Quelque chose de plus fort ! (Agrippine)

Quelque chose de plus fort !

Dennis tentait tant bien que mal de gérer la situation, de gérer ce qu’il avait appris, de gérer surtout le retour de Jedusor dans sa vie. Depuis qu’il avait reprit contact avec Amy, le jeune homme avait le sentiment que la situation était devenue encore pire que tout. Oh, il était heureux que la jeune femme ait reprit contact avec lui, qu’ils se soient vus, ça lui avait fait du bien même si ça l’avait aussi grandement chamboulé. Le souci en soit n’avait pas été Amy, bien au contraire, même s’il devait quand même assimiler le fait qu’il y avait un monde magique. Le souci venait surtout du fait que Jedusor était revenu, qu’il l’avait menacé, qu’il avait clairement menacé Amy également. Alors, même si parmi les sorciers que Amy avait rencontrés et qu’il avait rencontré par la force des choses, il y en avait beaucoup qui tentait d’arrêter son ancien camarade d’orphelinat, il n’était pas certain qu’ils allaient arriver à leur coup tout de même. Il avait envie d’y croire, il avait vraiment envie de se dire qu’il était possible d’arrêter Jedusor, sauf qu’il n’en était pas si certain que ça non plus.

Alors… Dennis angoissait. Très clairement, le jeune homme angoissait. En même temps, il ne fallait pas grand-chose pour qu’il le fasse, bien au contraire. Et quand il angoissait, le jeune homme ne dormait pas beaucoup, voir ne dormait pas du tout. Ces derniers temps, c’était tout simplement une catastrophe. Le jeune homme n’avait pas le sentiment de se reposer un seul instant, dès qu’il fermait les yeux il ne pouvait pas s’empêcher de cauchemarder. C’était une vraie catastrophe. C’était pour cela que le jeune homme avait contacté Agrippine, comme il le faisait assez souvent, afin de lui demander de l’aide. Il avait continué à boire les remèdes qu’elle lui avait vendu contre les cauchemars, afin qu’il puisse dormir, mais ça avait fait beaucoup moins effet ces derniers temps. Et sur la fin, puisqu’il ne dormait plus du tout, ça ne lui avait pas du tout fait effet pour ainsi dire… Il avait besoin d’aide, il avait besoin que toutes ses angoisses, que ses peurs disparaissent le temps de pouvoir au moins dormir un peu.

Ils avaient rendez-vous directement chez lui, Dennis ne s’était pas senti assez fort pour sortir de chez lui afin de la retrouver quelque part. Et alors qu’il l’attendait, il tournait clairement en rond chez lui. Il avait besoin de ces remèdes, il avait besoin de… en fait, il ne savait même pas ce qu’elle lui refilait, maintenant Dennis devait bien avouer qu’il doutait de beaucoup de chose. Il se rendait compte qu’il y avait quand même des choses qu’on pensait être étrange, mais qui avait une explication. Il en devenait presque paranoïaque en un sens, mais ça ne faisait pas grand-chose en plus de ce qu’il vivait dans tous les cas. Quand Agrippine frappa finalement chez lui, Dennis courra presque jusqu’à la porte pour lui ouvrir.

« Salut. » Dit-il vivement, avant de se décaler pour la laisser entrer, avec la grande envie de surtout fermer rapidement derrière elle.

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Quelque chose de plus fort !

A

grippine ne s'étonnait pas réellement de recevoir un nouveau message de la part de Dennis, c'était le genre de chose qui arrivait très souvent. Dès que le jeune homme arrivait à court de potion, il revenait vers elle, c'était devenu une sorte d'habitude, et c'était une de ces rares habitudes que la jeune femme aurait été ravie d'abandonner. Cela ne la dérangeait pas du tout de faire son beurre sur le malheur des autres, mais Dennis était indéniablement différent. Le jeune homme était un angoissé perpétuel, et la jeune femme était incapable de ne pas ressentir de la compassion et de la pitié quand il se trouvait en sa compagnie. Elle avait vraiment envie de faire quelque chose pour lui. Elle voudrait l'aider sur le long terme, l'encourager à sortir de sa coquille une bonne fois pour toutes, pour qu'il soit à même de vivre enfin sa vie, chose qu'il avait très largement mérité de pouvoir faire. Mais ce n'était pas encore gagné.

Il lui avait donné rendez-vous chez lui. Généralement, ils se donnaient rendez-vous dans un lieu public. A ses yeux, ça en disait clairement long sur l'état où se trouvait le jeune homme. S'il ne se sentait même pas capable de sortir de chez lui, c'est que son état s'était agravé, et c'était bien la dernière chose que pouvait vouloir la jeune femme. Elle avait bien l'intention d'y remédier. Elle avait rempli son sac de tout un pannel de potions qu'elle n'avait jamais proposé à Dennis jusqu'alors. Pas seulement de quoi taire ses cauchemars ou calmer ses angoisses, plusieurs potions susceptibles de booster la confiance du jeune homme étaient également ajoutés au pannel. Il les testerait sous son nez s'il le fallait, mais elle tenait absolument à ce que sa visite ait une utilité directe, réelle et sincère.

A l'heure dite, prenant soin d'être ponctuelle pour cette fois afin de ne pas stresser inutilement son client, elle arriva devant chez lui, et il la fit entrer directement. Agrippine ne put s'empêcher de jeter un regard curieux tout autour d'elle tandis qu'elle découvrait l'appartement de Dennis. Pas le grand luxe, mais le sien, d'appartement, ne valait bien évidemment pas mieux dans tous les cas.

-Bon alors, c'est quoi l'urgence ? demanda Agrippine histoire d'entrer directement dans le vif du sujet.

Elle se disait que ça valait mieux. Il faudrait bien qu'il le fasse à un moment ou à un autre, alors autant ne pas faire traîner les choses, Dennis se sentirait sans doute mieux quand il aurait craché le morceau et lui dirait ce qu'il attendait d'elle. Car elle était convaincue que cette rencontre différait des rencontres habituelles. Même si elle ne pouvait pas en être sûre pour autant.

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Quelque chose de plus fort !

Dennis se sentait déjà un peu soulagé par le simple fait que Agrippine se trouvait présentement dans son appartement. Ce n’était pas quelque chose qu’il adorait dans le sens où c’était son antre et peu de personne y avait accès volontairement. Mais pour le coup, il savait qu’il avait énormément besoin d’elle, qu’elle pouvait l’aider. Ce n’était pas sain sans doute, il était même évident que c’était sans doute quelque chose qui pouvait l’enfoncer un peu plus parce que ce n’était qu’un pensement sur une plaie béante, mais pour le moment c’était ce dont avait besoin Dennis. Il se sentait tellement noyé, il avait le sentiment qu’il n’allait jamais pouvoir s’en sortir, qu’il n’allait jamais pouvoir nager de nouveau vers la surface. Même s’il avait retrouvé Amy et qu’il était heureux de l’avoir retrouvé parce qu’elle lui avait manqué, son passé et ce qui était arrivé avait tout simplement refait surface aussi. À chaque fois qu’il fermait les yeux, il voyait le visage de Jedusor. Il n’en pouvait plus…

Une fois qu’elle fut chez lui, la jeune femme ne manqua pas d’entrer directement dans le cœur du sujet de sa visite, ce qu’appréciait évidemment Dennis. Le jeune homme n’aurait pas été capable d’échanger des banalités de toute façon, c’était urgent, il avait sincèrement besoin d’aide et il avait envie de régler ça tout de suite.

« J’ai besoin… » Dennis hésita, il ne savait pas vraiment comment dire tout ça. « J’ai besoin de ton aide. » Ça c’était quelque chose que Agrippine devait se douter. Parce que sinon, il ne lui aurait pas demandé de venir. Même si le jeune homme appréciait la jeune femme sous ses yeux, ils ne se voyaient que parce qu’ils faisaient affaire et qu’elle lui procurait des médicaments dans le but de se sentir mieux. Ce qui marchait un peu, mais ça ne pouvait pas non plus être une solution miracle. Cela dit, quand elle lui donnait des médicaments pour qu’il puisse dormir, il dormait bel et bien. Et dès qu’il n’en avait plus, il ne dormait pas du tout. En ce moment, il ne dormait pas dans tous les cas, médicament ou non. « J’ai besoin… il me faut… » Ce n’était pas bien difficile à exprimer en soit, mais le jeune homme avait beaucoup de mal. « J’ai besoin de quelque chose de plus… de plus fort. »

Il prononça la dernière phrase très rapidement, d’une voir quelque peu aigue. Il n’était clairement pas à l’aise en cet instant précis, mais en même temps il espérait que cette conversation avec Agrippine allait l’aider. Plus précisément, il espérait que la jeune femme allait tout simplement l’aider, parce que le jeune homme avait juste énormément besoin d’aide. Il avait besoin d’aide et très clairement, il avait besoin d’elle. Il osait croire qu’elle allait vraiment pouvoir l’aider, parce qu’à chaque fois qu’il avait fait appel à elle, elle avait été là et elle l’avait aidé. Et la dernière fois, la jeune femme lui avait proposé d’autres solutions.

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Quelque chose de plus fort !

I

l avait besoin de son aide. De toute évidence. Elle ne pouvait pas avoir le moindre doute à ce sujet. Dennis, elle l'avait toujours connu agité, elle avait même envie de dire que c'était là une chose qui avait tendance à le caractériser. Mais à ce point-là... C'était une première, et elle détestait le voir ainsi. Ele n'était pas du genre compatissante avec ses clients, elle ne se mêlait généralement pas de leur vie, et ça lui allait très bien que, en retour, ils ne se mêlent surtout pas de la sienne, c'était un échange de bons procédés, quelque part, mais Dennis était à ses yeux une de ces fichues exceptions qu'elle se serait bien gardée d'avoir, et contre laquelle elle ne pouvait rien.

Quand elle était en présence de ce jeune homme frêle et inquiet qui semblait terrifié même par son ombre, quand elle se retrouvait face à ce jeune homme qui serait presque sa totale antithèse, eh bien... elle compatissait. Et même si elle n'oubliait pas de se faire rémunérer pour ses services, elle lui accordait ce traitement de faveur qu'il n'avait pas demandé quand d'autres l'espéreraient peut-être de sa part : celui d'être attentif à lui, à ce qu'il voulait et à ce qui lui arrivait... même s'il lui rendait la tâche assez difficile, pour tout dire. Donc, il était là, plus fébrile encore à son habitude, à vouloir encore quelque chose de plus fort... Elle se mordilla la lèvre inférieure. Il n'allait pas bien du tout, et oui, le voir comme ça lui fendit le coeur.

-Je crois que moi aussi je vais avoir besoin de quelque chose de fort, décréta-t-elle avant que de répondre à sa requête. C'était elle qui avait voulu entrer dans le vif du sujet, mais vu la tournure que prenaient les choses, elle allait peut-être choisir de tourner autour du pot, tout compte fait. Y a à boire, chez toi ?

Elle n'attendit pas sa réponse pour commencer à fouiller consciencieusement les placards du jeune homme. Elle serait surprise d'y déniche même le cidre le plus léger du monde. Dennis avait tout un tas de problèmes, c'était clair et net, mais l'alcool n'en était pas. Et tant mieux, d'ailleurs. Parce que s'il devait ajouter l'alcool au nombre conséquent des problèmes qu'il avait déjà, il ne serait pas sorti de l'auberge.

-Je t'ai ramené ce que je t'avais promis, des trucs pour calmer ton anxiété... Par contre, si tu veux quelque chose de vraiment plus fort...

Alors, ça allait devenir vraiment dangereux, en fin de compte, et c'était un risque qu'Agrippine ne se voyait surtout pas prendre sans un peu de contexte. Parce que la jeune femme ne voulait pas plonger Dennis dans une spirale encore plus infernale que celle où il avait déjà l'ai de se trouver.

-Il va falloir que tu me dises pourquoi.

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Quelque chose de plus fort !

Dennis ne sut pas vraiment comment réagir quand Agrippine affirma que elle aussi allait avoir besoin de quelque chose de fort. Il ne voyait pas ce qu’elle entendait par là, mais quand elle lui demanda ensuite s’il y avait à boire chez lui, il comprit de quoi elle voulait parler. Dennis aurait pu répondre quelque chose, mais la jeune femme était déjà en train de fouiller ses placards. Elle pouvait fouiller, il y avait peu de chance qu’elle trouve quelque chose. Ce n’était pas que Dennis ne buvait jamais d’alcool mais… en fait, il n’en buvait vraiment pas souvent. C’était arrivé bien sûr, mais l’alcool ne l’aidait pas du tout alors autant dire que ça ne servait à rien. Et il ne s’amusait pas vraiment à en acheter. Il payait son loyer c’était déjà une très bonne chose, des fois c’était à peine s’il en était vraiment capable. Alors… non, Agrippine pouvait fouiller autant qu’elle le voudrait, elle ne trouverait rien pour elle.

Dennis pensait dire quelque chose à ce sujet, mais la jeune femme reprit en affirmant qu’elle lui avait ramené comme promis quelque chose pour calmer son anxiété. Dennis faisait confiance à la jeune femme, ses médicaments avaient tendance à marcher quand même. Quand il en prenait – sauf en ce moment –, il parvenait quand même à mieux dormir. Alors, peut-être que ce qu’elle lui proposait allait pouvoir l’aider, mais en même temps Dennis avait aussi conscience que son anxiété était quand même un gros morceau à attaquer. Et le souci, c’était que pour avoir ce qu’il voulait… Dennis devait remplir une part du marcher qui n’avait rien à voir avec le fait de payer avec de l’argent (oui, il n’achetait d’alcool, mais il prenait quand même la peine de dépenser de l’argent dans des solutions pas forcément légale dans le but de mieux dormir). Il devait parler, lui dire pourquoi il avait besoin de quelque chose de plus fort. Autant dire que c’était la pire chose du monde. Dennis n’avait aucune envie de parler, il n’avait aucune envie de dire quoi que ce soir ce qu’il avait vécu, sur la raison qu’il avait d’avoir besoin de ces potions.

« Je… » La voix de Dennis se perdit dans les aigus. Il ne voyait même pas ce qu’il pourrait dire. Il avait conscience que Agrippine attendait des explications, elle le questionnait suffisamment comme ça d’habitude, mais ça n’enlevait pas le fait qu’il ne pouvait pas en parler. « Je… je peux pas. » Dit-il d’une voix faible, palissant de plus en plus. « J’ai juste… j’ai besoin c’est tout. » Parvint-il à articuler, sans trop savoir comment. Il avait conscience qu’il devrait très certainement se montrer plus précis pour que Agrippine accepte de lui donner ce qu’il avait besoin, mais en même temps il ne savait pas jusqu’où il pourrait aller dans ses explications. « Je… je dors plus, j’ai… j’ai besoin… de dormir. »

Ces derniers jours, c’était juste impossible, il ne fermait pas l’œil et plus ça allait, moins il dormait, plus il était angoissé et moins il pouvait dormir.

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Quelque chose de plus fort !

A

grippine renonça assez rapidement à sa quête forcément vaine d'alcool et, en désespoir de cause, décida de s'affaler sur le siège le plus proche qu'elle trouva. Pas le grand confort, mais elle n'était pas là pour se prélasser, de toute façon. Elle était là pour tirer les vers du nez de son interlocuteur. Est-ce qu'elle y parviendrait ? Ce n'était pas certain. C'est qu'à sa manière, Dennis était aussi capable d'être un dur à cuire, mais elle était tout de même décidée à insister.

Dans cette situation, c'était elle qui avait le pouvoir, c'était elle qui possédait une chose que son interlocuteur convoitait, forcément qu'elle allait en jouer ! C'est sûr que ce n'était pas une méthode franchement saine ou admirable que celle-ci, mais en même temps, elle n'avait jamais prétendu être une enfant de choeur, même s'il est vrai qu'avec Dennis, elle avait tendance à faire des efforts qu'elle ne déploierait absolument pas avec d'autres. Il pouvait tout à fait se considérer comme privilégier, c'était définitivement un peu le cas.

Il avait besoin de plus fort, c'est tout ce qu'il lui apprenait, sans rien dire de plus, sans s'en justifier. C'était trop peu, beaucoup trop peu pour qu'Agrippine consente sans broncher à lui donner ce qu'il voulait. Pas seulement parce qu'elle était très curieuse, même si c'était le cas, mais parce que ce n'était pas de la camelote inoffensive, qu'elle envisageait de lui refourguer, mais bel et bien des substances qui, s'il n'y prenait pas garde, pourraient lui détraquer le cerveau ou tout du moins créer une situation de dépendance qui très clairement serait un mal à rajouter à tous les maux dont il souffrait déjà. Alors même si en temps normal, elle ne faisait pas dans le service après-vente, elle s'estimait légitime quand elle demandait à obtenir plus d'informations.

-Ça c'est pas un scoop, vu ta tête de déterré, remarqua Agrippine quand Dennis lui confia qu'il ne réussissait plus à dormir du tout.

Avec les cernes qu'il se coltinait, il aurait difficilement pu faire croire à qui que ce soit qu'il se laissait aller dans les bras de Morphée en deux temps trois mouvements. Non, c'était évident. Mais ce n'était pas en résolvant ses insomnies qu'il résoudrait ce qui en était la cause, et c'était à cela que s'intéressait Agrippine. Elle voulait comprendre, entrer dans le vif du sujet, ne rien lâcher. Elle avait réellement besoin d'assimiler la situation dans son ensemble.

-Ce que je veux savoir, c'est pourquoi tu dors plus. Si tu m'expliques pas ça, je pourrai rien pour toi, assura-t-elle, ce qui n'était qu'en partie vrai car elle pourrait très bien l'aider malgré tout.

Mais non.

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Quelque chose de plus fort !

Dennis ne prit pas mal la remarque de Agrippine quand elle affirma que ce n’était pas un scoop qu’il ne dormait plus, vu sa tête de déterré. Dennis était loin d’être à l’aise en société et en compagnie d’autres personnes, mais il ne se préoccupait pas forcément de ce qu’ils pensaient. Il avait suffisamment à faire avec ce qu’il vivait au quotidien pour ça. Il n’allait donc pas se vexer parce que la jeune femme lui affirmait qu’il avait une tête de déterré, surtout que c’était le cas très clairement. En même temps, ça ne pouvait pas en être autrement au vu de la situation, puisque Dennis n’arrivait pas à fermer les yeux.

Sauf que forcément, Agrippine ne se contenta pas simplement de lui dire que ça se voyait qu’il ne dormait pas parce qu’il avait une sale tête, mais elle lui demanda plus d’explication. Dennis sentit son corps se tendre tout d’un coup. Il en avait même la nausée rien qu’à l’idée que la jeune femme avait envie d’entendre plus d’explication, qu’elle voulait savoir pourquoi il ne dormait pas. Pourtant, il lui avait bien dit qu’il ne pouvait pas en parler. Ce n’était pas seulement qu’il ne voulait pas le faire, même si en soit il ne tenait vraiment pas à le faire, c’était qu’il ne pouvait pas le faire. Le jeune homme en était parfaitement incapable, ça le rendait malade rien que d’imaginer la possibilité d’en parler.

« Je… je… je… peux pas. » Il ne pouvait pas, il ne voulait pas. La seule chose qu’il souhaitait maintenant c’était qu’elle lui donne quelque chose de plus puissant pour qu’il puisse envisager de dormir. Quand ça marchait au début ce qu’elle lui avait donné jusqu’à présent, il arrivait à dormir un peu et ainsi il se sentait mieux. Là, c’était impossible pour lui d’envisager de s’en sortir s’il ne pouvait pas dormir un peu. Mais il se doutait que la jeune femme n’allait pas lui donner ce qu’il attendait d’elle tant qu’elle n’en saurait pas un peu plus. Elle lui avait déjà posé beaucoup de question et jusqu’à présent, Dennis n’était pas entré dans les détails. Il n’avait aucune envie de le faire, il se sentait au bord de l’évanouissement et il était évident que s’il commençait à parler de Jedusor et de tout le reste, il allait simplement faire un malaise. « C’est juste… je… en fait… je… » Sa voix était plus tremblante que jamais. Il ne se sentait vraiment pas capable de dire grand-chose. « Je fais des… enfin, des… cauchemars. Et à cause de ça je n’arrive pas à dormir… »

Elle le savait déjà, il savait bien qu’elle allait avoir envie de connaître ce qui se passait dans ses cauchemars, la raison de ces derniers et pourquoi il se retrouvait dans un tel état de détresse. Il avait bien conscience qu’elle allait vouloir connaître bien plus que ce qu’il lui disait, mais il ne se sentait vraiment pas capable d’articuler plus de mot pour le moment.

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Quelque chose de plus fort !

A

grippine était de plus en plus inquiète pour Dennis. Chaque fois qu'elle le voyait, son état semblait avoir empiré. Autant dire qu'elle n'avait pas le sentiment, par conséquent, d'avoir vraiment été d'une grande aide pour le jeune homme, bien au contraire. En soi, elle pourrait s'en foutre, lui donner ce qu'il demandait et retourner vaquer à ses affaires, mais voilà, Dennis l'intriguait autant qu'il l'inquiétait. Il avait besoin de comprendre plus précisément de quoi il pouvait bien être question, parce qu'elle avait l'impression de ne donner que des coups d'épée successifs dans l'eau, et ça depuis leur première rencontre. Et c'était frustrant. Comment déterminer réellement ce qu'il fallait à Dennis s'il ne se montrait pas plus clair ?

Mais plus elle insistait, plus elle cherchait à obtenir la vérité vraie, plus elle le poussait dans ses retranchement, plus Dennis se renfermait en lui-même, et là encore, sa réaction maladive à la situation en disait long sur son piètre état mentale. Aucune potion au monde, même très puissante, ne serait à même sans doute de soulager sa peine. C'était d'un poids trop profond, trop insidieux, qu'il fallait qu'il se débarrasse. Et elle, pour sa part, ne pensait vraiment pas avoir le pouvoir d'y faire quoi que ce soit en vérité. Et si ça ne la dérangeait pas en règle générale d'arnaquer son monde en faisant des promesses qu'elle n'était pas capable de tenir, là c'était tout de même une tout autre paire de manches.

-Arrête de tourner autour du pot. Soit tu me dis ce qui t'arrives, soit je t'aide pas, c'est tout.

D'accord, d'accord, il faisait des cauchemars. Tu parles d'une révélation. Bon, ceci dit, ça voulait dire que non, il ne souffrait pas totalement d'insomnie, il réussissait à dormir, il ne voulait pas dormir, c'était très différent. Lui prescrire des potions de sommeil carabinées ne changeraient pas grand-chose au fait qu'il continuerait de faire des cauchemars malgré tout. Enfin, il y avait des solutions pour ça aussi, des potions de sommeil sans rêve, ce genre de choses. Mais rien qui règle le fond du problème. On ne guérissait pas le mal en soignant les symptômes, et Agrippine avait bien trop pitié du cas de son interlocuteur pour juste hocher la tête et tout lui céder.

-Je changerai pas d'avis, c'est à prendre ou à laisser. Elle marqua une pause. Ce dont t'as besoin, bien plus que de potions, c'est de déballer une bonne fois pour toutes ce poids qui est en train de t'étouffer totalement. Alors soit tu m'en parles à moi, soit à quelqu'un d'autre, mais il va falloir que ça sorte.

Sur ce point, elle en savait quelque chose. Elle avait réalisé combien le poids du silence lui avait pesé qu'à l'instant où elle s'était délesté de ce fardeau en apprenant à Ignatius ce que son père lui avait fait subir.

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Quelque chose de plus fort !

S’il y avait une chose que Dennis ne supportait pas, c’était quand on le mettait au pied du mur, quand on cherchait à le forcer à faire quelque chose qu’il n’avait pas envie de faire. Surtout quand il était question de ça, question de ce qu’il avait vécu pendant son enfance. Agrippine lui demanda d’arrêter de tourner autour du pot, de lui dire ce qui lui était arrivé, sinon elle ne l’aidait pas du tout. Dennis sentit un frisson énorme parcourir son corps en entendant ces mots, parce qu’il se rendait compte que s’il ne disait rien, il n’allait pas pouvoir obtenir l’aide escompté de Agrippine, mais en même temps… il ne se sentait pas capable d’en parler pour autant. Il se retrouvait donc dans une situation horrible, à devoir parler de ce qu’il avait vécu alors qu’il détestait ça, ou bien à ne pas recevoir l’aide qu’il espérait obtenir dans le but d’oublier justement tout ce qu’il avait vécu.

Agrippine précisa qu’elle n’avait pas l’intention de changer d’avis, que c’était à prendre ou à laisser. Dennis ne savait pas réellement s’il pouvait être encore plus pâle qu’il n’était déjà, mais il avait le sentiment de pâlir encore plus. La jeune femme n’avait pas tort en soit quand elle disait que ce dont il avait besoin, c’était de parler de tout cela à quelqu’un, qu’il devait se libérer de ce poids qui se trouvait sur ses épaules. Mais c’était juste impensable pour lui d’envisager de parler de ça. Il avait conscience que Amy avait peut-être pu avancer avec ses parents, parce qu’elle avait parlé de certaines choses – quand bien même il savait qu’il y avait des choses qu’elle ne pouvait pas dire –, mais il était juste incapable de prononcer ces mots. Dennis prit sa tête dans ses mains, la seule chose dont il avait besoin en cet instant précis c’était juste d’avoir les potions, il avait besoin de dormir, de ne pas faire de cauchemars. Il ne demandait rien d’autre en soit que de dormir d’un sommeil du juste, pour pouvoir enfin se reposer, c’était tout ce dont il avait besoin. Il n’avait pas besoin de parler…

Ou pas, peut-être qu’il fallait qu’il dise certaines choses…

« Je… je veux… je ne veux pas en parler. » Sa voix se brisa légèrement après ces mots. « Je ne… je ne peux pas en parler. » C’était ce qui faisait la différence, Dennis n’avait clairement pas le sentiment de pouvoir en parler. Même s’il avait envie – et ce n’était pas le cas –, il ne se sentait pas capable de parler, très clairement pas. Même si, en soit, Agrippine n’avait surement pas tort en affirmant qu’il devait se vider de ce poids sur ses épaules, qu’il devait réussir à se sentir mieux. Les larmes aux yeux, le jeune homme parvint tout de même à reprendre la parole, non sans quelques difficultés, reprenant souvent son souffle, marquant des poses. « C’était… c’était il y a longtemps. J’ai… on… j’ai vu des choses. Et depuis je… j’arrive pas à les oublier. »

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Quelque chose de plus fort !

O

ui, ça, Agrippine, l'avait bien compris, que Dennis ne tenait pas particulièrement à en parler, et elle ne prenait pas franchement plaisir à le pousser à se confier malgré tout. Il n'était amusant de tirer les vers du nez des gens que dans certaines circonstances bien spécifiques, et en l'occurrence, non, elle ne prenait définitivement pas plaisir à cela... Dennis n'était pas juste un type qu'elle prenait plaisir à malmener parce qu'en retour elle savait qu'il était capable d'argumenter et de se défendre. Non, Dennis était un gamin à l'évidence paumé et qui avait peur de son ombre, qui avait vécu un terrible traumatisme et devait impérativement accepter d'en parler sous peine de s'effondrer ou de se laisser submerger. Oui, Dennis était peut-être plus fort qu'il en avait l'air, mais il avait besoin de quelqu'un pour éveiller ces ressources contenues au plus profond de lui. Serait-elle capable d'être ce quelqu'un ? Elle en doutait singulièrement. Mais il fallait que quelqu'un le soit, et elle avait le mérite de disposer d'un moyen de pression : pas très fair-play, c'est rien de le dire, mais moyen de pression tout de même. Elle estimait que le chantage pouvait se justifier quand c'était pour la bonne cause. Et en l'occurrence, c'en était une, oui, de bonne cause.

Quand il ajouta qu'il ne pouvait pas en parler, Agrippine fut davantage surprise. Subissait-il des moyens de pression, encore maintenant, était-ce pour cela qu'il se refusait de confier son traumatisme à quiconque ? Ou bien les raisons en étaient physiologiques ? Peut-être ne pouvait-il pas en parler parce qu'il était dans l'incapacité, littéralement, de s'exprimer. Dans tous les cas, c'était important, il fallait que les mots sortent, il fallait un déclic, et ce n'était pas en se gavant de substances narcoléptiques qu'il allait arranger ses propres affaires.

-Quelles choses ? Qu'est-ce que tu as vu, Dennis ?

L'affaire devenait de plus en plus claire, et par la même, Agrippine devenait de plus en plus insistante. Elle avait besoin de savoir, de comprendre, elle avait besoin de plus que des allusions, elle avait besoin que des mots, bien concrets, soient posés sur ses émotions à vif. Il fallait qu'il parle, c'était pour son bien, il fallait qu'il apprenne à communiquer sur ce qu'il avait vécu. Même si Agrippine n'en connaissait pas grand-chose, elle avait conscience du fait que c'était là le b.-a. ba de la psychiatrie. Et en effet, indubitablement, que cela lui plaise ou non, il était clair et évident à ce stade que Dennis Bishop avait très clairement besoin d'un psy. De cette manière seulement, il pourrait contrôler ses traumas. Agrippine, elle, pouvait l'aiguiller dans une moindre mesure, mais c'était évidemment tout.

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Ce qu’il venait de dire, c’était déjà plus que ce qu’il n’était capable de dire au quotidien. Il n’avait aucune envie d’aborder ce moment de sa vie, même si forcément il avait conscience qu’en gardant ça éternellement pour lui, il ne pourra sans doute jamais avancer… et en même temps, il se sentait incapable de dire beaucoup plus que ce qu’il n’avait déjà dit. C’était il y a longtemps, il avait vu des choses. Rien que de dire de telles choses, le jeune homme se sentait au plus mal, disait plus qu’il n’avait jamais dit à quiconque. Même avec Amy ils ne parlaient pas de cet évènement, ils ne pouvaient pas ignorer ce qu’ils avaient vécu ensemble – cela se voyait dans leurs comportements après tout –, mais ils n’en parlaient pas.

Forcément, Agrippine qui cherchait à obtenir des réponses depuis le début et n’avait visiblement pas l’intention de lâcher l’affaire, ne manqua pas de rebondir sur ses propos, lui demandant ce qu’il avait vu, quelles étaient ces choses qu’il avait vues. Dennis sentit un long frisson parcourir son corps en pensant à ces choses qu’il avait vu, en revoyant ces images de cette grotte et de ce qu’ils avaient vécu avec Amy. Tout son corps tremblé, comme lors de ce moment, il avait le sentiment qu’il se retrouvait de nouveau dans cet enfer.

Et lui la seule chose qu’il voulait, c’était que ça s’arrêt pour de bon. Qu’il puisse dormir, d’un sommeil sans cauchemar, qu’il puisse juste un peu reposer son esprit. Il voulait juste un peu de repos, un peu de calme, c’était pour ça qu’il avait besoin de Agrippine, mais elle ne voulait pas devoir expliquer plus, il ne pouvait juste pas mettre de mot sur ce qu’il avait vécu. Dennis prit sa tête dans ses mains, tentant de baragouiner des choses, dire des mots tout simplement, sans que ça ne soit possible. Il avait le sentiment d’y être, d’entendre le son des vagues qui se trouvaient près de la grotte, de sentir le froid qu’il avait ressentit à l’époque.

« Je… » Les mots avaient toutes les difficultés du monde à sortir de sa bouche. Il savait bien qu’on attendait de lui qu’il prenne vraiment la parole, qu’il dise quelque chose. Qu’il se confie sur ce qu’il avait vu, mais ce n’était pas quelque chose qu’on pouvait exprimer en quelques mots. Les doigts crispés sur sa tête, il parvint tout de même à articuler quelques mots difficiles. « Je… je veux juste… que ça s’arrête. »

Il avait envie de ne plus voir ces images, de ne plus être troublé par ce qu’il avait vécu dans cette grotte. Il avait envie de ne plus rien ressentir du tout, de pouvoir juste se reposer, c’était la seule chose qu’il demandait. Mais il avait le sentiment que c’était encore trop demander, comme s’il n’avait pas le droit d’espérer cet paix.

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Quelque chose de plus fort !

A

grippine était loin, très loin d'être une enfant de choeur. Elle n'était pas de nature particulièrement ouverte et compatissante, et elle s'ennuyait généralement de ceux qui venaient s'épancher trop longuement au sujet de leurs émotions comme si elle devrait en avoir quelque chose à faire. Mais Agrippine n'était pas inhumaine, loin de là, et quand elle voyait certaines personnes, en état de détresse émotionnelle et psychologique à ce point avancé, elle ressentait la nécessité de faire un pas vers eux. Parce que c'était un état qu'elle avait elle-même beaucoup trop connu, à une époque où elle n'avait pas osé parler, où il n'y avait eu personne pour lui tendre la main... Elle avait souffert en silence, et cela lui rendait la souffrance silencieuse d'autrui absolument insoutenable. Tout le monde n'avait pas sa compassion, c'est certain, mais Dennis Bishop, lui, l'obtenait complètement et sans hésitation.

Malheureusement, ce n'était pas parce qu'Agrippine voulait l'aider qu'elle savait forcément comment l'aider. Il était assez certain que ce n'était pas en l'invitant à des confidences que Dennis n'avait pas envie de lui faire ou en lui fournissant des potions qui anesthésiaient ses émotions et coupaient l'accès à son inconscient qu'elle lui faisait vraiment du bien... Avant de chercher à guérir les autres, il faudrait déjà qu'Agrippine sache se guérir elle-même, et ce n'était pas gagné, à l'évidence. Bref, elle voyait bien qu'il se mettait dans tous ses états, et le plus judicieux était sans doute de ne pas insister et de le laisser tranquille, mais ce ne fut pourtant pas ce qu'elle fit.

-Dennis ! Dennis, regarde-moi, l'invita-t-elle en se saisissant de ses mains qu'il avait plaquées devant son visage afin de l'obliger à croiser son regard, que cela lui plaise ou non. Parle-moi, je ne peux pas t'aider si tu ne me parles pas, je ne peux pas faire en sorte que ça s'arrête si tu ne m'expliques pas.

Elle s'exprimait certes avec gentillesse, mais non sans une certaine autorité malgré tout. Au fond, elle n'avait aucun droit d'exiger cela. Après tout, elle n'était personne pour ce jeune homme, si ce n'est cette jeune femme dangereuse et fantasque qui avait à sa disposition des produits suffisamment efficaces pour rendre ses nuits un peu plus calmes et paisibles.

Non, il ne lui devait rien, et certainement pas la vérité, mais vu les circonstances, Agrippine estimait malgré tout qu'elle méritait d'en apprendre davantage, et elle avait la ferme intention de voir son interlocuteur passer aux aveu, quitte à faire preuve d'un peu trop de volonté, quitte à se montrer un peu trop insistante. Parfois, ça payait. Même, elle avait l'habitude que ça paye très souvent. Donc, forcément, elle poursuivait sur sa lancée.

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» Marchons, il en sortira toujours quelque chose (ou pas)

Quelque chose de plus fort ! (Agrippine)

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