient aussi profondément qu'il pouvait le faire lui-même. Sasha, si elle n'avait pas connu Nemesis (et James ne pensait pas qu'elle la connaissait autrement que, peut-être, de nom), se serait sûrement contenté de présenter ses condoléances à son interlocuteur, sans forcément y mettre de formes, et cela aurait été tout. On pouvait faire mine de compatir au deuil d'une autre personne, mais la compassion l'empathie véritable, ressemblaient à des sortes de mythes dont on cherchait à se convaincre pour se donner l'air plus digne qu'on ne l'était en réalité. Sasha n'aurait eu aucune raison de compatir. Ce n'était même pas exactement comme s'ils s'entendaient particulièrement bien en premier lieu... Et pourtant, sa réaction avait été des plus vives.

James sursauta légèrement quand la bouteille de bière que la jeune femme tenait entre ses mains l'instant d'avant glissa pour tomber sur le sol avec fracas, se brisant en multitude d'éclats de verre. Elle nettoya vite les débris à l'aide de sa baguette, mais les mots qu'elle prononça lui laissèrent bien entendre, et sans l'ombre d'un doute, qu'elle savait qui était Nemesis, et qu'elle la connaissait ieux que si elle n'avait été à ses yeux qu'un nom lu à la va-vite dans un journal. De là à deviner... ? Non, bien sûr que non, cette pensée n'osait même pas lui traverser l'esprit. Il songea un temps qu'il veait peut-être de lui apprendre le décès de son amie, qu'elle n'était pas au courant. Mais il oublia vite cette hypothèse. Elle paraissait plus perturbée que surprise. Sûrement parce qu'elle ne s'attendait pas à ce qu'un sujet qui devait être encore douloureux pour elle (autant qu'il l'était pour lui) soit ainsi mis sur le tapis. Il s'en remettrait, disait-elle... Mais elle, s'en remettrait-elle. Elle avait disparu de son champ de vision quelques instants et y était revenue armée d'un verre d'alcool bien plus fort que le précédent... Il se contenta de répliquer par un haussement d'épaules. Oui... Il s'en remettrait sans doute, oui... Mais ça lui prendrait du temps, à n'en pas douter. Et en attendant, ça faisait vraiment très mal.

-Tu pourrais m'en servir un ? Demanda-t-il en désignant d'un geste de la tête le verre d'alcool qu'elle tenait entre ses mains. Il n'était pas un grand buveur, non, mais en la circonstance, ça lui semblait approprié. Puis il embraya, ne dissimulant pas sa curiosité. Vous étiez très proches, toutes les deux ?

Il ne concevait pas d'autres raisons qui puissent justifier sa réaction.

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ames but d'une traite le contenu du verre que lui tendit Sasha. C'est certain, il allait le sentir passer, lui qui tenait terriblement mal l'alcool.... mais les circonstances étaient exceptionnelles, elles méritaient bien qu'il fasse quelques excès, pour le moment tout du moins. Il fit une légère grimace en sentant l'alcool lui brûler la gorge, puis glisser jusqu'à son estomac. Bon, ça ferait du bien par où ça passerait. Pendant ce temps, Sasha lui apprenait l'état de sa relation avec Nemesis. Ils ne se connaissaient pas si bien que cela... Pourquoi cette réaction, dans ce cas ? Ah, elle était proche de son frère... Peut-être plus que proche, même. Voilà qui pouvait justifier pas mal de choses, en effet. Dans tous les cas, ils l'avaient tous les deux connus, et chacun à leur manière, ils encaissaient le coup, supportaient cette mort comme ils le pouvaient. Pour des raisons totalement différentes, c'est certain... mais cela, le libraire n'était pas encore à même de le comprendre. Il valait mieux, d'ailleurs, qu'il ne le comprenne jamais. Vint alors cette question à laquelle James aurait pu aisément s'attendre. Il est vrai que, lorsqu'on comparait les tempéraments respectifs de James, et de sa défunte meilleure amie, l'on pouvait aisément se dire que quelque chose clochait. Leurs caractères étaient aux antipodes, et leur amitié, par conséquent, insolite. Mais c'est pour cette raison que James aimait tant Nemesis, parce que, si rien ne semblait les rapprocher, ils étaient tout bonnement complémentaires, elle disposait des qualités et des défauts qu'il ne possédait pas, et réciproquement. C'est comme cela qu'avait toujours fonctionné leur amitié. Et maintenant, ce n'était plus que des cendres, et des souvenirs qui, peu à peu, se résumeraient au néant.

-Je sais... le jour et la nuit, pas vrai ? Sauf qu'il avait toujours cru que la nuit, c'était lui. Personne n'a jamais compris pourquoi on s'appréciait autant, même moi, je suis pas sûr que je saurais te dire. Mais... elle a toujours été là, dans des situations ou d'autres m'auraient tourné le dos, n'auraient plus voulu entendre parler de moi, ou pire...

Et elle l'avait toujours soutenu. Quand il avait eu des doutes, quand il n'avait plus su comment s'en sortir, elle était là. Elle était là première à qui il avait avoué son homosexualité, elle était la première à avoir su son aventure avec Ethan, elle n'avait guère eu l'occasion d'apprendre la tournure qu'avaient pris les choses, mais elle aurait continué de le soutenir, il le savait bien. Elle était jusqu'à accepter de sous-entendre à Lindsay qu'elle était sa maîtresse pour que cette dernière ne la soupçonne pas d'être avec un homme, alors qu'elle avait ses propres soucis personnels à résoudre. Bien sûr, il ne voyait qu'un côté de la médaille. Il se prétendait peut-être son meilleur ami, mais il ignorait tout de la noirceur qu'avait pu contenir l'âme de la jeune femme, de ce qu'elle pouvait avoir de mauvais en elle, ces secrets qui lui auraient fait froid dans le dos s'il avait su. Peut-être serait-il bon qu'il sache. Il idéalisait Nemesis, il tomberait certainement de haut.

-Elle me manque...

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ames n'attendait pas vraiment de Sasha qu'elle joue le rôle de l'amie surgie de nulle part, de la psy, ou de l'oreille compatissante, il ne l'envisageait dans aucun de ces rôles, pour tout dire. Non pas qu'elle ne puisse pas être une amie en or... après tout, elle l'était peut-être pour d'autres, mais ce n'était pas ainsi qu'il la connaissait. Pour lui, elle n'était jamais que la soeur de son meilleur ami, cette soeur qu'il n'avait jamais forcément apprécié, quoi qu'il en soit. Il ne voulait pas forcément la voir dans un rôle différent de celui-là, s'il lui fallait vraiment se confier, ce serait auprès d'Angus ou de Gabrielle. Si elle avait été encore en vie, cela aurait été auprès de Nemesis. Non, s'il avait parlé si librement d'elle, c'est juste qu'il avait eu envie d'exprimer tout cela à haute voix, peu importe que cela intéresse véritablement son interlocutrice ou que, au contraire, elle s'en fiche complètement.

Il avait juste besoin, un besoin viscéral, d'extérioriser sa souffrance, cet étau qui lui serrait le coeur et lui faisait un mal de chien. Il ne lui reprocha pas, donc, de ne lui adresser aucun mot témoignant d'une quelconque empathie. S'il l'avait entendue faire, il l'aurait sûrement trouvé hypocrite, de toute manière. Il n'avait besoin de la fausse compassion de personne. En fait, c'était là le genre d'attitude qu'il exécrait plus que n'importe quelle autre. Alors il se contenta d'acquiescer quand elle lui proposa de reremplir son verre. Il ne devrait pas boire autant. Pour certains, ça n'aurait peut-être pas l'air d'être beaucoup, mais il en fallait peu à James pour être complètement saoul, alors Angus risquait fort de le retrouver dans un état pitoyable quand il rentrerait enfin. Et ne parlons même pas de l'état dans lequel le retrouverait Ethan quand il rentrerait enfin. Qu'importe. Pour l'heure, James ne pourrait pas s'en moquer davantage, en fait, il ne prenait même pas la peine d'y penser, il avait l'impression que ce breuvage était le seul remède efficace contre sa douleur, pour le moment. Alors qu'il buvait une gorgée  bien trop grande pour sa tolérance, il manqua de la recracher quand il entendit Sasha faire une réflexion à laquelle il ne s'était pas le moins du monde attendu. Le bon côté de qui ? De Nemesis, à tous les coups ? Mais pourquoi lui parlait-elle de ça ? Pourquoi maintenant ? Et qu'avait)elle, en fait, contre elle ?

-Qu'est-ce que tu veux dire ? lui demanda-t-il, fixant son regard dans le sien, les sourcils froncés.

Maintenant qu'elle avait lancé le sujet, il était hors de question qu'elle ne lui réponde pas. Il voulait savoir de quoi elle parlait exactement. S'il était clair que James avait une vision plus qu'idéalisée de feu sa meilleure ami, il se demandait tout de même ce qu'on pouvait avoir à lui reprocher. Ce n'était pas forcément une bonne chose que de gâcher le souvenir pour le moment intact d'une personne qu'il avait sincèrement aimé, et qui lui manquait déjà beaucoup.

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I

l est toujours difficile de voir ses certitudes être remises en cause, et quand ces certitudes concernent quelqu’un à qui l’on tient énormément, c’est pire encore. Là, pour James, il était d’autant plus difficile d’entendre quelqu’un balancer sa meilleure amie de son piédestal que cette-dernière était tout de même décédé très récemment. Aux morts plus encore qu’à tous les autres (et quelque part, c’est sans doute injuste), l’on doit plus de respect qu’à tout autre. Enterrer plus bas que terre quelqu’un qui, justement, était déjà intérêt, et qui n’avait logiquement aucun moyen de se défendre, c’était violent, quand même. Et James avait vraiment le sentiment que Sasha avait des griefs concrets contre Nemesis. Quel autre intérêt aurait-elle de lui dire ce qu’elle avait dit. D’accord, le libraire et la soeur d’Angus n’avaient jamais été les meilleurs amis du monde, mais de là à enfoncer l’autre dans son malheur, quand même pas, non ! Et le fait qu’ils aient tous les deux un coup dans le nez ne justifiait en rien qu’elle ait prononcé les mots qu’elle prononçait. Quand bien même Sasha n’avait pas poursuivi après avoir décrété qu’elle ne voulait rien dire quand elle disait qu’il n’avait vu que le bon côté de Nemesis, il aurait insisté afin d’en apprendre davantage et lui tirer les vers du nez. Mais en plus, elle en rajouta. Némésis loin d’être une sainte, d’accord… Après tout, personne ne l’était, pas même lui. Mais quand elle lui parla de ces histoires de gourou, il fut clair qu’il ne pouvait pas la laisser plus longtemps faire des insinuations et ne pas les justifier. C’était de l’honneur de sa meilleure amie, qu’il était question. Et visiblement, Sasha en voulait à l’avocate pour une raison bien précise. James voulait savoir laquelle, et même s’il n’était pas de nature à s’imposer de manière générale, il se sentait prêt à hausser le ton si elle n’allait pas au bout de sa réflexion.

-Si tu ne voulais rien dire, fallait pas commencer à m’en parler. T’en as trop dit, là, alors explique-moi. J’ai le droit de savoir de quoi tu parles, tu crois pas ?

Son ton était manifestement agacé, et l’on pouvait y entendre la colère qu’il ressentait, cette colère à l’idée d’avoir l’impression que quelque chose de crucial lui échappait. Il n’aimait pas qu’on joue avec ses nerfs… Il pouvait faire avec au quotidien, sauf que là, il avait bu. S’il est quelqu’un que l’on pouvait prendre pour exemple afin d’affirmer que l’alcool a le pouvoir de déshiniber les plus discrets, James en était un parfait. Il aurait clairement parlé différemment si son estomac n’avait pas dors et déjà ingéré tant d’alcool (à combien de verres en étaient-ils, au fait ? ), mais au final, ce n’était pas plus mal qu’il soit dans un tel état. Il voulait savoir, il voulait comprendre. Et aussi, il aurait peut-être plus de facilités à entendre ce que Sasha pourrait lui dire… Ou pas. Il se pouvait qu’il se contente tout simplement de tout rejeter en bloc. la solution de facilité est toujours tentante.

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l avait voulu entendre ce que Sasha avait à dire au sujet de Nemesis, ce qu'elle pensait réellement d'elle, l'y contraignant presque, voilà qui était fait. Et il se demandait à présent s'il n'aurait pas mieux fait de s'abstenir. Chacun des mots qu'elle prononçait à l'adresse de sa meilleure amie défunte était aussi tranchant que des lames de rasoir, et James en éprouvait un véritable frisson d'horreur. Comment pouvait-elle manquer à ce point de respect à une personne décédée. Et pas n'importe qui... James n'arrivait pas le moins du monde à reconnaître sa meilleure amie dans le portrait que Sasha était en train de dresser d'elle. C'était comme si tous les deux ne faisaient pas référence à la même personne. C'était à peine croyable, tout de même. Une seule et même personne ne pouvait pas ainsi disposer de deux facettes si contrastées, et en apparence incompatibles ! Ou alors il fallait que l'une de ces deux facettes ne soit que pure illusion, un tissu de mensonge là seulement pour servir d'autres intérêts.

Se pourrait-il que Nemesis lui ait montré d'elle une image biaisée, érronnée, dans l'unique but de le manipuler ? C'était trop douloureux à croire pour qu'il l'accepte, encore plus maintenant qu'elle avait quitté ce monde. Elle avait été si présente et attentive avec lui. Quand il lui avait appris son homosexualité, son adultère, elle ne l'avait pas jugé une seule seconde... pour justifier son propre adultère ? Non, il ne pouvait pas concevoir les choses de la sorte. Elle ne pouvait pas être ce monstre d'égoïsme que lui présentait Sasha... Mais pourquoi est-ce qu'elle mentirait ? Quel intérêt aurait-elle à ainsi cracher sur le cadavre de l'avocate ? Elle avait dû lui faire du mal, pour qu'elle en vienne à tant d'amertume, et si le libraire avait seulement envie de lui dire qu'elle avait tort, la partie de lui qui se mettait à douter le retenait de lancer à la soeur de son meilleur ami les piques sévères et odieuses qui lui venaient à l'esprit.

-Comment peux-tu dire une chose pareille... se contenta-t-il donc de souffler tout d'abord, lui adressant un regard sombre, encore, tout de même, soucieux de laver l'honneur de cette femme dont la perte lui avait tiré tant de larmes et l'avait rendu misérable. Qu'est-ce qu'elle t'as fait pour que tu oses dire ça d'elle ? demanda-t-il sans la lâcher du regard.

Il ne pouvait pas croire qu'elle avait prononcé ces mots gratuitement, uniquement pour lyncher une morte. Il n'avait pas forcément une très grande estime pour elle, mais jamais il n'irait croire une telle chose... Alors il y avait forcément autre chose. Nemesis lui avait forcément fait ou dit quelque chose. Et il voulait savoir quoi. Ce n'était pas forcément une bonne chose, il en avait conscience. Tant qu'il le pouvait, mieux valait sans doute qu'il garde intacte l'image qu'il avait de sa meilleure amie afin de pouvoir honorer sa mémoire sans que cette dernière soit entachée par tout ce qui aurait pu être dit d'horrible à son sujet. Mais les mots prononcés par Sasha lui pesaient désormais sur la conscience, et il avait besoin de savoir de quoi il retournait exactement, de comprendre de quoi la jeune femme accusait très exactement l'avocate.

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on, il ne s'en irait pas, il n'avait pas envie de s'en aller. Planté là comme un piquet, il avait beau avoir l'esprit embrumé par ce qu'il avait consommé d'alcool, il avait malgré tout le sentiment d'avoir atteint un nouveau degré de lucidité... Et avoir gagné une certaine bravoure. James était généralement si à cheval sur la politesse, et craignait tant de contrarier les personnes qui l'entouraient, qu'il les apprécient ou non, qu'il était de nature à ne pas insister et à s'en aller normalement dans ce genre de situations. Mais là, il avait suffisamment d'alcool dans le sang pour ne pas se laisser démonter. Il n'avait pas l'intention de s'en aller sans découvrir les reproches précis que Sasha avait affaire à Nemesis. Et quels reproches ! Ce n'était pas une animosité innocente que la soeur d'Angus éprouvait pour celle que James avait considéré comme sa meilleure amie, c'était une haine profonde et viscérale. Et ce qu'ellle lui disait de lui, même si elle ne lui apprenait rien de précis était alarmant.

Non, elle ne pouvait pas lui demander de partir comme ça. Il avait besoin d'en savoir plus, il avait le sentiment véritable que c'était infiniment nécessaire à son travail de deuil, et qu'il ne parviendrait à rien, encore moins qu'avant à surmonter ce coup du sort, s'il était dans l'ignorance de certaines choses. Sasha, tout de même, venait quand même de lui apprendre que Nemesis aurait été susceptible de la tuer. Non parce que c'était bel et bien ce qu'elle lui avouait à demi-mot, non ? Et il avait envie et besoin de comprendre. Non, pas un seul instant il n'associait pour autant Sasha à la mort de la jeune femme, il la pensait incapable d'une telle chose (mais en même temps, il en était de même pour elle), il avait besoin de comprendre exactement les griefs précis du libraire à l'encontre de celle dont il n'arriverait jamais à faire le deuil s'il la laissait en plan comme ça, là, maintenant, tout de suite.

-Non. s'opposa-t-il d'un ton qu'il s'étonna lui-même de percevoir aussi ferme. Généralement, il était bien rare de sentir autant de détermination dans le ton de sa voix. Ce dernier s'apaisa malgré tout au moment de reprendre la parole. Il ne voulait pas qu'elle se braque non plus, loin de lui cette idée. Loin de là. Il avait juste besoin de comprendre, de comprendre à tout prix. Dis moi ce qu'elle t'as fait. Je te croirais sur parole, je te le promets, mais il faut que je sache.

Parviendrait-il à la croire bel et bien ? Au fond ce n'était pas si certain. Il n'avait jamais eu de véritable estime pour Sasha, à  l'inverse de Nemesis, mais il fallait qu'il entendre ce son de cloche. Après, il pourrait bien en faire tout ce qu'il voulait. ... Ceci dit, il se sentait plus prompt à la croire qu'au début de leur conversation. L'alcool aidant, peut-être. Sasha avait l'air parfaitement honnête vis à vis de lui. Et James commençait à croire que Nemesis avait dû terriblement la faire souffrir pour déclencher chez elle de telles réaction.

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C'

était bien la première fois que Sasha s'adressait de cette manière à James, si durement et si désagréablement. Ils ne s'étaient jamais leurré l'un et l'autre quant au fait qu'ils ne s'appréciaient pas outre mesure, mais ils avaient su faire illusion jusque là, ne serait-ce que par respect envers Angus. Certes, ils n'avaient pas grand chose en commun, leurs tempéraments étaient bien différents, et ils n'étaient sans doute pas faits pour s'entendre, mais ils avaient toujours réussi malgré tout à demeurer au moins courtois, faute d'être forcément agréables. Sauf que la conversation prenait un tournant qu'aucun des deux n'aurait pu s'imaginer, et qui invitait peut-être moins à se montrer cordial. D'autant que si l'alcool était en train de monter très sévèrement à la tête de James, il semblait que Sasha, pour sa part, n'était pas préservée des effets néfastes de cet alcool qui vous invite toujours à parler bien plus que de raison. James grimaça mais préféra ne rien rétorquer à son "tu fais chier", l'alcool lui donnait du tempérament et lui offrait de se dresser avec moins de crainte contre ceux qui l'entouraient et pour ce en quoi il croyait, mais même alcoolisé, il n'en restait pas moins pacifique et non violent, pas le genre à embrayer sur une insulte et à faire tourner le tout au pugilat. Il préféra attendre sa réponse, puisque Sasha semblait prête à lui en donner une...

...et cette réponse en question l'estomaqua. Certes, elle avait sous-entendu ce qu'elle lui confirmait à présent, mais entendre ces mots prononcés si frontalement, ce n'était pas particulièrement agréable pour autant. Bon, que Sasha soit amoureuse du frère de Nemesis... c'était un élément qu'il n'avait pas en sa possession jusque là, mais qui ne lui semblait de loin pas être le plus important... Ce sur quoi il restait bloqué, c'était la tentative de meurtre dont Sasha parlait. Bon, d'accord, James avait juré qu'il ne remettrait pas la parole de son interlocutrice en cause, mais merde ! On parlait tout de même de Nemesis, sa meilleure amie qu'il avait tout à coup le sentiment de ne vraiment pas connaître, tentant de tuer Sasha uniquement... parce qu'elle aimait son frère. Oh, James n'était pas sans savoir combien Nemesis était possessive avec Gwendall, comme l'inverse était vrai, à en juger par l'affaire Kieran qu'elle lui avait expliqué en confidence, même si à ce rythme, James allait finir par remettre en cause absolument tout ce qu'elle avait bien pu lui dire... Tout de même, au point de tenter d'empoisonner Sasha ! Il avait bien envie de protester, de traiter cette dernière de menteuse. Mais il s'abstenait. Parce qu'au fond, il ressentait qu'elle pouvait bien dire vrai, qu'il le veuille ou non. Et parce qu'il lui avait fait une promesse. Il était bien contraint de la respecter, à présent.

-Et comment tu t'en es sortie ? demanda-t-il avec une froideur dans le ton de la voix qui lui ressemblait bien peu.

Parce qu'il avait envie et besoin de douter pour que cette histoire ne le rende pas complètement dingue. Après tout, comment Sasha aurait-elle pu survivre à une tentative de meurtre et ne pas porter plainte contre l'avocate, toute avocate pouvait-elle justement être. Il avait besoin d'entendre sa version des faits, qu'importe s'il décidait ou non d'y croire ou pas en définitive.

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I

l était difficile et désagréable d'entendre parler en des termes si cruels de quelqu'un que l'on avait pourtant profondément aimé, dont on avait été très proche, pour qui on s'était senti prêt à tout... mais, outre le fait que Sasha n'avait aucune raison de lui mentir sur la question, et encore moins d'inventer une histoire pareille, James devait reconnaître que ce récit n'était peut-être pas aussi rocambolesque et fantaisiste que ce qu'il avait envie de soutenir, afin de se voiler la face encore un peu... Elle était excessive, c'était un fait, ça avait toujours été le cas... Et au nom de ses émotions et de ses sentiments, qu'elle vivait également avec une intensité similaire, ce serait mentir que de dire qu'il n'avait pas pressenti qu'elle était bien capable de faire couler le sang... Il n'aurait jamais imaginé, néanmoins, qu'elle serait effectivement passée à l'acte un jour. Ce constat lui remuait l'estomac, il avait le sentiment qu'il allait être malade... Ou bien était-ce seulement l'alcool ? Dans tous les cas, accepter la réalité le mettait dans un état de mal-être total. Et si Nemesis avait vraiment tenté d'empoisonner Sasha.

-Empoisonnée... souffla-t-il plus pour lui-même que vraiment pour Sasha... Puis, plus fort, cette fois, en levant les yeux vers la soeur de son meilleur ami. Elle est morte empoisonnée.

C'était une chose que Sasha savait déjà peut-être, mais cet élément d'information le troublait tout à coup. Est-ce que ça signifiait qu'il soupçonnait tout à coup Sasha ? Pas forcément, à vrai dire, si elle était coutumière de la méthode, et bien moins innocente qu'elle le prétendait, il se pouvait bien qu'un autre ait voulu retourner son venin contre elle... Ou bien ? Si  elle avait, comme ça, du venin à sa disposition, c'était peut-être que, contrairement à ce qui se murmurait, il n'y avait pas d'assassins. Nemesis était excessive en tout. Et si elle s'était donnée la mort ? Qu'est-ce qui valait le mieux ? Que devait-il croire ? Fallait-il qu'il écoute le récit de Sasha et ne remette rien en question ? Ou fallait-il plutôt qu'il doute de tout. Il était complètement paumé... C'était chose difficile que de remettre en cause toutes ses croyances et toutes ses convictions pour affronter la vérité. Il l'avait déjà fait, c'est vrai, et récemment, même, mais ça avait quand même été bien plus plaisant qu'en cet instant, où l'ange se transformait en démon, l'innocente en assassin. Il hésita, et ne fut même pas certain d'y croire quand il prononça les mots suivants. À nouveau, l'alcool ne devait pas aider.

-Je suis désolé... de ce qu'elle t'a fait.

Si c'était vrai, il lui semblait que quelqu'un devait des excuses à la jeune femme, et Nemesis n'allait pas miraculeusement reparaître pour présenter ses excuses, donc... Il se sentait redevable... parce que si c'était vrai et qu'il n'avait rien vu.. que par conséquent, il avait indirectement cautionné ses actes, alors il ne valait pas forcément mieux qu'elle. C'était vraiment une situation étrange, et s'il devait reconnaître que tout était vrai, alors cela remettait en cause tant de choses qu'il commençait à s'interroger sur le moindre instant qu'il avait pu passer avec celle qu'il avait cru être sa meilleure amie.

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