V

oilà longtemps que ce n'était pas arrivé, mais enfin, et pour la première fois depuis bien longtemps, Hermione ressentait un espoir qu'elle n'avait vraiment pas besoin de feindre, et elle avait fini par se dire que ça n'arriverait plus. Elle n'avait pas voulu s'abandonner au défaitisme, parce que ce serait déclarer forfait et céder du terrain à l'ennemi, mais difficile tout de même de ne pas songer, parfois, au fait qu'ils ne retourneraient peut-être jamais dans leur époque, que leurs manigances renforceraient les pouvoirs de Tom Jedusor plutôt que de les annuler, qu'ils étaient en train de faire plus de mal que de bien, que leurs actions ne mèneraient nulle part...

Mais pour cette fois, elle réalisait que toutes ces réflexions n'avaient pas eu de sens, et que l'espoir était permis. Ils avaient vraiment gagné du terrain. Ils avaient réussi enfin à détruire ce fichu journal, ils avaient détruit une partie de son âme. Cela ne voulait pas dire qu'ils avaient gagné la guerre, non, bien sûr que non. Mais ils emportaient une bataille, et c'était une bataille qui devait être décisive. Le chemin à parcourir encore lui paraissait moins effrayant, dorénavant. Certes, ils avaient encore une montagne à gravir. Mais elle se sentait équipée, elle se sentait véritablement capable de faire face... Pas elle, eux, ses amis, la résistance. Ils étaient plus forts que ce que l'ennemi pouvait bien soupçonner. Et il fallait seulement qu'ils le découvrent trop tard.

Elle avait appris que Maisie Winters se trouvait actuellement au quartier général. Même si elle la connaissait de réputation et avait beaucoup entendu parler d'elle, et elle pensait que ça pouvait être l'occasion de se présenter en bonne et due forme et de parler posément. Elle vint donc à sa rencontre, armée des meilleures intentions possibles, et d'une bonne humeur certaine, qu'elle n'avait pas ressentie depuis un bon moment.

-Vous pouvez m'appeler Hermione, je préfère, répondit-elle dans un fin sourire. Et c'était le cas. Elle n'était plus vraiment habituée à se faire appeler Prudence. Ici, ils opéraient à visage découvert, ils pouvaient retrouver pleinement leur identité. Et ne serait-ce que par franchise envers une alliée, il était évident qu'elle préférait se faire appeler par son véritable nom. Je suis heureuse de faire votre connaissance plus... officiellement, j'ai beaucoup entendu parler de vous.

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L'

humilité de Maisie lui faisait très certainement honneur, mais Hermione devait bien reconnaître qu'elle aurait préféré entendre son interlocutrice accepter le compliment sans le minimiser. Oui, elle considérait Maisie comme une héroïne de guerre à partir de on-dits, mais à l'heure où une nouvelle guerre était à déplorer, ils devaient tous autant qu'ils étaient chercher à être des héros. Pas dans l'optique de se faire mousser, bien sûr, mais dans l'ambition de donner le meilleur d'eux-mêmes, de se dépasser afin de faire front face à un ennemi commun très dangereux.

Peu importe ce que son interlocutrice pensait de ce qu'elle était et de ce qu'elle valait, Hermione espérait au moins ne pas se tromper en présumant qu'elle restait déterminée à se battre, et capable, également, de se battre. Même s'il est vrai que, par moment, il était difficile de ne pas se décourager tant la tâche était ardue et les pistes à leur dispositions, quelques fois, moindres.

-J'en doute fort, répondit-elle. Dans tous les cas, je préfère me faire mon propre avis que de me fonder uniquement sur l'opinion d'autrui, ajouta-t-elle.

Elle ne pensait pas que le reste de leur conversation lui donnerait tort, mais sa propre expérience lui avait déjà appris qu'il ne fallait jamais juger un livre à sa couverture, ou un homme à sa réputation. Cette conversation allait être l'occasion de faire plus ample connaissance avec cette femme qui, par la force des choses, était également son alliée.

-Que nous vaut votre visite ? enchaîna-t-elle alors.

Peut-être que Maisie voulait simplement se tenir au courant de ce qui se tramait au sein de la résistance. Même si les résistants faisaient régulièrement le lien avec l'Ysbridion via Christopher, procéder à un état des lieux réguliers n'était pas forcément un luxe. Mais peut-être également qu'elle était là en tant que messagère, qu'il y avait du nouveau, du mouvement, et dans ce cas, elle avait d'autant plus de raisons de se montrer attentive.

Hermione n'avait pas le sentiment que son interlocutrice était alarmée ou paniquée, elle voulait croire que c'était plutôt un bon signe, mais l'on n'est jamais trop prudent, malgré tout. Dans l'état actuel des choses, il ne fallait rien négliger, ce serait commettre une erreur manifeste, qui ne pouvait tout simplement pas être acceptable.



   

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aisie lui répondit qu'elle venait là pour réfléchir. Elle pouvait le concevoir, en effet. Pour sa part, elle ne considérait pas cet endroit comme propice à la réflexion, mais elle était forcément biaisée par sa situation, par le fait que cette maison relevait à ses yeux davantage de la cage dorée que du lieu de méditation. Mais Maisie, elle, allait et venait comme bon lui sembler. Confronter son esprit à celui d'autres devait par conséquent lui faire du bien, sans oublier qu'elle pouvait plus facilement s'isoler dans un autre cadre, qui lui permettait peut-être d'observer les choses sous un angle différent. A moins qu'elle ait d'autres ambitions, qu'elle prenait soin de lui dissimuler. Mais Hermione ne le pensait pas, elle tenait son interlocutrice pour une personne relativement transparente, même si elles se connaissaient peu. Ou en tout cas, elle ne l'imaginait pas mentir sans raison apparente comme ce serait le cas, alors.

-Je ne saurais vous dire si cet endroit est plus propice à la réflexion qu'ailleurs, mais je ne serais pas contre le fait de partager nos réflexions.

Ils vivaient en vase clos. De temps en temps, quelques résistants ou membres de l'Ysbridion venaient les rejoindre, mais la plupart du temps, ils n'étaient que sept, et au bout du monde, ils finissaient par tourner en rond. Avoir un regard extérieur, pour relancer la réflexion, ça ne pouvait que faire du bien. Encore fallait-il que Maisie ne soit pas venue ici dans la seule intention de s'isoler.

Dans ce cas, Hermione pourrait difficilement l'obliger à parler plus longuement avec elle, elle pourrait aisément comprendre que son interlocutrice veuille juste s'isoler. Elle verrait bien. Elle allait tenter d'initier la conversation, et si Maisie devait s'en incommoder, la jeune femme ne doutait pas du fait qu'elle le lui laisserait savoir, d'une manière ou d'une autre.

-Comment ça se passe, à l'extérieur ?

C'était une question qu'elle posait presque automatiquement à quiconque venait de ce même extérieur. Certes, il lui arrivait de sortir également, que ce soit grâce au polynectar ou grâce à la cape d'invisibilité de Harry, mais ce n'était pas la même chose. Elle, elle était véritablement confronté à la situation extérieure, à plus forte raison qu'elle y jouait un rôle particulièrement crucial.


   

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aisie prit le temps de réfléchir avant de lui répondre. Et elle lui communiqua finalement une réponse entièrement réfléchie et raisonnée. C'était une chose qu'Hermione appréciait d'office chez cette femme, qu'elle apprenait seulement à connaître. Elle le voyait, elle était une femme sérieuse, et qui avait conscience du poids des mots. Elle ne parlait pas à la légère, elle ne laissait pas l'affect impacter son propos ou son opinion. Et c'était typiquement ce dont ils avaient tous besoin à l'heure actuelle : pas de ronds de jambe, pas de relativisation, pas de manichéisme. Juste la réalité nue, avec ses bons et ses mauvais aspects. Qu'il fallait prendre pour ce qu'elle était et avec laquelle il était nécessaire de combiner afin d'observer et d'apprécier la situation dans son intégralité. Afin d'agir au mieux, dans la mesure de leurs moyens, et de créer les moyens qui leur manquaient afin d'aller toujours plus loin.

Elle lui apprit donc que, à l'extérieur, la situation était mitigée. C'était malheureusement prévisible, et la réponse ne surprenait pas Hermione le moins du monde. Mitigée, elle ne pouvait que l'être, en effet, car il ne servait à rien de prétendre que tout allait bien dans le meilleur des mondes. Et ce serait une erreur, dans le même temps, que d'imaginer réellement que la situation était tragique et immuable. Elle n'était pas enviable, mais il y avait du mieux, des résultats qu'il fallait considérer comme sincèrement encourageants. La destruction du journal, et donc d'une partie de l'âme de leur ennemi, c'était un progrès indéniable. Et s'il ne fallait pas se reposer sur leurs lauriers, il fallait reconnaître leurs victoires où elles se trouvaient.

Donc, la découverte de la trahison de Seth au sein du bureau des Aurors avait semé la confusion et une certaine paranoïa. C'était compréhensible. Seth Beresford, Hermione l'avait rencontré, et maintenant qu'elle savait ce qu'elle savait à son sujet, elle ne cesserait de se reprocher de l'avoir pris en sympathie et de ne pas avoir vu son vrai visage. Mais de toute évidence, elle n'était pas la seule du tout. Il avit été découvert, et les Aurors finiraient par lui mettre la main dessus, c'était ce qui comptait, au bout du compte.

-En effet, reconnut Hermione, céder à la panique et à la paranoïa ne mènera nulle part. Un mangemort avait déserté le rang des Aurors, c'était une victoire aussi, ils réussissaient à gagner du terrain, étape par étape. La défiance est sans doute de mise, mais je pense que cette situation joue en notre faveur.


   

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e n'était peut-être qu'une impression de la part d'Hermione, due au fait qu'elle se sentait pour le moins impressionnée par son interlocutrice et par son parcours, mais la jeune femme avait le sentiment d'être passée au crible, ce qui n'était pas forcément le sentiment le plus agréable du monde. Certes, elle pouvait tout à fait comprendre les questionnements de son interlocuteur, tout comme elle admettait également qu'ils n'avaient rien d'illégitimes compte tenu du caractère particulier de la situation, mais dans une situation de tension perpétuelle, l'on pouvait parfois redouter de voir sa dévotion à une cause, voire sa légitimité remises en question alors qu'on avait finalement is sa vie et son existence tout entière entre parenthèses au profit de cette même cause.

Enfin, Hermione allait évidemment trop loin dans ses réflexions, ceci dit. Maisie Winters se contentait de lui poser une simple questions, et cette queston avait d'excellentes raisons d'être au passage. Hermione ne pouvait se contenter d'affirme que cette situation jouait en leur faveur sans apporter plus d'arguments que cela à la situation. Elle pourrait bien passer pour une optimiste béate sans une once de jugeote, et ce n'était manifestement pas l'image qu'elle voulait renvoyer d'elle-même, alors autant dérouler sa pensée. D'autant qu'en discuter avec une personne extérieure à sa situation critique, et qui avait une vue par essence différente de la situation, pourrait tout à fait leur être d'une grande utilité.

-Nous avons pu progresser sans que l'ennemi ne s'y soit préparé. Je suppose que si les circonstances n'avaient pas mené à notre disparition officielle, il nous aurait été difficile, voire impossible de conserver l'horcruxe si longtemps, et encore moins de le détruire. Les circonstances nous ont permis d'agir à couvert et en toute discrétion. Je ne pense pas que ce soit quelque chose de négligeable.

Oui, à présent, il fallait admettre que la destruction du journal avait peut-être attiré l'attention sur eux, que l'on croyait mort, mais pas forcément. Que d'autres résistants qu'eux se soient organisés pour poursuivre leur oeuvre n'avait rien d'improbable non plus, après tout. La certitude qui demeurait, c'est qu'ils avaient eu le temps de s'organiser, de réfléchir, sans subir la traque et l'assaut constant d'ennemis qui avaient estimé que leur compte était déjà réglé.

La guerre n'était absolument pas gagné, c'est un fait, mais ce premier combat gagné n'avait tout de même rien d'anecdotique. Sans vouloir spécialement qu'on leur en donne le crédit, Hermione considérait tout de même que c'était une chose qui méritait bel et bien d'être soulignée.


   

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ermione ne savait pas sur quel pied danser exactement avec son interlocutrice. Face à Maisie Winters, elle avait quelque part le sentiment de retourner à Poudlard, d'être à nouveau une simple élève, qui chercherait à tout prix l'approbation de son professeur et redouterait de ne pas l'obtenir. Elle avait de l'admiration pour cette femme combative, au parcours admirable, et sans rechercher ses éloges, elle tenait tout du moins à gagner un rien de reconnaissance.

Elle comprenait que l'Ysbridion puisse remettre en question le rôle de la Résistance ou des voyageurs temporels, mais en attendant, ils se battaient, ils progressaient, ils s'évertuaient à faire tomber l'ennemi. Leurs sacrifices pouvaient peut-être sembler bien maigres, mais ils en avaient néanmoins fait beaucoup, ils avaient renoncé à retourner à leur vie normale, ils avaient renoncé à leur liberté, et cela, ils l'avaient fait dans l'espoir de combattre et vaincre un ennemi commun dont ils étaient mieux que placés pour savoir de quoi ils étaient capables tous les deux.

Oui, la victoire était loin d'être assurée, et Hermione était loin de l'avoir dit ou un jour pensé, elle était toujours prudente et très mesurée dans tout ce qu'elle disait (pas forcément dans tout ce qu'elle faisait, en revanche), et si elle admettait leurs victoires, ce n'était pas pour s'en vanter, c'était uniquement parce que s'il était important d'admettre que le chemin était encore long, il fallait aussi savoir parfois jeter un regard en arrière et considérer le chemin franchi. C'était de cette manière que l'on progressait, que l'on gardait espoir et que l'on n'abandonnait pas. Oui, il fallait garder espoir, et rester focalisé sur leur objectif. Hermione ne savait pas si les propos de son interlocuteur étaient une incitation, un conseil, ou quelque chose d'autre, qu'elle ne comprenait pas.

-On ne se repose pas sur nos lauriers, vous savez, répondit Hermione, qui craignait un peu que ce soit ce que son interlocutrice puisse bien penser.

Elle n'en savait fichtre rien, au fond, peut-être que son interlocutrice ne pensait rien du tout, en réalité, mais la voyageuse temporelle ne pouvait s'empêcher de se poser la question malgré tout. Elle avait besoin que l'on croit en elle, en eux. Ce besoin de reconnaissance n'était pas très sain, mais il avait toujours fait partie d'elle, même dans les circonstances les plus extrêmes.

-On travaille tous les jours, on explore toutes les options possibles. Mais ce sont aussi nos réussites qui nous permettent de garder espoir, justement.


   

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ermione se doutait qu'elle s'était sans doute montré un peu trop sur la défensive, mais ce n'était pas du tout contre son interlocutrice. Elle avait simplement besoin de prouver sa légitimité constamment, autant envers les autres qu'envers elle-même. Car admettre, ne serait-ce qu'un seul instant, que tout ce qu'ils avaient traversé jusqu'alors n'avait servi absolument à rien, ce n'était pas acceptable. Il fallait donner une légitimité à leurs actes, où toutes les tempêtes qu'ils avaient essuyées ne seraient que des petites intempéries sans l'ombre de la moindre importance. S'ils devaient demeurer dans cette époque, si Hermione devait renoncer à un jour revoir ses parents, alors il fallait que cela serve véritablement à quelque chose. Et le répéter, c'était aussi une manière de s'en convaincre, pour ne pas baisser les bras et toujours aller de l'avant, quoi qu'il puisse advenir.

Maisie avait raison, le combat ne s'arrêtait pas à Jedusor, mais il était assez difficile pour les voyageurs temporels de ne pas s'arrêter sur lui en particulier. Ce n'est pas qu'ils négligeaient tout le reste, mais ils avaient vu de quoi Voldemort était capable. Ils savaient de source sûr quel mal il avait engendré, et vouloir éradiquer ce mal avant toute chose était par conséquent une pure priorité... quand bien même l'histoire récente prouvait également qu'un mage noir en cachait bien souvent un autre. Grindelwald, Borodine, Voldemort... C'était presque fataliste à constater, comme une chaîne infinie qui n'aurait pas de fin. Car quand les hommes qui les portaient étaient réduits au silence, leurs idées, elles, ne mourraient pas... Et si les idées pouvaient bel et bien tuer, comment pouvait-on, en revanche, tuer une idée ? La tâche paraissait bel et bien impossible.

-Vous pensez que c'est possible ? demanda Hermione. De briser le cycle, d'empêcher pour de bon l'avènement d'un nouveau mage noir qui succédera au précédent ?

La question pouvait bien paraître candide, et par certains aspects, elle l'était effectivement, mais elle était posée avec intérêt et la volonté légitime de connaître l'opinion de son interlocutrice. Après tout, Maisie Winters avait combattu Grindelwald et ses hommes, elle ne pouvait que bénéficier de son expérience et de sa sagesse. Et elle le devait. Son cas avait beau être exceptionnel, elle n'oubliait pas qu'elle était encore jeune, et que par nombre d'aspects, elle manquait encore d'expérience. Pourtant, il en fallait, comme d'une vue d'ensemble, pour décider de la meilleure manière d'agir... Si couper une tête en faisait pousser automatiquement deux autres (certains choisissaient bien leur nom de groupe), alors que fallait-il pour détruire la bête pour de bon ? Peut-être cesser de viser la tête et toucher l'ennemi en plein coeur.

   

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a réponse de Maisie n'avait rien d'optimiste, mais elle avait le mérite d'être sincère... et réaliste, car quand bien même Hermione posait la question, elle se doutait bien de la réponse, elle avait seulement eu besoin d'entendre l'opinion de son interlocutrice sur la question, parce que cette question la taraudait et parce qu'elle était convaincue de pouvoir profiter de l'expérience et de l'opinion d'une femme qui avait déjà bien assez combattu au cours de sa vie pour ne plus se faire la moindre illusion au sujet de ce que l'avenir pouvait réserver et d'à quel point le mal n'avait de cesse que de trouver de nouvelles voies pour se répondre du moment qu'il en allait de sa décision la plus impérieuse.

Il n'y avait pas de bien sans mal, en effet, et quand on admettait cet état de fait, on reconnaissait par la même occasion que le combat était sans fin... Quand bien même Hermione avait toujours envie de croire - trop utopiste encore, sans doute - à un idéal de neutralité, où le bien n'aurait en effet plus de raison d'être parce que le mal n'existerait plus non plus, où tout serait juste et équitable. Mais bien sûr, si l'on avait tous les droits de se battre dans l'espoir de se rapprocher de cet idéal, il ne fallait pas non plus s'attendre à ce que ce dernier soit atteint si facilement. Il faudrait toujours quelqu'un pour se tenir prêt à parer à toutes les menaces qui mettaient en péril la vie et la liberté des individus. Il faudrait toujours quelqu'un pour faire face à toutes les nouvelles menaces. Les mages noirs se succèderaient, mais leurs opposants aussi... tout simplement. Et en même temps, rien n'était simple.

-J'aurais aimé être sûre de ce à quoi ressemblera notre monde à notre retour, répondit Hermione après avoir laissé passer un moment de silence.

Elle n'allait pas contredire son interlocutrice, elle ne le pouvait pas, puisque cette dernière avait entièrement raison, et admettre cela, c'était déjà une première étape vers la victoire, même si cette victoire devait être temporaire. Il fallait se rappeler, toujours, la nécessité de ne jamais baisser sa garde, de toujours demeurer aux aguets, attentif à ce que la suite nous réserverait. Mais justement, que dire de la suite ? Ils plaçaient tant d'espoirs dans leur victoire sur Voldemort, mais est-ce qu'ils pourraient être sûrs de ce que cela changerait pour eux ? Ils imaginaient un monde où les parents de Harry seraient toujours en vie, où Sirius n'aurait jamais fini en prison, où les parents de Neville n'auraient pas été torturés jusqu'à la folie... Mais qui sait ce qui se passerait vraiment, concrètement ?

-J'ai peur de rentrer chez moi, dans mon époque, et de réaliser qu'en voulant faire le mieux, on a provoqué bien pire.

Et il ne fallait pas se leurrer, ils savaient bien que leur voyage temporel aurait un impact, ils changeaient déjà le cours de l'histoire : la mort de Grindelwald, ou même celle du ministre de la Magie qui avait précédé Wilhelmina Tuft, n'avaient pas été prévues au programme. D'une certaine manière, ils en étaient responsables.

   

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on, en effet, personne ne pourrait lui donner les réponses à ses questions avant l'heure. Elle devrait vivre avec ses interrogations et accepte que l'incertitude fasse partie de la vie, et de n'importe quelle circonstance, il n'empêche qu'elle aurait bien aimé que les choses soient plus évidentes. Elle qui avait longtemps considéré que la divination était un tissu d'affabulations (et avait un peu revu sa copie avec toutes ces histoires de prophétie), voilà qu'elle se disait qu'elle aurait bien besoin de dons de voyance pour avoir une idée plus claire de cet avenir qui autrefois avait été son présent. Mais rien n'était jamais aussi simple, évidemment.

Il serait plus simple de se montrer optimiste, oui, supposait-elle. Il serait plus simple de se montrer optimiste, en effet... Mais ils ne pouvaient pas se permettre d'agir par simplicité, ce n'était pas ainsi que les choses fonctionnaient, pas dans ces circonstances. L'issue était incertaine, et il fallait la prendre avec des pincettes. Oui, il fallait avoir de l'espoir, et garder espoir contribuait à une certaine forme d'optimisme. Mais il fallait aussi être réaliste, et quand on était réaliste, on finissait bien souvent par être fataliste.

Ceci dit, si même Maisie Winters, qui n'était effectivement pas connue pour son optimisme flagrant, admettait qu'il y avait tout de même des chances pour que leur avenir se profile sous les meilleurs auspices. Ou pas. De manière générale, rien ne se passait jamais comme on l'avait prévu, et au final, Hermione n'avait pas vraiment de vision très précise et spécifique de ce qu'elle attendait de son retour dans son époque, ce pouvait être très différent et encore mieux. Ils ne pouvaient pas se faire d'image détaillée. Ils s'étaient joué de l'effet papillon à tant et tant de niveaux qu'il n'était plus possible de savoir quelles actions auraient entraîné quelles conséquences, qui en auraient entraîné encore d'autres, puis d'autres... L'incertitude était évidente.

Elle aimait entendre que leurs perspectives de réussite n'étaient pas biaisées, qu'ils avaient des raisons d'y croire, et de bonnes raisons. Dans tous les cas, l'enjeu était trop grand pour penser autrement, il n'était pas question que d'eux et de leurs egos qu'ils devraient éventuellement chercher à ménager. Il était question de l'avenir non seulement du monde de la sorcellerie, mais aussi du monde moldu. Ils pouvaient changer la donne à tant et tant d'échelles. Il fallait seulement y croire, pas en ayant la bêtise de croire que ça marcherait à coup sûr, mais avec la certitude de devoir faire même l'impossible pour garantir le meilleur des avenirs à chacun.

-Je pense que mes espoirs d'aujourd'hui n'ont plus grand-chose à voir avec ceux que j'avais en arrivant à cette époque. Les choses ont tellement changé... Elle marqua une pause. Le bien commun compte plus que nos destinées individuelles. C'est l'évidence je sais bien, mais je ne l'ai jamais aussi clairement ressenti.


   

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ue leur courage soit admirable, Hermione voulait bien l'entendre, et même, elle était prête à l'accepter comme un compliment sans le remettre en considération. Elle n'estimait que ce n'était pas un mal ou un péché d'orgueil que de le considérer de cette façon. Oui, il leur faillait faire preuve de bravoure et de ténacité, et elle voulait croire qu'ils n'en avaient jamais manqué. Mais même s'ils n'en avaient jamais manqué, ça ne voulait pas dire que ce courage ferait sur le long terme une différence. Il fallait le croire, bien sûr, car c'était ainsi qu'elle se sentirait rassurée, mais elle ne voulait pas non plus se complaire dans un optimisme excessif.

Est-ce que leur courage serait bel et bien récompensé ? Il était impossible de le savoir à l'heure actuelle, mais Hermione aimait, malgré tout, entendre Maisie l'affirmer, car si une personne dont elle respectait à ce point l'opinion pouvait voir les choses sous cet angle, alors il y avait de quoi garder la foi et ce quoi qu'il puisse advenir. Elle avait raison sur ce point, elle et ses amis étaient au fond bien jeunes pour avoir un tel regard sur les choses. Les circonstances les avaient obligés à vieillir, grandir, mûrir, agir bien plus tôt que n'importe qui. Dans les circonstances présentes, c'était sans doute une chance. Par certains aspects, c'était également un fardeau qu'il était difficile de nier. Pour ce qui était du sens du sacrifice également, ils avaient dû en passer par bien.

Et pour l'heure, au profit de la cause qu'ils défendaient, c'étaient au sacrifice d'une vie qu'ils devaient certainement se résoudre à ne plus jamais retrouver qu'il leur fallait consentir. C'était quelque chose de difficile, de douloureux par bien des aspects, mais de malheureusement nécessaire, aussi. Qui sait quand tout cela serait fini. Même quand ce serait le cas, si ça devait l'être, Hermione ne se leurrait pas : aucun retour à la vie normale ne serait jamais possible, il était définitivement trop tard pour cela et c'était bien une chose que, tous autant qu'ils étaient, ils devaient accepter.

-Je suppose que vous en savez quelque chose, répondit Hermione avec une légère hésitation dans la voix.

Pour ce qui était de vivre dans une ère de terreur, il semblait assez évident que Maisie Winters avait dû passer maîtresse dans ce domaine. Elle n'observait pas seulement l'ascension au pouvoir d'un nouveau mage noir, il lui avait fallu affronter son prédécesseur ainsi que ses sbires, ce qui évidemment devaient laisser des marques, beaucoup, même.

-Qu'est-ce que cela a changé pour vous ? Hermione baissa le regard, elle s'en voulut presque immédiatement. Ce n'était pas parce qu'elle se sentait en confiance, en cet instant, qu'elle pouvait se permettre de poser ses questions à tout va. Désolée, c'était indiscret.

   

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ermione avait bien conscience de son indiscrétion, mais en même temps, elle avait également appris, au gré de ses expériences, que l'on obtenait jamais rien sans un minimum de curiosité, tant pis qu'elle soit déplacée. Aussi estimait-elle que poser la question ne coûtait rien, et quand on n'obtenait pas la réponse que l'on souhaitait, dans certaines circonstances, l'on pouvait décider d'insister - dans d'autres, on pouvait décider que ça n'en valait de toute façon pas la peine. En ce qui concerne la jeune femme, donc, elle n'avait pas l'intention d'harceler Maisie de questions si cette dernière devait ne pas vouloir répondre, en revanche, elle s'octroyait le droit de faire parler sa curiosité et de voir où cela la mènerait.

En l'occurrence, il semblerait qu'elle ait bien fait, car son interlocutrice ne lui tint pas rigueur de son indiscrétion et, en lieu et place de cela, lui offrit un début de réponse, qui faisait que Hermione ne caressait que davantage encore le désir d'en demander plus.

Ce qu'elle commença à lui dire restait très vague alors qu'elle affirmait que c'était tout ce qui avait changé pour elle. Mais est-ce parce que la réponse était vague qu'elle était nécessairement fausse ? Très naturellement, non. Mais forcément, Hermione réclamait davantage de précision, autant pour assouvir sa curiosité que parce que, au fond, elle songeait que c'étaient là des informations qui pourraient bel et bien lui servir, en définitive, et qu'il n'y avait pas conséquent pas lieu de négliger.

Elle parlait de troubles psychologiques sans les expliciter, et c'était bien normal, on faisait difficilement plus personnel qu'un tel sujet : et des troubles psychologiques, elle voulait bien croire que l'on puisse en développer des monstrueux : les syndromes de stress post-traumatiques devaient être légion dans leurs rangs. Et bien sûr, il y avait aussi ceux que les combats directs peuvent vous infliger : Hermione n'oublierait par exemple jamais sa rencontre avec les parents de Neville : ça l'avait bien trop terriblement chagrinée.

-Pourquoi ne l'emporteriez-vous pas cette fois ? Elle était certes de nouveau indiscrète, mais cette fois, Hermione fit le choix de ne pas s'en excuser, elle voulait comprendre ce que son interlocutrice entendait par là. Si l'on doit se battre en étant défaitiste, autant ne pas se battre du tout, n'est-ce pas ? dit-elle alors plus fermement.

Surtout parce qu'elle devait s'en convaincre elle-même. Combien de fois avait-elle été tentée de baisser les bras ? Trop, sans doute, tant la situation paraissait inextricable, tant elle en venait à se dire qu'elle ne rentrerait jamais chez elle : mais c'était un mensonge, évidemment.


   

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ermione avait besoin d'espoir, elle avait besoin de croire que leur combat valait quelque chose. Ce n'était pas juste une affaire de caprice quelconque, c'était à ses yeux quelque chose qui tenait bien davantage de la plus stricte nécessité. Déjà que cette situation était compliquée, et qu'il était difficile d'accepter le fait qu'ils ne rentreraient peut-être jamais chez eux dans tous les cas, elle n'avait pas envie de commencer à se dire que ce puisse être en vain. Certes, il était peut-être important d'admettre la potentialité d'un échec, mais pour l'heure, la jeune femme ne s'n sentait tout bonnement pas capable, ce serait remettre en question tout ce pourquoi ils s'étaient battus jusqu'ici, et c'était beaucoup trop inconcevable pour elle, vraiment.

-Le problème, c'est que si une telle défiance engage ne serait-ce qu'un seul d'entre nous, elle nous impacte tous, répliqua la jeune femme avec toute la résolution et toute la force de caractère qui savaient la caractériser. Nous ne serons forts que si nous formons un pilier solide contre ceux qui menacent de bouleverser notre monde pour toujours, il suffit qu'une pierre soit branlante pour que tout l'édifice s'effondre... Elle marqua une pause, elle réalisait qu'elle était partie trop loin dans sa métaphore. Pardon... je voudrais que vous soyez encore capable d'y croire, mais je n'ai pas à vous dire tout cela. Vous savez mieux que moi, après tout, pas vrai ?

Et c'était un peu ce qui l'inquiétait, d'ailleurs. Si son interlocutrice était vraiment à ce point convaincue de ce qu'elle avançait, alors ce n'était bon pour personnes. Si les quelques individus qu'elle considérait comme de véritable piliers se révélaient capables de flancher à la moindre occasion alors... De quoi pouvait-on présumer ? Que pouvait-on encore espérer ? La réponse était trop déprimante pour qu'elle accepte vraiment de trop y songer.

-Si vous admettez qu'il y a une lueur d'espoir, c'est que vous ne faites que semblant d'être défaitiste, reprit-elle doucement. Dans le cas contraire, vous ne seriez pas ici dans tous les cas, n'est-ce pas ?

Parce que même une lueur, même infime, pouvait vous éclairer suffisamment pour vous conduire sur un chemin digne de vos attentes. Il fallait y croire. Toujours. Envers et contre tout.


   

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