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 Tu ne jugeras point - Rafa

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Eve Talbot
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Message#Sujet: Tu ne jugeras point - Rafa    Tu ne jugeras point - Rafa  Icon_minitimeMar 29 Mar - 23:28

❝Eve & Rafa ❞Tu ne jugeras pointQuoi de plus embarrassant que la tâche que Eve s’est fixée ce matin ? De mémoire, elle n’arrive pas à trouver un moment où elle s’est sentie plus gênée. Alors que, Shane au bout de la laisse, elle se tient devant la pharmacie, incapable de savoir si elle va enfin pousser la porte ou non. Pourtant, la journée a commencé normalement, ou presque. Elle s’est réveillée tardivement dans le lit de Finn. A côté d’elle, la place est froide, signe que son amant s’est réveillé bien avant elle. En effet, elle ne trouve qu’un mot dans la cuisine, lui indiquant qu’il est parti en tournage pour la journée, demandant si elle ne veut pas rester le soir.

Difficile de répondre à quelqu’un qui n’est pas là, mais la proposition est tentante. Tellement tentante qu’elle se dit qu’elle risque de ne pas avoir la force de ne pas céder à ses impulsions. Or, après avoir dérapé une fois, mieux vaut ne pas tenter le diable. Ils doivent faire quelque chose pour être certain qu’elle ne retombe pas enceinte par accident. Finn, de son côté, lui a dit qu’il irait voir Matthew, mais Eve n’est pas à l’aise. Comme beaucoup de femmes, elle préférait contrôler les choses plutôt que de s’en remettre à son partenaire, peu importe la confiance qu’elle place en lui.

Après avoir hésité toute la matinée, elle s’est décidée à aller à la pharmacie. Elle se souvient, lors d’une soirée au Cohan, avoir assisté à une discussion entre Florence et deux autres filles du bar d’un moyen de contraception disponible facilement pour celles qui préféraient entraver les voies du Seigneur. Forte de cette information, elle se dit que le pharmacien de Kilburn doit avoir l’habitude. Autant aller là, elle est connue, mais tout le monde sait qu’elle a fait une fausse couche, elle n’aura pas besoin de s’expliquer. C’est pour un mieux. En tout cas, elle essaie de s’en convaincre.

Sur le chemin, on la salue avec une certaine déférence, d’un “patronne” pour les hommes de Finn et apparenté et d’un “Mam” respectueux pour les autres, mais Eve a l’impression que tout le monde sait pourquoi elle se dirige vers la pharmacie. En entrant, on fait à peine attention à elle et quand le praticien arrive, il regarde Shane avec dédain, fronçant les sourcils.

- En général, les chiens attendent dehors.

Eve hausse un sourcil, mais ignore la remarque. Elle n’est pas là pour ça. Heureusement, l’endroit est vide et elle peut parler sans risquer que d’autres entendent.

- Je viens parce que j’ai besoin de quelque chose….

Elle n’a pas le temps d’en dire plus que l’homme commente :

-Je m’étais bien doutée que vous n’étiez pas là pour me vendre des gâteaux.


Le déplaisir d’Eve s’intensifie en même temps que sa gêne. Ce n’est pas qu’elle s’attend à ce qu’on lui témoigne une certaine une certaine déférence parce qu’elle est avec Finn - bien au contraire - mais il faut avouer que personne dans le quartier n’a jamais osé lui parler sur ce ton. Mal à l’aise, elle hésite presque à tourner les talons, mais elle trop fière pour ça et puis, elle sait à quel point sa demande est essentielle si bien qu’elle tente de se faire violence pour continuer à s’expliquer :

- Et donc, je disais que j’avais besoin de quelque chose. On m’a indiqué qu’il y avait quelque chose que l’on pouvait acheter en pharmacie pour ne pas tomber enceinte au mauvais moment.

L’expression de l’homme se fait condescendante et les choses dérapent :

- Mais ma petite. Vous ne savez pas ce que vous demandez. C’est pour les femmes sans vertus. Les prostituées, se sent-il obligé de dire avant d’ajouter avant de la regarder de haut en bas. Je suis sûr que vous ne voulez pas être associée à elle.

Sans être une ardente défenseuse de la profession, elle juge la réaction de l’homme particulièrement inappropriée en plus d’être vexante.

- Je ne vois pas vraiment où est le problème.
- Où est le problème ?, s’exclame-t-il, s’enflammant au passage. Mais ma pauvre dame, vous êtes d'une naïveté ou d'une bêtise, je ne sais pas bien. Le problème, c’est que vous empêchez l'œuvre de notre Seigneur. Vous pêchez !

Il n’en fallut pas plus pour que la discussion prenne un tour beaucoup moins plaisant. Il ne faut que quelques mots de plus pour que la jeune femme ne claque la porte, exécédée, blessée et furieuse. C’est qu’il lui a fallu tout son courage pour passer la porte du magasin. Merlin sait à quel point il est gênant de parler de ce genre de choses, en particulier à quelqu’un qu’on ne connaît pas. Elle a déjà du mal à en parler à Finn, alors à un inconnu. Pleine de rage, elle ne sait pas très bien quoi faire, et c’est très naturellement qu’elle se dirige vers le Cohan pour ventiler sa frustration. Voyant sa tête, Slim ouvre promptement la porte, laissant passer la jeune femme. Elle descend les escaliers en trombe. Heureusement, le bar n’est pas encore ouvert au public et il n’y a pas grand monde si ce n’est quelques hommes du clan et Liam au bar.

- Où est Finn? ,
demande-t-elle de tout go sans prendre le temps de répondre aux salutations qui lui sont lancées.

Liam s’avance, un drap dans une main et un verre vide dans l’autre. Il lance l’essui sur son épaule et dépose le verre sur le bar pour demander inquiet :

- Ça va Patronne ? Vous avez pas l’air dans votre assiette ? Vous voulez un truc à boire ?
- Non, je veux voir Callahan. Il doit bien être ici.
- En tournage Patronne, il ne vous l’avait pas dit ?

Elle se mord la lèvre, se traitant intérieurement d’idiote, tellement énervée qu’elle a oublié où il était passé. Encore ce foutu tournage, il faudra qu’ils en parlent, mais ce n’est pas le sujet.

- Le second est là si vous voulez. Il fait les comptes à l’étage. Bougez pas, j’envoie Sean le chercher. Eh Sean, dis au second que la Patronne est là.

Et même si le barman ne dit rien, il sous-entend que quelque chose cloche. D’ailleurs, c’est bien parce que Eve est trop tendue pour le remarquer, mais l’ensemble des personnes présentes ont arrêtés de parler. Un peu comme s’ils attendaient la catastrophe à venir. Liam, habitué, à défaut d’être blasé, sert deux bières qu’ils posent sur le comptoir. Ils vont en avoir besoin. Eve de son côté, lâche Shane qui signale l’arrivée d’O’Riordan en allant japper autour des jambes du second de Callahan alors qu’il descend l’escalier. Eve lève enfin les yeux en voyant son ami arriver. L’expression est catastrophée et Eve lève les yeux au ciel :

- Ne me regarde pas comme ça. Je n’ai tué personne. Pas encore en tout cas.

L’annonce d’une journée qui commence bien.

:copyright: 2981 12289 0


Dernière édition par Eve Talbot le Mer 30 Mar - 21:25, édité 2 fois
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Rafael O'Riordan
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Message#Sujet: Re: Tu ne jugeras point - Rafa    Tu ne jugeras point - Rafa  Icon_minitimeMer 30 Mar - 15:38

Tu ne jugeras pointEve & Rafa

-Non mais c’est bon, patron, marmonne Rafa en réponse à un dixième “ça va aller, hein, t’es sûr ?”. Si j’vous laisse faire, bientôt vous allez me tenir la main pour traverser la rue.

Finn Callahan se marre, rétorque que s’il faut en venir là, ça ne lui fait pas peur, et donne une tape amicale - et plus symbolique qu’autre chose - sur l’épaule de son second. Ce mardi, il doit s’absenter pour la journée, et de toute évidence, il n’est pas tranquille. Il faut dire que Rafa a plus la tête d’un mec qui devrait être à l’hôpital que celle d’un lieutenant capable de tenir la baraque en l’absence du patron. La rencontre avec Hawthorn Avery, deux jours plus tôt, a laissé des traces. Un nez cassé, que Matthews a soigneusement plâtré en ne promettant rien quant à son aspect futur. Des marbrures bleues, vertes, jaunes, un peu partout et particulièrement sur la partie gauche du visage. Une lèvre fendue. Un œil à demi-fermé. Et des douleurs dans tout le corps, sans doute à cause de la dégringolade dans l’escalier. Le toubib a laissé une charge de médicaments, dont de la morphine, que Rafa dédaigne parce que ça lui donne l’impression de dormir debout -     alors, forcément, il douille, et ça ne le rend pas particulièrement gracieux.

Pas vraiment rassuré de laisser son second seul à la manoeuvre, Callahan a tenu à l’accompagner, la veille, pour sa traditionnelle tournée d’encaissement. Ça a permis de couper court aux questions et aux suppositions ; c’est que les gens auraient vite fait de faire le lien entre sa tronche et le bleu, plus modeste mais visible tout de même, sur la mâchoire de Finn, et de s’imaginer qu’ils se sont foutus sur la gueule. Une tentative de mutinerie de Rafa, violemment réprimée par le patron ? Les rumeurs pourraient aller bon train, si on n’y faisait pas attention. Ils se sont donc montrés dans le quartier, aussi complices qu’à l’accoutumée, pour décourager les racontars. Un bon moment, finalement, même si on rigole tout de même moins volontiers avec la gueule en compote. N’empêche, ça laisse à Rafa l’impression que Callahan veut aussi éviter de le laisser tout seul, comme s’il risquait soudain de se briser en morceaux. Depuis qu’il a trouvé son second aux trois quarts assommé sur son paillasson, Finn semble vouloir veiller sur lui, comme il pouvait le faire au début, à Los Angeles. C’est touchant, et aussi agaçant. Et surtout agaçant, d’ailleurs, lorsqu’il demande quinze fois s’il peut partir, si ça va aller, si Rafa est bien sûr que ça va aller, si…


-Je suis un grand garçon, vous savez, patron,
finit par répliquer O’Riordan avec un demi-sourire qu’il a tôt fait de regretter. Je saurai me débrouiller, promis. Et si un inconnu me propose des bonbons je dirai non. Feriez mieux de filer, vous allez être à la bourre.

Callahan lève la main pour une calotte, sans mettre sa menace à exécution, et se décide à filer. De son côté, Rafa a des projets pour la matinée : un gros petit déjeuner, d’abord, parce qu’il faut prendre les problèmes dans l’ordre, et puis il a du boulot en pagaille. Ses œufs au bacon expédiés, il est monté s’enfermer dans le bureau du patron, en stipulant bien qu’il ne fallait le déranger que pour les affaires d’une extrême gravité. On le sait soupe-au-lait, et encore plus depuis qu’il s’est fait casser le nez ; tout le monde a donc soigneusement évité d’aller toquer à sa porte, hormis un Liam silencieux venu recharger en café sur le coup de neuf heures. Il connaît son monde, Liam. Il entre sans frapper, pose la tasse pleine, rembarque la vide, fait l’inverse avec les cendriers, et repart sans que Rafa ait vraiment remarqué sa présence.

Un peu plus tard, quelqu’un vient frapper à la porte, et le second pousse un soupir ; Liam n’aurait pas pris cette peine, c’est donc quelqu’un d’autre, donc un emmerdeur, donc des emmerdements. Et effectivement, c’est Sean qui passe la tête dans l’entrebâillement de la porte et murmure :


-Eh, Rafa.
-Il est pas là,
grogne l’intéressé, mais Sean poursuit :
-Faudrait que tu descendes, tout de suite.
-Qui c’est qui est mort ?
-Pour le moment, personne, à ce que je sais. Mais la patronne est là en personne, alors j’en mettrais pas ma main au feu, tu vois.


Et voilà Sean reparti, tout aussi flegmatiquement qu’il est venu. C’est l’un des seuls, dans le clan, à ne pas s’en laisser conter par Rafa. Après tout, il l’a connu minot, il était dans le clan avant lui, et il lui a même appris une paire de petites astuces. Il fait partie de ces rares gars sur lesquels O’Riordan n’aboie jamais, d’ailleurs. Pour ça que Liam l’a envoyé, probablement.

-Putain…

Rafa s’étire, range ses papiers en prenant bien soin de les lester avec le cendrier, avant de sortir du bureau. Sean a raison : Eve au Cohan, en général, c’est mauvais signe. C’est encore plus radical que Mars en Saturne et le Verseau dans la douzième maison de la Vierge, c’est dire le barnum. Pas étonnant qu’il ait sa tête des mauvais jours - de toute façon, il l’a facilement, avec son plâtre - lorsqu’il rejoint la rousse dans la salle.

-Je te regarde pas comme ça, très chère, lance Rafa en guise de bonjour. J’me demande juste ce que tu vas m’annoncer comme calamité. Parce que t’as quand même un don pour ça, tu le sais, hein ? Viens, on va s’asseoir, j’aime autant pas rester debout si c’est pas indispensable. Sean, il te reste de tes putains de scones du feu de Dieu ? J’en reprendrais bien quelques-uns, s’te plaît. Les meilleurs scones de Londres, parole, je te les recommande, ajoute-t-il à l’intention d’Eve.
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Eve Talbot
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Message#Sujet: Re: Tu ne jugeras point - Rafa    Tu ne jugeras point - Rafa  Icon_minitimeMer 30 Mar - 17:06

❝Eve & Rafa ❞Tu ne jugeras pointDans le bar, on est nerveux. Les conversations se sont tues, les regards sont fuyants et on attend que Rafa descende. Eve, de son côté, se rend bien compte que quelque chose à changé, mais elle est trop absorbée par sa propre colère et l’humiliation qu’elle vient de subir que pour s’en soucier. Liam, qui sait comment agir dans ce genre de situation, ne dit pas grand chose. Il se contente de lui servir à boire tout en la surveillant du regard. Dans le fond, personne, à part les hommes de Montenza, n’a jamais eu à se plaindre de la jeune femme. Elle est discrète, taiseuse mais aimable. Pourtant, on la sait imprévisible et ils se murmurent qu’avec le patron, ils ne se sont pas trouvé pour rien.

Avec Finn, c’est quand il devient sérieux et calme que l’on sait qu’il faut s’inquiéter et que les choses vont déraper. Avec Eve, c’est l’inverse. Calme et mesurée, son agitation est le signe de sa détresse ou de celle à venir de celui qui a eu la mauvaise idée de la contrarier. Raison pour laquelle Sean, sans en faire trop, insiste tout de même auprès du second. La patronne est dans tous ses états et c’est assez rare pour qu’on le signale. Incapable de rester en place, elle fait les cent pas devant le comptoir, rejouant interminablement la scène de la pharmacie.

Jamais, depuis la guerre, elle n’a été humiliée de la sorte. Or, ici, ce n’est même pas un ennemi, mais bien l’apothicaire du quartier, normalement aux mains du clan Callahan qui est le coupable. Furieuse contre l’homme, elle est également furieuse contre elle-même. Elle aurait dû répliquer, être plus assertive ! Ca ne lui ressemble pas de ne pas savoir quoi dire comme ça. Il faut avouer que le sujet est tellement personnel et intime qu’elle aurait déjà bien du mal à en parler à un ami, alors à un inconnu …

Liam s’apprête à lui suggérer de s’asseoir, au risque de faire un trou dans le parquet, mais le pas de Rafa se fait entendre dans l’escalier. Il y a presque un soupir de soulagement. Lui, au moins, à l’autorité, comme les épaules, pour gérer ce genre de choses. On sait que les deux s’entendent comme cul et chemise, même si ce n’est pas visible. Tout le monde, quoique personne ne se soit risqué à faire un commentaire, a bien en tête l’épisode du Red Lion où le patron a dû aller les chercher dare dare.

L’accueil est à la hauteur de l'humeur et Eve n’en veut même pas à Rafa. A chaque fois qu’il y a une emmerde, c’est pour sa pomme et même elle n’est pas assez culottée que pour prétendre que celles-ci ne se multiplient pas de façon exponentielle quand ils sont ensembles. Pourtant, cette fois, elle y tient, ce n’est pas sa faute. Elle le suit à table, en protestant vivement.

- En temps normal, je ne dirais rien, mais je refuse de prendre le blâme sur ce coup là !

Elle est presque véhémente, mais prend tout de même la peine de remercier Sean pour les scones. Elle a faim et ceux-ci tombent à pic. Rien de tel qu’une douceur pour contrer l’aigreur qu’elle ressent en ce moment. Liam, voyant que l’ambiance n’est pas à l’alcool, amène du café tandis que les conversations reprennent doucement, mais tout en prêtant attention à ce qui se passe. Après tout, mafieux et commère n’a rien d’incompatible et dans le milieu, ils aiment bien savoir ce qui risque de leur tomber sur le râble.

- T’as vraiment une de ces gueules,
commente-t-elle

Pas adepte de la médecine sorcière pour un sous, elle trouve tout de même que Rafa abuse et qu’il aurait bien pu aller faire réparer son nez. Si elle ne les aime pas plus que lui, elle reste plus pragmatique. Il y a du bon à prendre, en particulier si on peut éviter d’avoir mal. Un bonus utile quand une partie du métier consiste à aller retourner des mandales et en recevoir. Néanmoins, Rafa est encore plus têtu qu’elle et voilà un moment qu’elle a renoncé à le faire changer d’avis. En attendant, elle n’arrive pas à rester assise, elle est trop énervée pour ça. Elle gagne du temps aussi. Maintenant qu’elle a son ami devant elle, Eve voudrait parler, mais les mots restent coincés au fond de sa gorge.

- Oui, c’est bon, je vais la cracher ma valda. Je sais. Passe une cigarette.

Elle se saisit de sa nicotine et en tire quelques bouffées, toujours debout, son pied tapant nerveusement contre le sol et commence de but en blanc.

- Est-ce que tu te rends compte qu’il m’a dit que j’étais une prostituée ?

Il y a une exclamation de surprise de la table à côté, un type pas assez attentif à sa conversation et trop à la leur. Sean, pas très loin, lui file un coup de coude discret et le type retourne soigneusement à sa bière. De toute façon, jusque-là, ce n’est pas très clair, mais Eve n’arrive pas à raconter les choses dans l’ordre. Elle continue de façon décousue.

- De toute façon, je lui ai dit que je ne voyais pas où était le problème. C’est un métier aussi honorable qu’un autre. Et là, il a commencé à me dire que j’entravais l'œuvre du Seigneur. Déjà, le Seigneur et moi, on aura deux mots à se dire sur son œuvre en général, mais en plus en quoi ça le regarde ? Il s’est reconverti en prêtre pour suppléer Moriarty pendant ses congés et personne ne m'a rien dit ?

Elle s’assied, tapotant sa cigarette contre le cendrier pour enlever le surplus de cendre et continue d’une voix tendue.

- J’ai insisté, après tout, ça le regarde pas que Finn et moi on ne veuille pas d’un mioche maintenant ! Mais non, il a continué sur sa lancée. Les femmes comme vous, ça devrait rester chez elle à éduquer les enfants pour qu’ils servent la patrie qu’il m’a dit. Qu’est-ce qu’il en sait de ce que c’est de servir la patrie ce con ?, crache-t-elle blessée dans son amour propre. Il n'a probablement jamais combattu de sa vie. Moi je crois que j’ai donné, merci, j’ai des comptes à rendre à personne et certainement à un pauvre type qui se permet de me juger.

Le ton de sa voix est brusquement monté, presque involontairement, tant elle est heurtée par les commentaires et les remarques de l’homme. Elle baisse les yeux un moment, se prenant la tête entre les mains.

- Je ne me suis jamais sentie aussi humiliée de ma vie Rafa. Jamais. Tu sais qu’il a refusé de me donner ce dont j’avais besoin ?, ajoute-t-elle trop pudique pour seulement prononcer le nom de l’objet à haute voix. Sa femme est arrivée après ça et elle lui a rappelé que j’avais fait une fausse couche il n’y a pas longtemps et qu’il valait peut-être mieux qu’il cède. Ne serait-ce que pour ma santé. Tu sais ce qu’il lui a répondu ? Que c’était probablement de ma faute et que de toute façon, sa conscience ne lui permettait pas d’interférer avec le dessein du Créateur.

A ce stade, elle n’est pas loin d’avoir les larmes aux yeux, plus de rage que de peine, mais le résultat est le même. Eve se sent impuissante, un sentiment qu’elle n’a pas l’habitude d’éprouver.

- Qu’est-ce que tu voulais que je fasse ? Que j’éclate sa tête sur le comptoir ? Là t’aurais pu dire que j’amenais les emmerdes, mais je ne suis pas chez moi alors j'ai du laisser couler, dit-elle en faisait référence au fait que le quartier leur appartient et que son propre statut en son sein est assez flou.

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Rafael O'Riordan
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Message#Sujet: Re: Tu ne jugeras point - Rafa    Tu ne jugeras point - Rafa  Icon_minitimeJeu 31 Mar - 11:29

Tu ne jugeras pointEve & Rafa

Et soudain, Rafael le sauveur apparut, et le peuple se frappa le poitrail, et on sacrifia des veaux gras, et on chanta les louanges de Dieu. Enfin, pas tout à fait, mais le soulagement presque tangible dans la salle du pub a quand même quelque chose de comique. C’est comme si on entendait, dans toutes les têtes, la même phrase : c’est bon, il va s’en occuper. Elle va peut-être pas cramer le quartier aujourd’hui. Sous son plâtre, Rafa a envie de se marrer en les voyant, tous ces grands courageux, suivre du regard sa descente vers la salle. Il ne le fait pas, parce que ça lui fait mal de rigoler, mais le coeur y est. Enfin, jusqu’à ce qu’il voie Eve ; de toute évidence, elle est dans tous ses états. Elle fait les cent pas, frénétiquement, devant le comptoir - une attitude qui ne lui ressemble pas : d’habitude, elle est plutôt posée, pas le genre à s’agiter pour rien. Dans l’esprit de Rafa, les hypothèses défilent pour tenter d’expliquer cette fébrilité, mais aucune vraiment convaincante. Eve et le patron filent le parfait amour - elle est même presque installée à demeure chez lui - et tout semble se passer à merveille, même en tenant compte de son activité professionnelle assez particulière. Ou est-ce que justement, sa couverture est menacée ? Mais j’y peux quoi, moi ? Rafa a l’habitude qu’on vienne le trouver pour tout et pour rien, mais là, c’est pas tellement de son ressort. Non, ça ne doit pas être ça.

Les deux jeunes gens s’assoient, à la table communément appelée “table du patron” au Cohan, et Liam leur apporte sans tarder du café ainsi qu’un grand plateau de scones dorés. Au commentaire sur sa sale gueule, Rafa réplique, rigolard :

-J’peux me tourner si ça doit te couper l’appétit, tu sais. Bon, alors, tu me la racontes, ton histoire ?

Il offre une cigarette, et va pour prendre un scone, mais la suite lui coupe les pattes. “Il m’a dit que j’étais une prostituée”, lance-t-elle sans préambule. Qui ça, il ? D’ordinaire, quand ils disent “il” comme ça sans préciser, c’est qu’ils parlent de Finn, mais… bordel, s’il se met à balancer des choses comme ça à sa petite Ivy, c’est qu’il va vraiment mal. Même Rafa, qui n’est pas le gentleman le plus accompli qu’on puisse rêver, sait que ce ne sont pas des choses à dire. Pas étonnant, du coup, qu’Eve soit aussi nerveuse. Ils ont dû s’engueuler sévère pour en venir à ça, et pourtant Callahan semblait parfaitement détendu ce matin. Quelque chose ne colle pas, surtout quand Eve poursuit en rapportant le discours cul-bénit qu’il lui aurait tenu. Rafa en reste abasourdi. Même fin bourré, Callahan n’a jamais eu la moindre velléité de se raccrocher à la religion. Pie XII, l’habitué des envolées mystiques, c’est O’Riordan, pas le patron. D’une voix étouffée, il demande confirmation :


-Sans déconner, il t’a vraiment dit ça ?

Mais Eve ne semble même pas l’entendre. Elle poursuit, vide son sac, et Rafa se rend soudain compte qu’elle ne parle pas du patron, puisqu’elle le mentionne dans ses propos. Mais qui, alors ? Quelle est la petite pute qui s’est permis de lui parler comme ça et de la blesser à ce point ? Si Rafa se contrefout de la quasi-totalité de l’humanité, il y a quelques personnes auxquelles il ne supporte pas qu’on touche. Pas beaucoup, bien entendu, mais il peut sortir l’artillerie lourde pour ces gens-là, et le patron est pareil. Le père de Florence peut en témoigner, et celui qui a humilié Eve risque aussi d’entendre parler du pays. Il devient de plus en plus évident qu’il s’agit d’un toubib, ou d’un pharmacien, qui a refusé de fournir à Eve de quoi éviter de tomber enceinte. Rafa comprend d’un coup qui c’est, avec un sursaut de rage. Monk. Cet enfoiré de Monk, le même qui avait réussi à faire pleurer Florence, et qui réédite avec Eve. La voir avec les larmes aux yeux est si rare que c’en est déstabilisant, et Rafa reste un instant interdit avant de faire quelque chose de tout aussi rare. Ils ont pris place, tous les deux, sur la banquette, dos au mur, pour embrasser toute la salle du regard ; il se pousse un peu vers Eve, passe son bras autour de son épaule pour venir murmurer à son oreille :

-Non, t’as bien réagi, fallait juste partir, c’est la meilleure chose à faire. T'as bien fait de venir me voir. C’est une merde, ce mec, Flo pourra t’en parler. Et quelques autres aussi. Ça fait plusieurs fois qu’on me parle de ce type. Ça le fait bander de voir des filles en galère, faut croire. Essaie d’oublier ça, d’accord ?

Il n’est définitivement pas à l’aise avec les démonstrations d’amitié, aussi, après une brève étreinte, se hâte-t-il de reprendre une position normale. Songeur, il s’empare d’un scone, le coupe en deux et le tartine consciencieusement de confiture avant de le poser devant Eve :

-Tiens, mange quelque chose, t’as l’air d’une qui va tourner de l'œil. Pour ce que tu cherchais, je vais demander à Florence où elle se fournit, y a des pharmaciens moins cons que le nôtre dans Londres. Quand je pense que vous aviez décidé d’être raisonnables et que ce connard-là trouve que c’est le moment de jouer au justicier de Dieu…

Il coupe le second scone avec violence, comme si le petit gâteau l’avait méchamment provoqué, et reprend, sans vraiment s’adresser à Eve :

-J’avais déjà envie de lui dire deux mots avant ça, mais là… va vraiment falloir que je lui rappelle qu’il y a déjà un curé dans le quartier, et un moins chiant que lui.

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Message#Sujet: Re: Tu ne jugeras point - Rafa    Tu ne jugeras point - Rafa  Icon_minitimeSam 2 Avr - 22:18

❝Eve & Rafa ❞Tu ne jugeras pointDans la salle, on se dit que les choses sont graves. Même la présence du Second, pourtant connu pour sa capacité à calmer les foules, n’arrive pas à avoir raison de la nervosité de la Patronne. On l’a rarement connue dans cet état et du coin de l'œil, on surveille toute l’affaire en faisant mine de s’occuper des siennes. C’est qu’il ne faudrait pas avoir l’air indiscret, mais tout de même la curiosité est mise. Liam, du bar, observe également la scène, attentif à ce qui se passe et surtout aux tensions qu’il faudrait désamorcer. Le tenancier est un habitué des situations tendues ; il en a vu plus qu’il ne peut s’en souvenir depuis que Callahan en a fait son QG et il a rarement recours à la force pour calmer celles-ci. Il suffit parfois de peu pour désamorcer une situation compliquée et il est expert pour intervenir au bon moment à coup de boisson chaude, cendrier changer ou simplement d’une petite blague.

Pour le moment, Eve a surtout besoin de vider son sac. Avec une pudeur toute anglaise, elle ne sait pas par quoi commencer, hésite, ne tient pas en place et il lui faut bien de la nicotine ainsi qu’un peu de café pour se mettre à tout déballer. Une fois qu’elle a commencé, la jeune femme est presque inarrêtable. Ne sachant pas par quoi commencer, c’est dans le désordre qu’elle explique à Rafa ce qui s’est passé sans même se rendre compte qu’il est persuadé - comme les autres autour d’eux - qu’elle parle de Finn. Quand il lui demande confirmation, elle appuie ses dires d’un :

- Evidemment ! Tu crois que j’exagère ? Il a dit pire ensuite.

La tension augmente et on s’inquiète. On sait le patron bleu de la jeune femme, et ce malgré son côté protestant un peu trop appuyé pour certains anciens sympathisants de l’IRA, impossible pour eux d’imaginer qu’il ait pu lui balancer de telles attrocités. Les filles de joie sont monnaies courantes au Cohan. Elles font partie du décor et avec Florence à leur tête, les gars ont appris qu’elles étaient à respecter autant que leurs mères alors le discours sur l'œuvre de Dieu ça ne parle pas des masses aux mafieux. Quand on travaille dans leur secteur, on ne se soucie pas des masses du Seigneur. Il y a Moriarty pour ça et tant qu’il travaille main dans la main avec le Patron, on s’estime un peu pardonner d’avance pour les péchés commis au cours de la journée.

Une fois son histoire racontée, elle se sent un peu mieux. Épuisée, mais avec un poids en moins sur l’estomac. Les larmes, quoique toujours présentes au coin des yeux, n’ont pas coulé et après une brève étreinte de la part de Rafa, elle tamponne discrètement ses yeux avec la serviette que Liam a discrètement apporter. Autour d’eux, on détourne pudiquement le regard, le laissant dans ce moment d’intimité et les conversations reprennent de plus belles, comme pour masquer le fait qu’on était attentif à la leur. Eve, comme O’Riordan, ne sont pas vraiment dupes, mais dans l’état où elle est, la jeune femme se fiche de savoir si on écoute sa conversation ou non.

- Oublier ?, répète-t-elle d’une voix blanche à la suggestion de Rafa. Non, non, je ne pense pas. Je n’étais pas en état de faire une esclandre, mais c’est hors de question que j’oublie quoique ce soit. Il savait très bien qui j’étais Rafa. Je ne dis pas que ça doit avoir un impact, je me fiche que les gens me saluent bien bas dans la rue parce que je suis avec Finn, moins on me reconnaît, mieux je me porte. Par contre, parce qu’il savait qui j’étais ça veut dire que ça, c’est quand il y met les formes. Imagine ce qu’il fait aux autres ? Et de toute façon, je n’ai quand même pas ce dont j’ai besoin. Ce n’est pas normal que les filles doivent subir ça et aller se fournir ailleurs parce que le praticien du coin est un sombre connard.

Les anglaises, féministes avant l’heure, se sont depuis des années battues pour leur droit, dont celui de voter. Un droit qu’elles ont obtenu, au grand plaisir d’Eve, bien avant leur consoeur au sein des autres pays d’Europe. Voir que l’on a pu tant avancer sur certains points en l’espace de cinquante ans et puis se retrouver face à des types odieux comme Monk, tout droit sorti d’un autre âge, est intolérable pour Eve.

Après un moment d’hésitation, Eve s’empare du scone qu’on a posé devant elle et mord dedans à pleine dent. Rafa a raison, elle a faim mais ne s’en était pas aperçue avant cet instant. Focalisée comme elle l’était sur le pharmacien, elle était incapable de penser à rien d’autre. D’un signe de main, elle indique à Liam qu’elle voudrait bien un autre café. C’est Florence, arrivée sans qu’Eve s’en aperçoive, apporte les boissons. Avec décontraction, elle s’assied en face d’eux, tournant le dos à la salle et tend la tasse à la jeune femme.

- Ca ne serait pas plus mal si tu avais le temps d’aller lui remettre les pendules à l’heure. Apparemment, ya pas que les filles qui ont des soucis avec lui. J’ai entendu des dames du quartier qui se plaignaient parce qu’il faisait le difficile quand il s’agissait de fournir des médicaments pour les plus jeunes pour soulager leurs douleurs quand elles passent à l’âge adulte. Quelque chose comme quoi ce genre de chose doit se faire dans la souffrance pour expier nos péchés. Il ne manque pas d’imagination quand il s’agit de nous compliquer la vie.

Se tournant vers Eve, elle lui dit sur le ton de la confidence :

- Enfin, peut-être pas tout de suite, il est assez amoché comme ça pour le moment. Il va finir par toutes les faire fuir. Tu sais ce qui lui est arrivé toi ? Il n’a rien voulu me dire.

Eve lui offre un sourire désolé. Oui, elle sait ce qui est arrivé, mais elle se gardera bien d’en parler si Rafa préfère ne rien dire. Ce n’est pas contre Florence ; contre toute attente, la jeune femme, d’abord un peu jalouse et méfiante, a fini par bien s’entendre avec son aîné, mais bien parce qu’elle ne veut pas trahir la confiance de Rafa. Consciente qu’elle n’aura pas plus d’informations, Florence se lève et les quitte pour vaquer à ses occupations. Eve boit une gorgée de café et se ressert un scone, le premier lui ayant clairement ouvert l’appétit.

- D’ailleurs, qu’est-ce qu’on fait pour lui ? Finn peut bien dire ce qu’il veut, hors de question qu’il s’en sorte comme ça.

Pour le moment, Eve n’est pas retournée du côté sorcier. Elle préfère faire profil bas parce que seul Merlin sait ce qu’elle ferait à Avery si elle venait à le croiser. Ça ne veut pas dire qu’elle oublie. Si Rafa a deux mots à dire à Monk, elle a des comptes à régler avec son voisin.


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Message#Sujet: Re: Tu ne jugeras point - Rafa    Tu ne jugeras point - Rafa  Icon_minitimeLun 4 Avr - 17:24

Tu ne jugeras pointEve & Rafa

Apparemment, d’autres que Rafa ont cru qu’il était question de Finn. A la table d’à côté, Sean tire une tronche qui donne au second un aperçu saisissant de ce que doit être sa propre expression. Leurs regards se croisent, un instant ; on n’y lit que l’incrédulité la plus totale, de part et d’autre. Loin de se formaliser de voir que le porte-flingue a manifestement écouté sa conversation, Rafa cherche auprès de lui quelque chose comme du soutien : toi non plus, tu piges pas ? Étrangement, voir Sean aussi perplexe que lui a un côté rassurant. Ce n’est pas lui qui déraille de la comprenette. Ça ne résout rien, mais c’est toujours plus agréable de savoir qu’on ne se fait pas des idées. Quelques autres types installés à proximité, presque tous des gars du clan, sont aussi inhabituellement silencieux, concentrés pour entendre ce qui se dit à la table du second. Rafa pourrait difficilement le leur reprocher ; après tout, s’il voulait parler tranquillement, il n’avait qu’à se replier dans le bureau. On ne peut pas empêcher les gars de tendre l’oreille ; ils sont, tout comme lui, en première ligne pour se fader les péripéties du couple Callahan-Talbot et leurs conséquences. Chacun a envie, et c’est humain, de savoir à quelle sauce il va être mangé. Alors entendre que le patron a balancé tout un tas d’horreurs à sa chère et tendre, l’insulte la plus modérée consistant à la traite de fille publique, ça en laisse plus d’un bouche bée.

Lorsque tout le monde comprend qu’il ne s’agit pas du patron, on entend presque un grand “ouf !” de soulagement parcourir la salle. Les visages se décrispent, on reprend son verre, et sa conversation. Les gars n’ont plus de raison de se montrer indiscrets ; de toute évidence, quelqu’un a manqué de respect à la patronne, un abruti qui risque de comprendre trop tard son erreur, mais aucun des hommes de Callahan n’a à craindre pour lui-même, et c’est tout ce qui les intéresse. La rumeur des conversations emplit à nouveau le bar, laissant un peu plus d’intimité à Eve et à Rafa.

Les paroles consolatrices, la bienveillance fraternelle, c’est pas sa tasse d’Irish coffee, à Rafa. Il est aussi mal à l’aise pour réconforter Eve qu’il le serait pour raconter ses propres déboires. Après sa tentative de câlin, il se tient un peu raide sur sa banquette, comme s’il venait de faire quelque chose de particulièrement osé. Et les mots qui lui viennent, bien entendu, ne sont pas les bons. Agacé de ne pas s’exprimer mieux, il reprend :


-C’est pas ce que je voulais dire. Je dis pas que tu dois oublier ce qu’il t’a dit, je  te dis juste de ne plus trop y penser maintenant. Tu ressasses et c’est pas bon. Essaie de te détendre, t’as l’air d’être sur le point d’exploser, pas étonnant que tout le monde était inquiet quand je suis descendu… On va s’en occuper, de ce citoyen.


Très naturellement, Florence vient apporter deux autres cafés, et s’invite dans la conversation. Rafa sait qu’elle aussi a essayé de se pointer chez Monk, pour la même raison qu’Eve, et qu’il a eu pour elle des mots encore plus malsonnants que ceux qu’il a servis à la patronne. Occupé à tartiner de confiture un nouveau scone, Rafael écoute avec attention les détails qu’elle vient verser au dossier déjà corsé du pharmacien. Monsieur, semble-t-il, a un problème avec les femmes. Et sa bigoterie lui donne des arguments particulièrement puants, du genre expier les péchés et compagnie. S’il fallait expier les péchés dans la douleur, songe O’Riordan, ils ne seraient pas sortis de l’auberge, le patron et lui. Mais non, ça ne concerne que les femmes. Eux, les mecs, ils ont une sorte d’immunité. Les péchés, ça a un vagin et deux nichons, dans l’esprit du pharmacien. Un instant, Rafa se dit qu’il faudrait tester les principes de l’apothicaire. Un vague sourire passe sur son visage tandis qu’il s’imagine aller confier à Monk qu’il a chopé une saleté avec une de ces filles pas fréquentables, juste pour voir si lui a le droit d’être soigné. Mais non, ça ne marchera pas. Même un demeuré comme Monk sait qu’il ne fait pas bon se mettre à dos le lieutenant de Callahan, même avec toutes les véroles du monde. Quelqu’un d’autre, peut-être ? Pas un gars du clan… Ouais, ça peut être marrant. Une expérience tout ce qu’il y a de plus scientifique, estime O’Riordan. Ils sont très portés sur la science, et sur les observations in vivo, le patron et lui. In vivo au moins au début, disons.

Tandis qu’il échafaude son protocole d’expérience, Florence, elle, essaie de tirer les vers du nez à Eve. Depuis qu’il est revenu avec son nez plâtré et ses hématomes, elle n’a eu de cesse de savoir ce qui était arrivé à Rafa. Elle a des attitudes presque maternelles avec lui, peut-être parce qu’elle l’a connu encore gamin, assez innocent pour n’avoir même pas un cran d’arrêt dans sa poche… Instinctivement, Rafa a préféré ne rien dévoiler de sa mésaventure dominicale à quiconque au Cohan, Florence incluse. Eve et Finn, ça suffit. Eux seuls peuvent vraiment comprendre ce qui s’est joué sur l’Allée des Embrumes. Heureusement, Eve n’est pas du genre à trahir un secret, et son silence décourage Florence. Elle se lève, rejetant en arrière ses cheveux roux, et s’éloigne en lançant à Rafa un regard qui signifie qu’elle ne lâche pas l’affaire.


-Infernale, commente O’Riordan à mi-voix. Elle finira par savoir, cette fouineuse.

Aucune trace de colère dans sa voix, pourtant ; il a pour Florence une tendresse assez rare chez lui, de sorte qu’il lui pardonne tout. Il la suit d’ailleurs du regard tandis qu’elle retourne au comptoir, et la question d’Eve le ramène assez rudement à la réalité.

-Comment ça, qu’est-ce qu'on fait pour lui ? Qu’est-ce que tu veux qu’on fasse ?
rétorque-t-il, redevenu sombre. Rien. On fait rien, point. On laisse pisser.

Pour qui connaît Rafa, teigneux, rancunier, la déclaration a de quoi surprendre. Pour qui connaît son passé, un peu moins.



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Message#Sujet: Re: Tu ne jugeras point - Rafa    Tu ne jugeras point - Rafa  Icon_minitimeJeu 7 Avr - 18:55

❝Eve & Rafa ❞Tu ne jugeras pointAu sein du Cohan, le soupir de soulagement est unanime. Papa et maman ne se sont pas disputés, la terre n’a pas dévié de son axe et le monde peut continuer à tourner aussi normalement que possible. Chacun reprend ses conversations et Monk, qui provoquait une certaine indifférence quelques minutes auparavant, devient l’objet de la pitié et du mépris collectif. Sans être une flèche - et tous les hommes de Callahan ne le sont pas - il faut tout de même être sacrément con pour insulter la patronne de la sorte et penser qu’on s'en tirera à bon compte. Un grand naïf, disent les uns ; un imbécile, disent les autres. Quoiqu’il en soit, le résultat est le même : Monk sera jugé, vilipendé et ce n’est pas le Seigneur qu’il aime tant invoquer qui viendra le sauver.

Qui fera partie du petit comité chargé de remettre les pendules à l’heure au pharmacien ? On spécule en dégustant tranquillement sa bière. Le patron et le second en seront ! De ça, tout le monde est déjà certain. Si on a vite compris que la patronne n’avait pas besoin de grand monde pour défendre son honneur, on sait que Finn comme O’Riordan ne laisseront pas passer ça pour autant. C’est une question de principe. Sur le territoire des Irlandais, il y a une loi et ce n’est pas celle du Roi, mais bien celle de Callahan. God may save the King but he won’t save his lige.

A côté, on remarque que la patronne est plus calme. En effet, si elle se sent toujours humiliée par son entretien avec le pharmacien, au moins se sent-elle soulagée d’avoir pu parler à un ami et déverser son ire. Rien n’est réglé pour autant, mais la jeune femme a une confiance aveugle en Rafa. S’il lui dit qu’ils s’en occupent, elle sait que les choses seront faites. Quoique elle n’aime pas déléguer, Eve sait que, en cette occasion, c’est pour un mieux. A la fois pour le pharmacien - quoique - mais également pour elle-même. Ce que Finn risque de lui faire ? Elle ne le sait pas exactement et préfère ne pas savoir. Ca lui évite de rentrer dans cette zone floue où il faut prendre en compte ce qui est bien et mal et remettre en question sa relation ainsi que le métier qu’elle exerce. Quand on a un poste comme le sien, on apprend vite à mettre de côté ce qui pourrait faire entrer en dissonance cognitive.

- Je te fais confiance.

Des mots qu’elle ne prononce pas souvent. Peu de personnes dans son entourage peuvent se targuer d’avoir sa confiance. Son affection, oui, sûrement, mais la confiance est une tout autre paire de manches. Aussi peu à l’aise que son ancien camarade dans les démonstrations d’affection, c’est à peu près tout ce qu’elle est disposée à dire qui va dans ce sens. Néanmoins, elle sait que le second est doué pour lire entre les lignes, comprenant certainement que ce ne sont pas des choses qu’elle dit à la légère.

Florence arrive à pique pour les délivrer de ce qui ressemble à un moment d’affection un peu embarrassant. Remettant de l’huile sur le feu, elle fournit de quoi gonfler le dossier du praticien qui n’avait déjà pas besoin de ça. Plus curieuse que sa cadette et bien plus franche, elle n’hésite pas à essayer de grappiller des informations sur l’état d’O’ Riordan. Si Eve ne lâche pas le morceau, elle doit bien admettre qu’il suscite la curiosité. D’ailleurs, Florence n’est pas la seule à qui aimerait savoir le fin mot de l’histoire, mais on suppute que pour avoir été amoché comme ça, c’est que le combat fut rude voir inégal tant on imagine pas un seul instant que le second ait pu perdre ou être humilié.

Florence partie, Eve se risque à aborder le sujet. Ça ne le mettra pas de bonne humeur, mais qu’importe, elle se sait de taille à affronter le caractère de cochon de l’irlandais. D’ailleurs, ça ne manque pas. Pendant qu’elle se ressert un troisième scone, il se renfrogne et lui annonce en tirant une tête de trois pieds de long qu’il n’y a rien à faire. Laisser pisser ? Hors de question. Si elle délègue volontiers la future remise à niveau du pharmacien, hors de question qu’elle fasse de même pour Hawthorn.

- Hors de question.

Elle croque une seconde fois dans son scone, la crème sortant par inadvertance et il lui faut quelques secondes pour récupérer un semblant de dignité. Une fois le gâteau avalé, elle boit une gorgée de café et reprend comme si de rien n’était.

- Je m’en fous de ce que Finn a dit, je ne le laisse pas s’en tirer comme ça. Il l’a fait une fois, ça veut dire qu’il peut recommencer et sur n’importe qui.

Liam, ne passant pas loin, s’arrête pour remettre un cendrier propre et débarrasser la tasse de café vide du second.

- Liam, une omelette, s’il te plaît et tu sais remettre du café ? Rafa, tu veux quelque chose ?

Sans surprise, il n’a pas l’air d’avoir d’appétit et il tire presque autant la gueule que quand elle est venue le tirer de force de chez lui après son bannissement. Peu impressionnée, elle continue comme si de rien n’était.

- Je ne dis pas qu’il faut attaquer de front comme si on était deux imbéciles de Gryffondor, mais honnêtement, on ne peut pas le laisser te marcher sur les pieds comme ça. Et puis, ce n’est pas parce que lui fait de la magie et toi pas qu’on sera en infériorité pour autant. Justement, ils ont beaucoup trop tendance à croire que ça les sauvera de tout.

Elle fouille dans sa poche à la recherche de son paquet de cigarette, mais sans succès. Finalement, elle se sert dans celui de Rafa qui se trouve sur la table et continue son argumentaire :

- De toute façon, qu’on soit clair. Soit j’y vais sans toi, soit j’y vais avec toi, mais ça serait dommage que tu manques l’occasion de prendre ta revanche.


Chatouille un peu l’ego et mettre des ultimatums, c’est l’étape numéro 1, mais le coup de grâce c’est le commentaire un peu vicieux qu’elle lâche l’air de rien :

- Et puis, s’il est capable de faire ça avec toi, ça veut dire qu’il est capable de faire avec n’importe qui. Peut-être avec elle aussi … C’est plus de la prévention que de la vengeance quand tu y penses.

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Message#Sujet: Re: Tu ne jugeras point - Rafa    Tu ne jugeras point - Rafa  Icon_minitimeVen 8 Avr - 11:15

Tu ne jugeras pointEve & Rafa

-Eh, c’est bon, me regarde pas comme ça, lance Rafa, une pointe de défi dans la voix, en voyant la tête d’Eve.

Son opinion est faite, et il n’en démordra pas. On laisse pisser, parfaitement. C’est, de son point de vue, la meilleure chose à faire, et c’est un phénomène assez rare pour intriguer. Rafa, d’ordinaire, est teigneux comme on n’a pas idée, et il a la rancune tenace. Il est donc assez curieux qu’il dévie à ce point de sa ligne de conduite habituelle pour Hawthorn Avery, dont il devrait être en train de mettre au point la mort lente et douloureuse au lieu de prêcher l’oubli. Serait-ce qu’il a peur ? Peut-être. Sans être un froussard, il est de ceux qui estiment qu’on n’est pas obligé de se faire du mal volontairement si on peut faire autrement. Mais ce n’est pas le plus important. Ce qui l’arrête vraiment, ce qui le bloque, ce sont les souvenirs qu’Avery a ravivés sans le savoir en utilisant la magie contre lui. Depuis ce dimanche matin, les images se bousculent dans la tête de Rafa, et elles vont du palier de l’Allée des Embrumes à Poudlard, du lac à cet escalier, dans un ballet étourdissant. Il ne peut rien sortir de bon de la confrontation avec les sorciers, la conclusion s’impose d’elle-même. Alors oui, on s’efforce de ne plus y penser, et on coupe les ponts définitivement, cette fois. Il faudra qu’il détruise sa baguette, tiens. L’idée lui semble évidente, d’un coup. C’est le dernier élément qui le relie encore à ce monde de fous - car le fait qu’il pense à Robin vingt fois par jour, bien entendu, ne compte pas.

Eve, il fallait s’en douter, ne l’entend pas de cette oreille. Elle a bien trouvé sa place au sein du clan, celle-ci, aussi batailleuse que Callahan et son second réunis. Rafa refuse d’un signe de se joindre à la commande qu’elle passe à Liam, préférant se concentrer sur les scones ; tout en préparant ce qui doit être son cinq ou sixième, il lâche :


-Qu’il recommence, je m’en fous bien, moi, tu sais. Chacun sa merde.


Il ne s’est jamais préoccupé du sort de ses contemporains, à l’exception d’une poignée d’entre eux, et cette poignée a peu de risques de tomber entre les pattes d’Avery. Alors pourquoi s’inquiéter ? Ce connard peut attaquer qui il veut, Rafa s’en tamponne le coquillard avec un tibia de langouste.

Mais pas Eve. Dans un murmure, elle déroule son argumentaire. On ne fait plus guère attention à leur conversation, dans le pub ; personne ne tend l’oreille pour saisir un mot ou un autre, ce qui évite à ces braves gens d’entendre parler de sorcellerie. Piqué au vif, Rafa réplique en effet :


-Tu crois que j’ai peur ? Je m’en fous, de son bout de bois. Il m’en faut un peu plus que ça pour me déballonner, tiens !


Il croque dans son scone, sans se rendre compte qu’il a mordu à l’hameçon comme un bleu. Tout en mâchant, il repense à l’absurdité qu’il y aurait à croire qu’Avery peut lui foutre la trouille. J’en ai vu d’autres, moi madame ! C’est pas un loser avec un bâton qui va me la faire à l’envers. Et si j’ai décidé de ne pas prendre ma revanche, ça n’a rien à voir.

À travers la fumée de sa cigarette, Eve continue son travail de sape, méthodiquement. Elle annonce que de toute façon, elle ira demander des comptes à son sauvage de voisin. Et puis vient le coup de grâce, les quelques mots qui laissent Rafa pétrifié, la main arrêtée à mi-chemin entre la table et sa bouche.


-Oh putain… souffle-t-il dans un murmure à peine audible.

Comment a-t-il pu ne pas y penser ? Comment a-t-il pu dire qu’Avery pouvait bien attaquer qui il voulait et qu’il s’en foutait ? Une sorte de vague le submerge, et c’est de la haine pure, l’envie de voir couler le sang de ce type. Est-ce qu’il a déjà brutalisé Robin ? Est-ce qu’il pourrait utiliser contre elle le même sort que lui-même a encaissé sur le palier ? S’il essaie d’être honnête, il doit reconnaître qu’Avery a l’air de tenir à elle, et il ne voit pas comment quelqu’un, n’importe qui, même un fondu comme lui, pourrait vouloir faire du mal à Robin. Robin, quoi ! Si douce, si gentille, si pétillante… Même une bête sauvage ne pourrait pas s’en prendre à elle. Mais n’empêche. Si cela devait arriver, Rafa sait qu’il ne pourrait pas se pardonner de n’avoir rien fait. Retrouvant enfin l’usage de la parole, il tourne vers Eve un visage grave :


-Non, t’as raison, il peut pas s’en tirer comme ça.


Retourné comme une crêpe, le Rafa, comme il le reprochait voici quelques jours au patron - et presque sans s’en rendre compte. Le voilà qui redevient le va-t-en-guerre qu’il a toujours été, croquant férocement dans son scone et lançant entre deux bouchées :


-C’est vrai, faut faire quelque chose. Faut qu’on prépare ça, pas aller foncer dans la mêlée comme deux cons. Tu vois ça comment, toi ?


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Message#Sujet: Re: Tu ne jugeras point - Rafa    Tu ne jugeras point - Rafa  Icon_minitimeLun 11 Avr - 21:13

❝Eve & Rafa ❞Tu ne jugeras pointQuand tu arrêteras de dire des conneries plus grosses que celles de Finn, on y pensera.

Le ton de la jeune femme est sans appel tandis qu’elle écrase sa cigarette dans le cendrier en face d’elle et rallume une autre. Eve n’a jamais été du genre à faire des ronds de jambe ou à retenir ses mots avec ses profs. Rafa est pareil, d’une honnêteté brutale et désagréable aussi ne peut-il pas se plaindre de voir ses propres méthodes retournées contre lui. Nul doute qu’il est plus plaisant d’être celui qui engueule que celui qui reçoit les réprimandes. Pour une fois, les rôles s’inversent et elle n’y prend aucun plaisir. Comment le pourrait-elle ? Voir Rafa comme ça n’a rien de réjouissant. Elle le connaît cagnard, combatif, teigneux, mais pas défaitiste et morose. Ce n’est pas son genre de se coucher avant même d’avoir essayer de se venger.

Par discrétion, elle s’interrompt, le temps que Liam prenne sa commande et reparte avec les cadavres qu’ils ont laissés sur la table. Pendant ce bref moment, elle essaie de comprendre comment son ami en est venu à baisser les bras aussi facilement, mais rien n’y fait. Il faut dire que si elle n’a jamais aimé le monde sorcier, elle n’a pas le même passif que lui avec Poudlard. Discrète, studieuse, elle a peu souffert de la discrimination correspondant à son statut de sang. Elle ne s’est simplement jamais sentie à l’aise dans ce monde caché qui préfère vivre replié sur lui-même plutôt que de partager les dons qu’il possède.

Les craintes de Finn ? La jeune femme les balaient d’un revers de main. Des gens dangereux ? Il y en a des deux côtés et pour le moment, elle estime que les moldus ont la palme de l’horreur. Voldemort n’est qu’un cinglé de plus et ses fanatiques avec lui. L’important, c’est le fait de pouvoir les arrêter maintenant et si son voisin en fait partie, raison de plus pour le mettre hors d’état de nuire. Evidemment, Rafa ne l’entend pas de cette oreille. Contrairement à elle, la sécurité de quiconque en dehors de Kilburn n’est pas ses oignons. C’est de bonne guerre sachant qu’il vit, comme les autres, en marge de la société et de ses règles, mais ce n’est pas le cas d’Eve et si ce n’est pas la compassion et le bien commun qui lui fera entendre raison, elle trouvera bien d’autres arguments.

- Ce n’est pas moi qui dit que tu as peur, mais honnêtement, je ne vois pas pour quelles autres raisons tu te débines. Ce serait un moldu, il aurait déjà la gueule dans le caniveau avec une jambe et un bras cassé pour lui apprendre la politesse.

L’ego est touché, elle le voit bien, mais ce n’est pas assez. Etonnant. O’Riordan, quoique plus modéré que son patron, n’a tout de même pas fini second du clan Callahan pour ses qualités d’enfant de cœur. C' est le genre juste. Fanatiquement juste. Ceux qui rendent la monnaie de leur pièce aux autres. Parfois avec les intérêts, c’est selon l’humeur. Aujourd’hui, rien à faire, il râle, proteste qu’il n’a pas peur, mais ne bouge pas pour autant, se rangeant à l’avis de Finn.

C’est mal connaître Eve et il ne lui faut pas longtemps pour présenter sa dernière carte. Un peu vicieuse, même elle doit le reconnaître, mais diablement efficace. Il ne faut que quelques secondes pour que l’expression du second change et soudainement, plus rien n’a d’importance que d’apprendre à Avery qu’on ne rigole pas avec eux. Elle doit presque retenir un sourire, mais décide de ne pas trop fanfaronner face à lui. Eve a obtenu le résultat qu’elle espérait et c’est tout ce qui compte.

- Je me disais bien que tu serais d’accord avec m
oi.

Liam arrive sur ces entrefaits, la commande d’Eve dans les mains et pose une omelette fumante en face d’elle. Voyant que la discussion est sérieuse, il les laisse entre eux. A peine Liam est-il parti que la jeune femme attaque sa nourriture avec une voracité qui lui ressemble peu. Elle hausse les épaules en voyant la tête de Rafe et se contente d’un :

- Désolé, mais j’ai faim.


Elle ne fait qu’une bouchée de sa nourriture et une gorgée de café plus tard, elle est accoudée sur la table, songeuse :

- Hmm, je ne sais pas encore. On ne peut pas faire ça sur un coup de tête. Ça doit être bien préparé. Il faut qu’on profite de l’effet de surprise, là il doit s’attendre à ce que tu revienne, mais si on attend un peu, il se dira que tu as eu peur et là on pourra le prendre par surprise.

Elle tend sa main sur le paquet de cigarette. Vide. Elle grogne et repousse le paquet sur la table avant de continuer :

- Je pense qu’il faut qu’il soit incapable de nous reconnaître. Moi en tout cas. Je ne peux pas griller ma couverture maintenant. Ça serait trop dangereux. Mais les gens comme lui ont des ennemis, beaucoup, ça ne serait pas plus mal s’il ne savait pas de qui ça vient.

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Message#Sujet: Re: Tu ne jugeras point - Rafa    Tu ne jugeras point - Rafa  Icon_minitimeJeu 14 Avr - 15:52

Tu ne jugeras pointEve & Rafa

Et c’est ainsi, sans un bruit, sans une plainte, que périt une pile de scones pourtant imposante, sous les assauts conjugués de deux morfales. Rafa peut revendiquer le meurtre de huit petits gâteaux, lui semble-t-il, ce qui laisse à Eve un score à peu près équivalent et d’autant plus impressionnant que d’ordinaire, les dames bâfrent quand même moins que les bonshommes. Rafa, tout préoccupé qu’il soit, le remarque d’ailleurs dans un coin de son esprit. Que lui bouffe comme un chancre, c’est un fait notoire, rien de bien surprenant ; le patron dit en se marrant que comme Shane, il n’a jamais oublié ses jours de disette, à L.A. Mais Eve ? Elle ne les a pas habitués à de telles fringales. Bon, c’est peut-être juste le contrecoup de sa visite chez Monk ; elle a besoin de sucre pour se réconforter, et les scones de Liam sont si bons… Et puis après tout, chacun fait bien ce qu’il veut, Rafa a d’autres soucis pour le moment. Un autre souci, plus exactement : Hawthorn Avery, la menace qu’il fait peser sur Robin et l’impérieuse nécessité de lui faire bouffer ses dents.

Peut-être faudrait-il l’avertir, se dit-il, les yeux baissés sur sa tasse de café, avant de se raviser dans la seconde. De quoi aurait-il l’air à lui écrire pour lui dire de se méfier d’Avery, après avoir laissé sa lettre sans réponse ? D’un connard, et c’est déjà le cas. Mauvaise idée, donc. Mais peut-il la laisser dans l’ignorance, alors que de toute évidence, elle est en couple avec ce type ? L’idée qu’il pourrait lui faire du mal s’est imposée dans l’esprit de Rafa, lancinante. Il l’imagine presque, victime du même sort que lui, et, la haine aidant, il voit le visage d’Avery, déformé par la joie mauvaise… Il doit faire un effort pour chasser ces images et revenir à la réalité. Le passage de Liam, chargé d’une imposante omelette et de deux nouveaux cafés, arrive à point pour le distraire. Par réflexe, Cohan a apporté une assiette et un couvert pour Rafa, mais il n’a plus assez faim pour toucher à l’omelette et repousse le tout sur le côté de la table. De toute façon, Eve engloutit le plat avec un entrain assez démentiel, tout en exposant ses plans de vengeance. Songeur, Rafa réfléchit à haute voix :

-Ouais, c’est vrai, ça. Faut pas qu’il te reconnaisse. Et s’il me reconnaît pas non plus, c’est encore mieux. Mais comment on peut faire ? Je sais qu’il existe une potion pour changer d’apparence, mais on n’a aucune chance de la préparer, même si on n’était pas les plus tartes à l’école.

C’est vrai : le binôme Talbot-O’Riordan, à Poudlard, s’en sortait assez honorablement, en potions. Suffisamment pour que Rafa obtienne un ASPIC dans la discipline, avec un A, grâce à ses souvenirs de cours. La moitié de ses ASPIC, en somme, l’autre, en Divination (Effort Exceptionnel !) ayant couronné ses talents pour le baratin. Mais ce n’est pas le sujet. L’idée de la potion toujours en tête, il demande à Eve :

-Tu crois que ça peut s’acheter discrètement ? On pourrait prendre l’aspect d’un peu n’importe qui. De Monk, tiens, par exemple. Et on lui fout la misère, à ce connard, pour lui faire passer l’envie de faire de la magie noire…

Ça semble parfait, comme plan. On n’est pas sur un truc bâclé, trop optimiste, pas du tout un plan foireux, finalement. Le patron trouverait sûrement à redire, mais après tout, rabat-joie est son deuxième prénom, Eve et Rafa sont d’accord pour le dire.

-Bouge pas, j’vais voir si Liam a un paquet de clopes à m’avancer, marmonne Rafa en se levant.

Le patron du pub a toujours un petit stock de cigarettes pour les moments de pénurie, et O’Riordan récupère un paquet de Camel tout neuf. Au passage, il demande à Cohan :


-Eh, Liam. Combien d’oeufs, l’omelette ?
-Quatre,
répond l’autre, hésitant entre le rire et l’incrédulité.

Parce qu’il a surveillé, de loin, et il a vu qu’Eve avait tout mangé. Rafa lui adresse un regard stupéfait, le remercie pour les clopes, et retourne s’asseoir tout en ouvrant le paquet qu'il dépose devant la jeune femme.


-Tiens, sers-toi. Bon, le truc c’est que moi, je suis censé partir à Los Angeles mardi prochain. Je sais pas pour combien de temps j’en ai là-bas. Alors de deux choses l’une, soit on arrive à monter ça rapido, soit on attend que je revienne. J’espère que ça prendra pas plus de dix jours, le petit tour à L.A., et même moins ce serait mieux. T’en penses quoi ? C’est peut-être mieux qu’on attende que j’aie réglé cette histoire, non ? Et comme ça ça me laisse le temps d’être moins amoché, ce sera pas du luxe.


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Message#Sujet: Re: Tu ne jugeras point - Rafa    Tu ne jugeras point - Rafa  Icon_minitimeJeu 14 Avr - 23:37

❝Eve & Rafa ❞Tu ne jugeras pointDésormais, Liam ne pourra plus dire que Eve ne fait pas honneur à sa cuisine. Plutôt moineau qu’ours quand il s’agit de se nourrir, la jeune femme à tendance à picorer ses plats, dédaignant même la cuisine de Santina qui ne manque jamais de se lamenter devant Finn qu’elle devrait se remplumer en particulier après ce qu’elle a vécu. Qu’importe que l’évènement remonte désormais à quelques mois et qu’Eve ne soit pas une grosse mangeuse. Il y a des gens pour qui la nourriture est tout et qui se définissent par leurs habitudes alimentaires si bien que la jeune se contente désormais de hocher la tête sans tenter d’argumenter. Aujourd’hui est donc une exception à la règle puisqu’elle a même réussi à dépasser Rafa qui n’est pourtant pas timide lorsqu’il s’agit de planter sa fourchette.

Si ses compères ne manquent pas de s’étonner de sa voracité, Eve n’y voit rien d’inhabituel. Elle n’a pas mangé ce matin et s'énerver donne faim. Or, Monk n’a pas raté son coup, elle est furieuse. Si sa fureur est redescendue, c’est bien parce que Rafa lui a juré qu’il s’en occuperait et qu’elle a d’autres chats à fouetter. S’il s’occupe du pharmacien, il n’est que justice qu’elle l’aide à s’occuper de son hypothétique mangemort de voisin.

Outrepasser les scrupules du Second ne prend pas bien longtemps et une fois qu’elle a trouvé le bon angle d’attaque, il est aussi enthousiaste qu’elle - si pas plus - quand il s’agit de remettre les idées en place à cet imbécile d’Avery. Maintenant qu’ils sont d’accord sur le principe, il ne reste plus qu’à trouver la marche à suivre. Ils sont tous les deux d’accord, il ne faut pas agir dans la précipitation. Ce qu’il leur faut, c’est LA bonne idée et l’irlandais ne tarde pas à la trouver.

- Du Polynectar tu veux dire ?

Eve, bien plus intégrée que lui dans le monde sorcier voit directement ce dont il veut parler et elle trouve l’idée excellente.

- Hmm, on peut la trouver chez quelques apothicaires, mais je sais qu’ils gardent une trace de qui en achète sur le Ministère. Le mieux serait de se tourner vers le Marché Noir. On est moins regardant sur l’Allée des Embrumes.

Ça tombe bien, elle y a des contact et c’est exactement pour ça qu’elle vit là.

- Je connais une fille qui est un peu touche à tout. En général elle peut tout avoir et elle ne pose pas de questions si c’est bien payé. Je pense pouvoir trouver ça chez elle.

Elle pense directement à Agrippine. Les deux femmes se connaissent vaguement. Elles ont parfois fréquenté les mêmes hommes, même si pas pour les mêmes raisons. Si chacune se garde bien de se mêler de ce que fait l’autre, Eve sait tout de même qu’elle trouvera probablement la discrétion et le matériel qu’il lui faut moyennant quelques gallions brillants.

-C’est une bonne idée, mais pas Monk. On ne sait jamais, je ne veux pas qu’on puisse remonter jusqu’à nous d’une manière ou d’une autre. Il faut des anonymes. Des gars transparents. Ce sera peut-être le plus dur à trouver.


Un peu paranoïaque ? Oui, probablement. Néanmoins, elle estime qu'on n'est jamais trop prudent. Dans sa branche, on ne survit pas sans être attentif à ce genre de détail. Rafa, de son côté, même si prudent, à l’habitude d’avoir un clan entier pour surveiller ses arrières. Une fois dans l’Allée des Embrumes, ils seront seuls et ne pourront compter que sur eux-mêmes. Il faudra aller vite et être efficace.

- C’est dommage que tu ne transplanes pas, commente-t-elle. Le meilleur scénario, ça serait de prendre du Polynectar, le chopper et transplaner directement chez nous. On pourrait le passer à tabac et le laisser quelque part sans trop de difficulté puis transplaner avant qu’il ait le temps de nous voir et que l’effet de la potion ne s’estompe. On n’aura qu’une heure. Pas plus.

Elle tapote sur la table songeuse et poursuit sa réflexion :

- Ou alors, on le choppe, je transplane avec lui, tu me rejoins et quand on s’en est débarrassé, je transplane avec toi.

Aucun des deux plans ne lui plaît entièrement. Hawthorn, s’il n’est pas grand, est imposant physiquement. Même s’ils arrivent à s’emparer de sa baguette, rien ne dit qu’elle puisse le maîtriser physiquement sans risque. En particulier s’il fait partie des mangemorts. Son agression contre Rafa (puisque évidemment le Second n’y est - en toute mauvaise foi - pour rien) prouve qu’il est loin d’être le voisin tranquille qu’elle pensait avoir.

- Il faudra y réfléchir, tranche-t-elle alors qu’il revient avec le paquet de cigarette.

Elle en sort une du paquet et l’allume. Deux bouffées plus tard, elle est toujours en train de réfléchir à ce que Rafa lui dit. C’est vrai qu’il y a L.A. et ce gosse à récupérer. Un point de tension entre Finn et elle puisque à défaut d’être totalement heureux par la solution proposée, ils ont chacun dû faire des concessions. Eve, de son côté, plaidait pour la solution jugée la moins humaine. Elle-même doit le reconnaître, mais c’est pour elle un mal nécessaire. Garder l’enfant en vie est un risque qui doit être très bien calculé et si Finn peut être implacable, elle sait également qu’il peut vite être ému lorsqu’il s’agit de sa famille. Recommencer comme avec Ludovico ? Non merci.

- Hmm, hmm, t’as raison. Une dizaine de jours, c’est très bien. C’est même mieux. Ça lui donnera l’impression que tu as laissé tomber. Il va finir par baisser sa garde. C’est inévitable. Et puis, s’il a un peu d’ego, il se dira qu’il t’a fait peur et il sera fier de lui. Ça fait faire des erreurs la fierté.

Elle se tait juste pour laisser le temps à Liam de débarrasser. Après tout, il ne faudrait pas que Finn se doute de quoique ce soit. Il n’encourageait pas leur entreprise, or Eve est déterminée à ce qu’ils prennent leur revanche.

Par contre, pour cette histoire de L.A., je pense que je vais venir avec toi. On a parlé avec Finn, on s’est mis d’accord sur ce que ce gamin devait devenir, mais moi je veux vérifier que je n’apporte pas une pomme pourrie à mon oncle. Ce n’est pas que je ne te fais pas confiance, prévient elle. C’est juste que c’est le genre de chose que je dois faire moi-même.

Elle affiche un sourire amusé.

- Je sais, ça ne t’arrange probablement pas, mais ce n’est pas vraiment négociable. Et puis, soit content, ça m’évitera de croiser mon voisin. C’est toi qui me disait de déménager, non ?

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Message#Sujet: Re: Tu ne jugeras point - Rafa    Tu ne jugeras point - Rafa  Icon_minitimeLun 25 Avr - 20:12

Tu ne jugeras pointEve & Rafa

-Ouais, voilà, du Polynectar.

Dans un effort de concentration, Rafa essaie de rappeler ses souvenirs d’école au sujet de la fameuse potion. C’est que ça remonte à presque dix ans, ces conneries. Les yeux plissés, il se remémore le vieux cachot, les rangées de chaudrons et les volutes de fumée colorée. Parce que c’est forcément à Poudlard qu’il en a entendu parler ; par la suite, il a eu tout un tas d’autres trucs à assimiler, mais rien de très magique, sauf à considérer comme de la magie sa facilité à tricher au poker. D’habitude, il évite de penser à sa scolarité à Poudlard ; et cela lui donne un peu l’impression qu’il essaie de se souvenir des détails d’un vieux livre, pas de sa propre vie. Tout doucement, cependant, des éléments lui reviennent. La voix du professeur Slughorn précisant devant ses élèves intrigués : “Et un petit morceau de la personne dont on souhaite prendre l’apparence, sans quoi notre précieuse mixture ne fonctionnera pas !”

-Faudra essayer de récupérer des cheveux, marmonne Rafa à mi-voix, sans vraiment s’adresser à Eve. Ça devrait pas poser de problème. Tout le monde a toujours des tifs sur son manteau. Tu bouscules quelqu’un dans le métro, oh pardon quelle maladresse je suis désolé, mais je vous en prie, et comment donc, et permettez que je vous remette votre col d’aplomb, mais vous êtes bien urbain, et voilà. Les Anglais passent leur vie à s’excuser, autant que ça serve, pas vrai ?

Sinon, songe-t-il, il y a l’option de se rendre chez un coiffeur et de s’arranger pour piquer quelques cheveux sur place ; ce ne sont pas les possibilités qui manquent, finalement.

-C’est parfait si tu connais déjà quelqu’un qui pourrait nous en procurer, poursuit le second avec assurance. Ça doit être le genre de nana qui ne pose pas trop de questions, c’est pile ce qu’il nous faut. Il te faudra du fric, j’te laisse estimer combien mais c’est moi qui régale.

La suite le réjouit moins ; aucun des deux plans énoncés par Eve ne lui convient, et il grommelle :

-Tu vas pas t’y mettre aussi, hein. Je sais que c’est dommage, mais va falloir faire avec. Mais tes histoires de te rejoindre, ça me plaît pas. Ça fait une perte de temps pas possible. T’imagines ? Si tu l’embarques ne serait-ce que du côté des docks, il me faut bien une demi-heure pour te rejoindre, et sans traîner en chemin. Faut qu’on lui fasse sa fête sur place, et ensuite tu transplanes avec moi.

Dommage, car l’idée d’abandonner Avery en plein pays moldu était particulièrement séduisante. Rafa ne la perd pas totalement de vue, d’ailleurs. Il doit bien y avoir un moyen pour expédier le monsieur en plein Piccadilly, non ? Ce serait tellement plus drôle de l’imaginer coincé au milieu des Moldus, sans sa baguette bien évidemment, pour lui apprendre à être un peu plus accueillant… Tirant à son tour une cigarette du paquet, Rafa fume quelques instants en silence, réfléchissant à tout cela. Eve semble en faire autant, et ce n’est qu’après une assez longue pause qu’elle tire son comparse de sa rêverie en validant l’idée de s’occuper d’Avery après Los Angeles. Avec un sourire carnassier, O’Riordan lance :

-Ouais, on va prendre l’apparence d’un couple de vieux, il sera moins fier de lui une fois qu’on lui aura foutu sa misère.

La perspective le réjouit, et il vide d’une traite son café. Foutre à Avery la rouste de sa vie, c’est bien, mais si on peut l’humilier méchamment en prime, ce n’est que mieux. Ça vaut bien le coup d’attendre quelques jours, si c’est pour mieux le cueillir ensuite. Dans l’ordre, Monk, Los Angeles, Avery, récapitule Rafa pour lui-même. Allez donc dire que la vie de voyou est une sinécure, tiens ! Il bosse davantage, estime-t-il, que s’il faisait les trois huit à l’usine. Dire que son idéal, à lui, c’était de glander, de prendre un maximum de fric en faisant le minimum… Il l’avait dit, sans ambages, à Callahan, assez vite après leur rencontre. Si j’avais voulu faire le prolo, j’avais pas besoin de traverser l’océan, pas vrai ? Et le voilà à tenir des cadences infernales, à devoir monter des expéditions punitives à la chaîne, songe-t-il, rigolard. Le patron aurait bien une calotte en réserve s’il venait se plaindre de devoir castagner trop d’insolents, et il aurait raison. Avoue que tu te marres quand même un peu plus qu’à l’usine, branleur. Eve interrompt ces pensées plutôt poilantes en lui annonçant une nouvelle qui l’est nettement moins. Stupéfait, il retombe directement sur terre :

-Comment ça, venir avec moi ? Tu rigoles, j’espère ?

Mais elle ne rigole pas, alors il embraye, la mine grave :

-Attends, j’aimerais bien avoir quelques précisions. À quoi tu vas voir que c’est une pomme pourrie, comme tu dis ? Et si c’en est une, on fait quoi ? C’est un môme, Eve. Je t’annonce tout de suite que moi, je m’en prends pas aux mômes, même ceux de mes ennemis.

Mieux vaut prévenir que guérir ; Eve était partisane d’éliminer la menace, et pour Rafa, il n’en est pas question. Trop sentimental, comme le patron, probablement. Ils n’ont pas la froide logique de l’espionne, capable de faire passer principes et sentiments au second plan, et Rafa se doute bien que ça risque de coincer à un moment ou à un autre.

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Message#Sujet: Re: Tu ne jugeras point - Rafa    Tu ne jugeras point - Rafa  Icon_minitimeDim 1 Mai - 23:16

❝Eve & Rafa ❞Tu ne jugeras pointLa magie, c’est comme le vélo, ça ne s’oublie pas. De toute évidence, celui qui a dit ça n’a jamais fait de vélo ou simplement jamais fait de potion. S’il est vrai que la magie ne s’oublie pas facilement - les sorts les plus simples et les plus basiques restant gravés en mémoire comme des automatismes - c’est loin d’être le cas des potions elle-même. D’ailleurs, bon nombre de bons sorciers sont des potionnistes exécrables. Discipline exigeante qui ne tolère pas la demi-mesure ni l’absence de précision, elle n’est pas faite pour tous. En témoigne le nombre d’élèves qui arrêtent le cours de potion une fois leur B.U.S.E.S. en poche. Si la matière n’est pas obligatoire pour la carrière que l’on envisage, on préféra prendre une matière moins contraignante pour les deux années restantes.

Ce n’est pas ce qu’à fait Eve, naïvement, elle envisageait encore une carrière en médecine, persuadée que les médecins moldus comme sorcier avaient plus à gagner en partageant leurs connaissances que l’inverse. Néanmoins, cet espoir est vite passé aux oubliettes et si elle sait encore fabriquer certains onguents et potions de premiers soins, elle serait incapable de se souvenir comment faire du Polynectar. Elle ne doute pas que ça soit pareil pour Rafa, à peine plus au courant d’elle du processus.

- Des cheveux ou autre chose ?, demande-t-elle en essayant vainement de se souvenir de la marche à suivre.

Si ce ne sont que des cheveux, son compagnon a raison. Ça ne devrait pas être bien dur. Les Anglais sont bien trop polis pour leur propre bien et après tout ce qu’ils ne savent pas ne peut pas leur faire de mal. Loin de s’embarrasser de scrupules, la jeune femme ne voit que des solutions et ce qui était un problème quelques minutes auparavant ne l’est déjà plus. Satisfaite, elle acquiesce quand Rafa lui propose de payer et passe au problème suivant : le transport.

- Tu avoueras que de toutes les compétences sorcières que tu pouvais laisser tomber, t’as choisi la seule vraiment utile en toutes circonstances. Je ne vais pas t’en parler pendant trois heures, je ne suis pas ta mère, mais imagine, Finn et toi êtes coincés quelque part, vous pouvez transplaner. Qui va en parler ? Une bande de type louche que Scotland Yard adorerait avoir une raison de coincer ?


Elle n’insiste pas plus. Elle connaît le second. Il peut être têtu et quand il s’agit du monde sorcier, il l’est encore plus qu’elle. Néanmoins, il lui semble que son argument a de quoi faire mouche et c’est peut-être le seul qui pourrait décider - en cet instant - Rafa a faire quelque chose. Eve sait que sous ses airs parfois nonchalants, il tient à Finn autant qu’elle et ne se pardonnerait jamais de l’avoir vu blesser ou mourir alors qu’il y avait la possibilité de changer la donne. Consciente que c’est un travail sur le long terme, la jeune femme laisse la discussion s’orienter sur l’apparence qu’ils prendront et la façon dont ils procéderont. Ils ont encore le temps et Rafa a raison, il y a LA avant. L’occasion de lui annoncer qu’il n’ira pas seul. Un fait qui n’a pas l’air de l’enchanter plus que ça. Eve ne le prend pas mal. Après tout, elle ne fait pas partie de leur organisation et nul doute que son ami préférait gérer les choses tout seul, mais ce n’est pas le deal qu’elle a passé avec Finn.

- Ne t’emballe pas Rafa. J’ai dis que je ne le ferais pas. Je pense toujours que vous faites une erreur et qu’on risque de le payer, mais j’ai promis. Par contre, j’ai exigé d’être partie prenante dans cette histoire et c’est mon oncle qui s’en occupera. Ça devrait décourager les Italiens, au moins au début, de penser que le prince héritier est peut-être de retour et qu’on peut le manipuler. Finn est d’accord avec moi, il sait qu’il vaut mieux qu’il n’ait pas de contact avec le gamin.

Elle devance toutes critiques et précise :

- Ne crois pas que ça soit une question de confiance. C’est professionnel, j’ai mon mot à dire dans cette histoire et je veux gérer ça moi-même. C’est non négociable. Mais je ne serais pas dans tes pattes.



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Message#Sujet: Re: Tu ne jugeras point - Rafa    Tu ne jugeras point - Rafa  Icon_minitimeMar 3 Mai - 11:56

Tu ne jugeras pointEve & Rafa

Ça fait quand même beaucoup pour un seul homme, tout ça : un nez fraîchement cassé, un pharmacien à punir, une vendetta à organiser, un voyage à Los Angeles sur le feu, et maintenant Eve qui annonce qu’elle sera de la partie. Sans même s’en rendre compte, Rafa part dans un long bâillement, qui a le mérite de réveiller la douleur de son visage et donc de le réveiller un peu. Quoi qu’en dise Matthews (“il en faut un peu plus pour le mettre KO, la mauvaise herbe, c’est costaud !”) la morphine l’anesthésie gentiment. Il faut dire que la surveillance conjuguée de Callahan et d’Eve était impitoyable ; le blessé avait beau jurer que ça allait, le couple infernal tenait à une application stricte de l’ordonnance du médecin. La morphine quatre fois par jour, c’est pas trois fois. Rafa a retrouvé un peu de sa propre intransigeance lorsque c’était le patron qui était alité, mais dans son cas, c’est très excessif. Il n’est pas en danger de mort, lui, et s’il dit qu’il peut tenir sans morphine, il sait de quoi il parle, pardi ! Maintenant que le voilà libéré de ses deux infirmiers personnels, il compte bien freiner un peu sur les cachetons, d’ailleurs. Il ne peut pas se permettre de dormir debout à longueur de journée, ou alors il faudrait qu’il reste cloîtré chez lui, et il s’y emmerde trop pour l’envisager. Reste qu’on lui a fait ingurgiter sa ration ce matin - tu parles d’un petit déj, quand il y a plus de médicaments que de nourriture sur la table ! - et qu’il pique un peu du nez. Suffisamment pour ne pas s’agacer quand Eve remet sur le tapis le sujet de son incapacité à transplaner. Il pourrait pourtant lui rétorquer qu’elle serait inspirée de se mêler de son auguste popotin, une réponse peu argumentée mais qui vient régulièrement ponctuer leurs conversations, ou plus sérieusement lui dire qu’il ne veut plus rien avoir à faire avec la magie, une fois Avery châtié. Rengaine classique de voyou, appliquée à la magie. Un dernier coup, et je me range. Ça le ferait marrer s’il s’en rendait compte ; il a vu assez de truands promettre de raccrocher après ce fameux dernier coup pour savoir que ça ne marche pas comme ça. Mais il n’a pas la foi de batailler sur ce point-là avec Eve. Ils ont d’autres choses à se dire, autant garder son énergie pour parler de ce voyage à Los Angeles, par exemple. Rafa s’allume une nouvelle cigarette et lâche à travers un nuage de fumée :

-OK, donc j’ai pas le choix, et je suis prié de fermer ma gueule, c’est ça ? J’avais prévu un truc rapide, moi, juste un aller-retour, pas une enquête ou je ne sais quel bordel. Le temps de mettre la main sur le mioche, le foutre dans l’avion et roulez jeunesse. Et j’te préviens, que tu sois là ou pas, c’est comme ça que ça se passera.

Lui aussi, s’il veut (et c’est souvent), il peut parler sec et faire son cheffaillon. Il a proposé au patron de récupérer le gamin, il le fera, mais les contretemps du genre espionne qui s’incruste, il entend les balayer. Pas plus gracieux, il poursuit :

-Bon, t’as promis, d’accord. Ça me dit pas ce que tu vas faire si le mouflet est, comme tu le dis, une pomme pourrie. Tu vas le mettre dans un sachet avant de le ramener à ton oncle, pas qu’il se salisse les mains ? Excuse-moi, j’ai un peu de mal à acheter ça. Mais bon. Du moment que t’es pas dans mes pattes, ça ira.

Il fume encore un instant en silence avant de marmonner, songeur :

-De toute façon, ça doit pas être une flèche, ce gosse, ou les Ritals auraient déjà tenté quelque chose et on le saurait. Même son paternel, d’ailleurs, aurait bougé un peu plus son cul s’il avait vu un héritier potentiel. Si tu veux mon avis, on va tomber sur un pauvre môme largué, qui comprendra pas ce qui se passe et qu’a peut-être même jamais entendu parler de Montenza.

Il a beaucoup réfléchi à la question, Rafa, et il se dit qu’il n’y a aucune raison de laisser le petit prince moisir dans un orphelinat si on peut en faire un étendard pour essayer de récupérer le royaume de son vieux. Il doit y avoir un problème, quelque chose qui cloche, avec ce gamin. La cigarette se consume alors qu’il reprend ces pensées déjà mille fois ressassées, Eve, de son côté, semblant aussi plongée dans ses réflexions. Le menton appuyé sur sa main gauche, Rafa finit par fermer les yeux, juste une seconde, parce que la morphine, bordel, ça vous assomme… Il se réveille dans un sursaut lorsque sa tête glisse de sa main, écrase dans le cendrier le filtre de sa cigarette et sourit à Eve :

-Ecoute, je suis rétamé, avec ces médocs. J’vais aller m’allonger cinq minutes, d’accord ? Je te rejoins après.

Eve comprend que les cinq minutes risquent de durer deux heures et préfère prendre congé, non sans avoir complimenté Rafa sur sa légendaire amabilité.

-C’est pour que tu commences à t’habituer, vu qu’on est censé partir ensemble. Ça va pas être une partie de rigolade, tu verras, grogne-t-il depuis la première marche de l’escalier, en souriant quand même un peu sous son plâtre.

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