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 A nos amours || Finn

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SORCIER
Rafael O'Riordan
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Message#Sujet: A nos amours || Finn   A nos amours || Finn Icon_minitimeVen 5 Aoû - 22:14

A nos amoursFinn & Rafa

-Eh, Rafa.

C’est Sean qui, avec une douceur inattendue, réveille O’Riordan en le secouant gentiment.

-On est arrivés.

Le patron est déjà descendu de voiture, et il attend, flanqué de Connell, que son second émerge. Les deux, cigarette au bec, se poilent en voyant Rafael s’extraire péniblement de la Bentley, en bâillant à s’en décrocher la mâchoire. La conversation, sur le trajet du retour, a été brève ; très vite, Rafa s’est endormi, la lettre de Robin toujours serrée dans sa main. Il ne se sentait pourtant pas trop fatigué, en atterrissant, mais une fois posé dans la Bentley, avec le chauffage à fond, il a sombré. Callahan l’attend pour descendre au Cohan, en lui promettant un petit déjeuner du tonnerre. C’est qu’il a l’air d’un déterré, le Rafa. La faim et la fatigue, chez lui, marquent rapidement leur territoire, et il est d’une pâleur presque inquiétante. Rien de grave, il a de la ressource et il récupère vite, mais là, le café fumant que Liam lui sert est le bienvenu.

-Il caille, ici, remarque O’Riordan dans un frisson, en jetant un coup d'œil aux fenêtres du pub. Vous avez eu ce temps de merde tout du long ?

Obligeant, Liam pousse un peu le tirage du poêle près duquel Callahan et son second sont assis, avant de disparaître en cuisine.

-Tenez, mangez tant que c’est chaud, claironne-t-il en déposant devant eux deux assiettes garnies d’un petit déjeuner irlandais assez copieux pour nourrir une famille entière. Et je vous ramène du café.

Sean et Connell, discrets, se sont installés au comptoir, de sorte que les deux hommes peuvent parler sans être entendus. Après quelques bouchées frénétiques (et bienfaisantes), Rafa se sent un peu moins frigorifié et fatigué, et il se décide à demander :

-Alors, du coup, patron… Qu’est-ce que vous en avez pensé ?

Il le sait déjà, du moins en partie, mais il a envie de réentendre ce que Finn lui a déjà dit à l’aéroport. Que Robin a l’air d’une chouette fille, qu’elle est folle de lui, et que s’il ne se décide pas à recoller les morceaux avec elle, c’est qu’il est un incurable connard. Ça lui fait tellement plaisir, d’entendre parler d’elle, et de partager enfin son existence avec ce type qui lui sert de frangin. C’est comme si ça rendait les choses plus réelles, plus évidentes, que Callahan l’ait rencontrée. Et elle veut bien le revoir. Un vrai petit miracle, un peu comme le fait que le patron ait surmonté sa répugnance pour le côté sorcier, juste pour porter son message. Une bouchée d’oeufs brouillés plus tard, il poursuit d’ailleurs, sans que Finn ait eu le temps de répondre :

-Faut que j’vous remercie encore, au fait. C’est vraiment chic de votre part d’être allé de l’autre côté. Je sais bien que vous aimez pas ça, et c’est… j’suis vraiment touché, conclut-il d’une voix sourde, à peine audible, comme s’il venait de proférer une abomination.

Cette difficulté, toujours, à exprimer ses sentiments - et pourtant, sa gratitude envers Callahan est réelle. Il sait le sacrifice que ça a été, pour lui, de passer côté sorcier, et il mesure d’autant mieux la valeur de ce service. Rendu un peu brouillon par la conjonction du décalage horaire, de cette lettre et de la fatigue, il continue de parler, sans se rendre compte qu’il doit avoir l’air d’un adolescent surexcité :

-Faut que je lui réponde, hein. Vous lui avez dit quoi ? Que j’enverrais un hibou ? Sinon je peux y passer directement, c’est peut-être mieux, non ? Ouais, je vais dormir deux heures et j’irai de l’autre côté, vous en pensez quoi, patron ?

Il se marre en silence, le patron, manifestement amusé de voir son second aussi agité et aussi amoureux - suffisamment absorbé par sa blonde pour ne même pas avoir la présence d’esprit de faire un compte-rendu de leur expédition californienne.

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Message#Sujet: Re: A nos amours || Finn   A nos amours || Finn Icon_minitimeMar 16 Aoû - 1:17



A nos amours
Rafa & Finn
« Ouais, un vrai temps de chien. » Abonde Finn en réponse à son second, occupé à essorer sa casquette, trempée par la pluie finie qui s’est abattue sur eux pendant le trajet retour. L’eau dégouline encore de son blouson de cuir lorsqu’il s’assoit face à Rafa, goutant avec plaisir au petit déjeuner servi par Liam. Depuis les USA, ça fait toujours un choc de redécouvrir l’humidité anglaise – la mauvaise foi empêche de signaler qu’on la trouve aussi en Irlande - au point que sans y être retourné depuis juin, Callahan se prend à regretter lui aussi la chaleur de la Californie.

En fait, il en serait même presque plus nostalgique et impatient d’en entendre parler que Rafa lui-même, à force de regretter de ne pas avoir pu montrer les USA à Eve lui-même. Non, manifestement, tout ce qui intéresse son second, c’est d’entendre parler de Robin. Derrière son bacon, Callahan se fend d’un sourire indulgent. Bon, ça ne va pas être très pratique pour évoquer les détails pratiques. Le mafieux a quand même besoin d’en savoir un peu plus sur leur mission américaine, par acquis de conscience, et surtout, malgré la peur, l’acteur aimerait bien parler de Eve, ne serait-ce parce qu’ainsi il pourrait savoir où il en est. Parler à Rafa suppose qu’il ne pourrait plus tout à fait nier le sujet – à supposer qu’il ait encore envie de le faire, ce qui est une autre question. Se contredisant immédiatement, Finn juge cependant qu’ils ont le temps. Il connait les affres dans lesquels Rafa tombe. L’angoisse, l’espoir, l’excitation, les milliers de fois où on revoie chaque signe, chaque mot doux, à tout réinterpréter, tout ça lui est familier. C’est autant de premières fois et Finn est assez lucide sur lui-même pour savoir qu’il a sans doute été pire et qu’il ne peut pas juger. De toute façon il n’en a pas envie. Sur les filles, ils ont toujours tout partagé, allant jusqu’à les draguer ensemble. Peut-être bien qu’il a aussi donné quelques tuyau à son cadet, si jamais celui-ci en avait besoin – en tout cas, pour Robin, c’est sûr. Alors évidemment, que Finn ne se privera pas de charrier. Mais il écoute aussi, peu importe si Rafa se répète, et il reprend lui aussi, comme lorsqu’ils refont dix mille fois le monde en se vendant le rêve de leur propre gloire, et il conseille. Après tout, c’est ça, être le meilleur ami de quelqu’un, non ?

Le voilà donc parti pour réexpliquer tout le bien qu’il pense de Robin, parce que c’est vrai, il l’aime bien cette fille qui n’a d’yeux que pour ce second qui lui sert de petit frère, ou ce petit frère qui lui sert de second, on ne sait plus trop et puis de toute façon ça n’a pas d’importance, parce que pour Finnegan Callahan c’est pareil. Mais ledit Rafael ne lui laisse pas en caser une, ce que l’acteur ne peut prendre qu’à la rigolade. Ça l’a rendu plus bavard que moi, dis donc, dira-t-il à Eve le soir, j’en crois pas mes oreilles, et ça la fera rire, parce que c’est bien vrai : O’Riordan a proprement réussi à lui couper la chique. Et pas qu’une fois, en plus. Voilà que cet idiot le remercie, en plus. De quoi ? Finn ne sait même pas, parce que c’est normal, et qu’il ferait à peu près tout et n’importe quoi pour Rafa, ce qui est réciproque, d’ailleurs. N’a-t-il pas porté chacun de ses messages à Eve, subi, lui aussi, ses récits, conseillé, remonté le moral ? Si, bien sûr, alors aller dans le monde sorcier, en comparaison, c’est nada, que tchi, des prunes. De toute façon, il l’aurait fait pour Rafa même sans ça. Par loyauté et par affection, tout ce qu’il ne sait pas dire non plus : le voilà qui prend le même ton bourru que son compatriote. « Bah, c’est rien, t’inquiète. T’en as fait autant pour moi, je te devais bien ça. Puis t’as un caractère de chien quand ça va pas, avec elle, alors je me rend service aussi. » Il toussote, se raclant la gorge au prétexte de boire son café, et puis comme il ne sait pas bien dire non plus les choses, Finn, il vanne. Tout passe toujours mieux avec une vanne : comme ça ce n’est pas sérieux, et personne ne pourra dire qu’ils se disent des mots tendres ou ce genre de conneries.

Mais à son grand étonnement, aucune pique ne vient en réponse ; Rafa ne parait même pas l’avoir entendu et passe déjà à autre chose : « Aller où ? » S’étonne Callahan, perplexe, oubliant d’enfourner la bouchée d’œuf qu’il avait commencé à attaquer, avant que la lumière ne se fasse jour dans son esprit. « Oh. Tu sais qu’elle est peut-être partie de ce bar depuis hier, quand même. T’as son adresse, au moins ? » Il en doute, la timidité de Robin lui ayant appris qu’ils n’avaient jamais partagés de moment à ce point intime et impliquant d’aller chez l’un ou l’autre, et la mine penaude de Rafa, qui ne paraissait pas avoir pensé à ce détail, le lui confirme autant qu’elle le fait rire. Gentiment, il se penche pour lui taper amicalement l’épaule : « Eh, allez, tire pas cette tête, c’est pas grave, tu peux toujours lui écrire quand t’auras dormi un peu. De toute façon, t’as tellement une gueule de déterré, je crois que si je te couche tu dors trois jours, alors aller te promener, j’y crois pas des masses.  » Il secoue la tête, toujours avec bonne humeur : « Ah, ces jeunes qui veulent brûler les étapes. A ce train là j’aurais même pas le temps de dire ouf que tu vas être marié et père de famille, si je vous laisse faire. » Prémonition ? Finn est en tout cas saisi d’un drôle de sentiment. Chassant cette impression fugace, il commente avec bonne humeur : « Mais écris-lui, ouais. Y a pas besoin d'adresse, avec leur poste... Et elle avait peur que tu ne veuilles pas venir, quelque chose comme ça, j’ai pas su trop quoi lui dire, alors tu marqueras des points en le faisant. Ça la rassurera et ça lui fera plaisir. » La grande angoisse de Robin, celle que Rafa ne veuille plus d’elle ou qu’il croit que c’est fichu. Sur ce point, ils sont étrangement symétriques, les deux tourtereaux, quoiqu’ils ne s’en rendent pas compte, même si c’est évident vu de l’extérieur. Qu’ils aient réussi à dépasser ça est une bonne chose… même si présentement, son second est un peu trop enthousiaste, du point de vue de Finn.

D’expérience, et même si comme toutes les fois où il est raisonnable, il lui semble étrange de parler ainsi, il voit que c’est une mauvaise idée. Reste encore à l’expliquer de façon intelligible, ce qui n’est pas une mince affaire. « Et puis c’est peut être mieux d’attendre, vu que vous avez un rendez-vous fixé. Ça lui permettra de s’organiser. » Finn soupire. Comment dire à quoi il pense, comme on dit ce genre de choses à son meilleur ami sans passer pour le dernier des connards ? Il n’a pas eu tellement d’informations, et il craint de mettre son second en rogne. Il n’est pas non plus tellement candidat à un coup de poing perdu, connaissant la bête lorsqu’il est de mauvais poil, surtout pas alors qu’ils ont d’autres sujets importants à aborder. Et puis il répugne aussi à être l’oiseau de mauvais augure et à faire redescendre Rafa sur terre de cette manière là.

Pourtant il le faut, parce qu’il doit être prévenu. Certes, il n’est pas Robin et c’est entre eux qu’ils devront en parler, mais il ne peut pas garder l’information pour lui. De son point de vue, quoiqu’il la juge gentille, Finn ne doit rien à la jeune femme. C’est à O’Riordan, comme ami, que va sa loyauté, alors il faut qu’il parle. Autant ne pas retarder les choses et entrer dans le vif du sujet immédiatement, donc : l'acteur comprend rapidement qu'il n'y aura pas de bonne manière d'annoncer ce qu'il a dire.

Se passant une main dans les cheveux, embarrassé, il finit donc par se lancer, lui proposant une cigarette au passage : « Écoute…je t’ai dit qu’il fallait que je te parle d’un truc. C’est à propos d’Avery. Je suppose que tu t’en doutais, elle est avec lui. Enfin, il l’a surtout embobinée, si tu veux mon avis. Il a profité du fait qu’elle était malheureuse en se faisant passer pour le gendre idéal, de ce que j’ai compris. » Le bon copain au bon moment. Tybalt, quoi. Finn, connaisseur de Shakespeare, se met à grincer des dents, parce qu’en filant cette putain de métaphore de Roméo et Juliette, ça implique que lui est Mercutio et qu’il va se faire dessouder bientôt, avant que Rafa/Roméo ne descende Avery/Tybalt pour le venger, se fasse condamner par l’équivalent du seigneur de Vérone local, que Robin/Juliette, se suicide, et que le même Rafa/Roméo, se tue aussi. C'est peu dire qu'il espère que ça tourne autrement, mais il estime qu'il y a de l'espoir, heureusement. « Tu sais, elle était mal. Elle s’est mise à pleurer, alors j’étais mal aussi en me demandant ce que j’allais pouvoir te dire. » Finn sourit doucement, manière d’excuse, parce que ça l’emmerde d’avoir fait pleurer la copine de son meilleur ami et de devoir lui annoncer, même s’il n’en est qu’une cause très indirecte. Alors il essaye d’être un peu encourageant pour compenser toutes ces mauvaises nouvelles. « Mais tu veux que je te dise un truc ? Elle était pas mal parce qu’elle l’aime. Oh non. Elle l’était parce qu’elle était terrorisée à l’idée que tu ne veuilles plus la revoir, que tu ne comprennes pas, que tu la juges et parce qu’elle pense qu’elle a pas été honnête avec toi alors qu’elle t’aime – et ça, parole, je peux en témoigner, c’est vrai. » Dit-il, pointant sa fourchette vers Rafa d’un air décidé. Oui, elle l’aime à crever, la petite, et c’est réciproque. Elle s’est juste embarquée dans une sale histoire parce qu’elle n’avait plus de nouvelles. Ça arrive, songe-t-il, indulgent, quand on est malheureux, de faire des conneries : n’est-ce pas ce que fait Rafa en ne répondant pas ? Personne n’est coupable, ici : tout le monde est débutant dans les chagrins d’amour. Sauf Avery. Lui il n’est pas débutant, lui c’est un connard – en toute objectivité et sans aucune partialité, évidemment.

Très affirmatif, Finn continue son exposé.  « Elle essaye de trouver le courage de le plaquer. Elle va le faire, elle me l’a dit. Tu aurais vu sa tête quand je lui ai lu ta lettre, on aurait dit que c’était Noel quand j’ai mentionné que tu voulais la revoir. » Avant qu’elle ne se mette à pleurer, quoi. Se voulant rassurant sur le fait que la blonde n’est pas en danger immédiat – il connait l’animal et il sait que la question arrivera tôt ou tard – il explique ensuite, essayant de retranscrire au mieux ce dont il a eu l’impression en écoutant Robin parler. « Elle n’a pas l’air d’avoir peur de lui ni même de savoir de quoi il est capable, alors peut-être qu’il est vraiment calme avec elle. Dans tous les cas peut être qu’elle s’est arrangée pour qu’il ne vienne pas vous emmerder en te donnant ce rendez-vous, alors pour l’instant, peut-être qu’il vaut mieux la laisser gérer et éviter de lui donner des motifs de l’emmerder, tu vois ce que je veux dire. Si elle t’a donné ce rendez-vous, c’est qu’elle peut s’organiser. Mais imagine si tu tombes sur Avery en y allant à l’improviste…» Le ton est plus assuré, même si l’exposé a été un peu confus, parce qu’il expliquait les éléments en suivant le déroulé de la conversation qu’il a eu avec Robin et ce qu’il en a déduit, le tout mêlé de son inquiétude que son second se fasse une nouvelle fois casser la gueule et qu’il ne puisse pas l’aider.  Callahan s’en veut un peu. Il a l’impression de de gâcher la fête et de jouer les rabats-joie, ce qui ne lui ressemble pas – c’est justement le rôle de Rafa, d’ordinaire, ce qui ne manque pas d’ironie. Il voudrait aussi, par-dessus tout, que Rafa ait compris que la jeune femme l’aime et que si elle est avec Avery, il ne faut pas s’inquiéter de ses sentiments – que ça ne compte pas, en fait. Mais a-t-il réussi dans cette entreprise ? Mystère. Alors il conclut avec un sourire contrit : « C’est pour ça qu’elle t’a écrit ça, à la fin du courrier. Elle voulait te l’expliquer elle-même, mais bon, je me voyais mal ne pas te le dire. » C’est aussi à ça que ça sert, un meilleur ami, non ?
(C) CANTARELLA.

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Message#Sujet: Re: A nos amours || Finn   A nos amours || Finn Icon_minitimeMer 17 Aoû - 22:21

A nos amoursFinn & Rafa

Les oeufs, le bacon, le black pudding, les haricots, et puis les toasts à la marmelade, et enfin le porridge bien chaud que Liam ramène en guise de dessert, avec la pointe de cannelle qui ravigote, et l’Irish coffee de rigueur. De quoi avoir moins froid en retrouvant le sale temps anglais, avec un paquet d’heures de décalage horaire dans les pattes et le contrecoup de cette expédition. À rebours, Rafa se rend compte que ça aurait pu être vraiment dangereux, leur histoire. Sur le moment, ça lui a semblé normal - aussi normal que peut l’être n’importe quel événement dans la vie d’un voyou - mais maintenant qu’il est de retour au bercail, il réalise qu’il aurait suffi d’un rien pour que ça se termine à Alcatraz. On n’est pas mal, finalement, à se les geler à Londres, avec du café, des clopes à discrétion et le patron qui a l’air drôlement content de retrouver son petit monde. Enfin rassasié, Rafa repousse son assiette, reprend une dose de café, et se laisse aller contre le dossier de la banquette, les yeux fermés. Son enthousiasme fond comme neige au soleil en écoutant Callahan, très sérieux dans son rôle de frère aîné, lui vanter les bienfaits de la patience. Ça lui va bien, songe Rafa vaguement incrédule, de prêcher ce qu’il a tant de mal à mettre en pratique. Mais il a raison, bordel. C’est bien ça le problème : il a entièrement raison quand il dit qu’il ne faut pas se pointer à l’étourdie sur le Chemin de Traverse, et risquer de se reprendre une branlée au passage. Les marques de sa rencontre avec Avery viennent juste de disparaître, pas la peine d’aller passer la seconde couche.

-Vous savez ce que c’est, patron, le seul truc plus chiant qu’un rabat-joie ? rétorque O’Riordan après avoir étouffé un long bâillement. Un rabat-joie qui a raison. Oh, vous fâchez pas, j’crois que c’est vous qui me l’avez servie, celle-là.

Pas la force, de toute façon, d’esquiver une calotte si elle venait à tomber. La fatigue commence à peser lourd sur l’organisme de Rafa, et maintenant qu’il a mangé, il y a fort à parier qu’il ne fera pas de vieux os. Il trouve tout de même le tonus de s’insurger face aux prédictions de Callahan :

-Eh, parlez pas de malheur, vous voulez ? Marié et père de famille, rien que ça. Vous m'y voyez, sans rire ? Vous croyez vraiment que j’ai besoin d’avoir des mômes ?

Ils en ont déjà parlé, et Finn sait ce qu’il pense de tout ça. Il est lucide, il sait qu’il mène une vie dangereuse et marginale, et il ne veut pas imposer ça à une femme ou à des enfants. Pourquoi, dans ce cas, s’obstiner avec Robin ? La question le met mal à l’aise, tant elle soulève de contradictions. Le mieux, c’est de ne pas trop y penser, et le patron tombe à pic avec ses mauvaises nouvelles. Rien de tel que d’entendre parler d’Avery pour distraire Rafa de ses questions existentielles. À écouter parler Callahan, il se renfrogne, et reste quelques instants immobile, sa cigarette pas encore allumée à la bouche, à digérer la nouvelle. Il avait deviné qu’Avery avait mis le grappin sur Robin, mais la confirmation de cette intuition fait mal quand même. Et puis il y a la suite, les larmes de Robin, et le fait qu’elle l’aime, lui, et que le patron en est sûr - ça lui rend un peu le sourire, à Rafa. Sa confiance en Finn et en son jugement est inébranlable, et s’il dit qu’elle est amoureuse, c’est que c’est vrai. Ils ont toujours tout partagé, depuis des années, les moments de gloire comme les fiascos, comme deux frangins - en tout cas, comme Rafa imagine qu’il aurait pu le faire avec ses propres frères. Ils se connaissent par cœur, et Callahan trouve d’instinct les mots justes pour rassurer son second et le convaincre de se tenir tranquille. Les nouvelles sont contrariantes, évidemment, mais Finn parle avec assez d’assurance pour qu’elles ne soient pas trop inquiétantes. Alors Rafa finit par abdiquer, en allumant enfin sa cigarette :

-Vous avez raison, patron. Je vais juste aller envoyer le message, et puis j’attendrai qu’elle me fasse signe. J’ai pas tellement envie que l’autre con me refasse la devanture comme l’autre fois. Remarque, cette fois, c’est pas un genou que je lui fais…

Il ne commente pas le reste des déclarations du patron, et se contente de tapoter l’avant-bras de Callahan en murmurant, les yeux dans les yeux :

-C’est bien que vous m’en ayez parlé, patron. C’est mieux que je sache avant d’y aller. Merci.

Bordel, ça en fait, des mercis, en peu de temps ! Finn va se demander ce qui se passe, à force. Il est plus habitué à entendre des vannes que des remerciements, de la part de son second - et pourtant, personne ne peut douter de la reconnaissance de Rafa à son égard. Juste que ça ne se dit pas, tout ça. Faut-il qu’il soit mordu, le Rafael, pour se laisser aller ainsi ! Un brin gêné, il tire deux ou trois bouffées de tabac en cherchant quelque chose à dire, et finalement, il se décide pour un abrupt changement de sujet :

-Bon, assez parlé de mes histoires, pas vrai ? Faut quand même que je vous raconte notre périple, après tout. Alors, par quoi je commence ? Le bien ou le moins bien ? Liam, on peut avoir un autre Irish coffee, s’te plaît ?

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Message#Sujet: Re: A nos amours || Finn   A nos amours || Finn Icon_minitimeVen 19 Aoû - 23:40



A nos amours
Rafa & Finn
“ Faut bien que y en ait un d’entre nous qui ait le sens des réalités, qu’est-ce que tu veux que je te dise.” Se moque Finn, ravi d’avoir enfin l’occasion de retourner à son second son insolence perpétuelle, entre deux toasts qu’il expédie. C’est drôle, d’être le type raisonnable, juste pour ça. Callahan reste perpétuellement étonné de l’être, incapable de voir qu’il lui est arrivé quelque chose de positif dans toutes les épreuves qu’il a subi ces derniers temps : il a muri et appris. Qu’il ne le comprenne pas immédiatement est sans doute normal. Ca a été rapide et brutal et il a encore du mal à assimiler et comprendre certains de ses propres choix, comme l’idée d’avoir un enfant avec Eve et de se dire qu’ils peuvent y arriver. Il voudrait donc bien dire à Rafa qu’il ne faut jamais dire jamais. Que lui non plus n’y croyait pas, mais que maintenant c’est évident, mais ils en ont déjà parlé et il sait que O’Riordan ne changera pas d’avis. Peut-être qu’ils sont dingues et que c’est lui qui a raison, alors Finn décide de le prendre à la blague, ce qu’il sait faire le mieux : “Je sais pas. Je t’aurais pas vu avec un bouquet de lavande sur pattes, non plus. Ah ouais, faut que je te raconte, ça aussi…” Mort de rire, le mafieux entreprend de décrire, avec force détails, la robe de Robin et l’impression florale que ça lui a fait, sans être véritablement moqueur, parce qu’au fond, en bon descendant de sorcier qui s’ignore, il a un peu les mêmes gouts - “et après tu oses dire que c’est moi qui ait des gouts étranges, pourquoi elle, elle n’a pas droit aux mêmes critiques, hein ?”

Ca évite les sujets qui fâchent, ceux qu’on ne peut pas contourner éternellement et ceux dont il faut parler, comme Avery. Il a tellement de scrupules, parce qu’il a l’air heureux, Rafa, rien qu’à parler de sa petite sorcière blonde, qu’un moment, Callahan manque de renoncer en se disant que ça va le décourager et le blesser. Mais non, O’Riordan le prend à peu près bien, ce qui le rassure, même si c’est aussi parce qu’il a veillé à y mettre les formes et qu’il a rappelé le rôle d’avocat qu’il a joué. Ca lui va bien, à Finn, le rôle de baveux, tiens, mais Callahan ne note même pas l’ironie.

Pas plus qu’il ne juge étrange de s’impliquer à ce point, lui qui s’intéresse si peu au monde et qui se glorifie même de vivre en marge de la société, de ses codes et de sa morale. La loyauté, ce n’est pas pour lui, qui fonctionne par intérêt personnel et ne compte pour et sur personne. Mais Rafa, c’est différent. C’est la famille, même si Callahan ne l’a jamais verbalisé. Il ne saurait pas le faire, de toute façon, même s’il le voulait, et le voilà qui râle, maintenant : “Arrête, hein, tu vas finir par chialer et moi aussi, merde. Ca se fait, c’est tout. ” Pour lui qui aime pourtant tellement parler, ça tient de l’évidence et sur ce point, il est bizarrement aussi handicapé que son second ou que Eve. L’acteur n’est pas aidé par les codes de son temps, ni par ceux de leur milieu, il faut dire. Comme Rafa lui même, sans doute : c’est perturbant, de le voir ainsi, alors ça ne l’aide pas. Le parcours de Finn joue aussi. Il n’a pas de modèle de frère digne de ce nom, jamais connu de démonstration d’affections familiales et jamais eu l’occasion d’en donner sans être repoussé non plus. Alors évidemment, il a un peu de mal à ne pas minimiser son rôle et à savoir prendre celles de Rafa pour ce qu’elles sont : ça le met mal à l’aise, comme s’il ne les méritait pas.

Il serait presque plus à l’aise, comble de l’ironie, à reprendre son rôle de rabat-joie. Mais c’est que c’est plus proche de son rôle de patron habituel, mentor doué de l’expérience nécessaire, dès lors, du moins, qu’on parle de flics, avec qu’il vaut mieux ne pas se coltiner, même si Callahan veut bien admettre qu’il est tentant d’en récolter si c’est pour se payer Avery. Enfournant son porridge, il grogne donc : “Et tant que j’en suis là, un conseil. Y a son oncle, hein. Tu feras gaffe à ça, aussi. Avoir des poulets anglais et sorciers dans la famille, crois-moi, ça sera plus une source d’emmerdements que n’importe quel mariage et n’importe quel mioche, si t’en parles pas avec elle. Puis même, par rapport à elle, ça se fait.” Au fond, il a de la compassion pour Rafa, parce que ça, c’est un sacré morceau à faire avaler à la petite et que ça pourrait tout gâcher. Mais bon, finir en taule, ça gâcherait tout aussi, et Finn ne peut pas ne pas le dire. Pour autant, il n’est pas moqueur et il n’a pas envie de rester sur le rôle du gars raisonnable. Ça l’emmerde. Ce n’est pas pour lui, l’éternel optimiste, celui qui vous dit que c’est possible, et c’est d’ailleurs ce qu’il fait en envoyant une nouvelle bourrade à Rafa : “ Ah, t’inquiète pas, va. Écris ta lettre, là, ça finira par s’arranger, je mets un billet de cent dessus.” C’est la force et la faiblesse de Finn, celle de croire que tout est toujours possible, quitte à s’obstiner jusqu’à la déraison pour faire en sorte que ça le devienne effectivement, si on le veut vraiment. Irréaliste ? Peut-être. Mais s’il n’était pas si optimiste, avec tout ce qui lui est arrivé dans la vie, il n’aurait sans doute pas survécu longtemps - c’est une façon comme une autre d’affronter la peine et les épreuves, si l’on veut.

Et de cet optimiste, Finn risque d’en avoir besoin bientôt. Bizarrement, il regrette un peu que Rafa parle si vite de lui. Tout comme il est offusqué que, si l’on en vient à parler de leurs soupçons respectifs concernant la grossesse potentielle de Eve - car c’est évidemment de ça dont il est question - son second puisse en parler comme un problème. Ce qui le conduit à grogner avec une grimace peu amène : “Définis moins bien.” Nerveusement, il tire une bouffée de tabac : “Je suppose que le bien, c’est le gosse. Vu qu’il est à Londres, j’en déduis que ça c’est bien fini. Vous avez pas eu trop d’emmerdes pour trouver ? Personne vous a rien dit ? ”

Mais Finn ne laisse pas le temps à Rafa de répondre. LA devient accessoire, dans la conversation, et ils le savent tous les deux. Il y a un très bref instant de silence. Il cherche ses mots, détourne les yeux, rougit comme un gosse ayant fait une connerie, sentant appréhension et panique le gagner de nouveau, en même temps que l’envie d’en savoir plus le gagner. Les mots lui manquent un peu, alors qu’il tire une nouvelle bouffée de tabac sur sa clope, avant d’adresser un pauvre sourire à Rafa. Sans oser dire les mots fatidiques, Finn se sent penaud par rapport à son ami pour une raison qu’il peine à s’expliquer - en fait, précisément parce qu’il est perdu. “Désolé, mon vieux. J’aurais peut-être du t’en parler avant LA. J’ai failli et puis je me suis dit que si je me plantais et que je me faisais des films, ça ne servait à rien, et que si c’était le cas, tu me le dirais. Faudrait qu’on parle, aussi, elle et moi, mais je…” Il hausse les épaules avec un pauvre sourire, derrière sa clope. “Ah merde…je suis un peu paumé, tu vois. Même maintenant, alors que je me doute de ce que tu vas me dire. ”

Un peu las de cette alternance d'inquiétude et d'espoir, Callahan se passe une main sur le visage et continue à tirer sur sa cigarette. Si l’acteur l’entend de la bouche de Rafa, ça rendra peut-être les choses plus réelles, il ne pourra plus fuir, et il fera ce qu’il faut. Peut-être que inconsciemment, c’est précisément dans cette optique que Finn s’est comporté comme ça. Le mafieux écrase sa clope et enquille cul sec son deuxième Irish Coffee, concluant d’un ton décidé : “Bon, raconte, allez. Je suis prêt. ”

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Message#Sujet: Re: A nos amours || Finn   A nos amours || Finn Icon_minitimeSam 20 Aoû - 21:52

A nos amoursFinn & Rafa

-Le moins bien, c’est…

Pas facile à définir, le moins bien. Dans l’ensemble, l’expédition s’est plutôt bien passée, et maintenant qu’il est de retour à Londres, Rafa a tendance à ne retenir que les bons côtés des quelques jours qui viennent de s’écouler. Le fait d’être là, déjà, et pas dans une geôle américaine, ou au fond de l’océan avec des chaussettes en béton. Tout s’est passé comme sur des roulettes, finalement. L’oncle Mariotti ne devrait avoir aucun indice sur ce qui est arrivé au petit, et d’ici qu’il ait l’idée de fouiller Londres pour le retrouver, le gosse sera devenu Anton Mariovitch, pupille du délicieux Nikolaï Chouvalov…

De toute façon, le patron ne laisse pas à Rafa le temps de dire quoi que ce soit. Ni de définir le moins bien, ni d’essayer de répondre à ses questions. Pas besoin, il fait les questions, les réponses et les notes de bas de page. C’est toujours comme ça, quand il est sur les nerfs. En bon second, O’Riordan connaît bien le personnage, et il sait qu’il faut le laisser dégoiser avant de pouvoir en placer une. Lorsque le flot cesse enfin, Rafa lance, vaguement narquois :

-Vous auriez dû m’en parler avant ? Parce qu’il y a un truc que j’aurais dû savoir ? Allez, respirez, patron, c’est bon, y a pas mort d'homme, ajoute t-il avec un sourire indulgent en voyant la tête de Finn.

Une gorgée d’Irish coffee, une dernière bouffée de tabac, et le voilà qui se décide à parler :


-Je vais commencer par le bien, quand même, hein. On s’en est sortis comme des chefs pour récupérer le colis. Si je vous disais… Il baisse la voix pour dire : On s’est dit que finalement, on allait utiliser la magie. Même moi, ouais. Et même qu’Eve a dit que je me débrouillais pas trop mal. Bref, du coup, personne ne devrait avoir trop de trucs à dire sur nous. Au sanatorium, ils doivent encore être persuadés qu’on l’a emmené manger une glace, le petit. Franchement, vous m’auriez vu… comme un vrai !

Il a une expression triomphale en prononçant ces mots, oubliant au passage qu’il est un véritable sorcier, malgré son peu d’appétence pour la magie. Redevenant sérieux, il reprend :

-Ça a l’air d’un gentil gamin, vous savez. Faudra s’assurer que les Russes le font soigner correctement. De ce que j’ai compris, il est pas trop gravement atteint, mais justement, faut pas laisser la maladie s’installer. En tout cas, il a pas dû rigoler beaucoup, dans sa vie. Vous auriez vu sa tête quand on lui a payé un Coca… on aurait dit que c’était Noël.

Pauvre môme, ouais. Pourtant peu porté sur l’empathie, Rafa ne peut s’empêcher d’avoir pitié du petit Mariotti, fils d’un connard et d’une mère que sa famille a dû renier, et puis quasiment otage entre les mains d’un oncle aussi con que son père… De son côté, le patron écoute, mais il est manifeste qu’il attend la suite. Rafa assèche son Irish coffee avant de se lancer, en faisant mine de n’avoir aucune idée de ce qui se passe :

-Et puis donc, y a le moins bien. Rien de grave, hein. Mais c’est juste que… Eve… Je me rappelais pas qu’elle était à fleur de peau comme ça. Je veux dire…

Il hésite, observe les traits du patron, crispés par l’inquiétude.

-J’imaginais pas qu’elle était du genre à pleurer parce qu’on lui dit qu’il n’y a plus de café, vous voyez ? Et puis… Je savais pas du tout comment me comporter avec elle. Je marchais sur des oeufs constamment. Je pouvais pas savoir comment elle allait réagir. Un coup je lui dis un truc, je me fais engueuler, deux minutes après elle rigole… Vraiment bizarre. Je pensais pas qu’elle était soupe-au-lait comme ça. Par contre, faut que je vous dise…

Personne ne se trouve assez près pour les entendre, mais il se penche quand même vers Callahan pour le mettre en garde :

-On a parlé d’Ava Gardner. C’est la domestique qui a eu le malheur de parler de “l’ancienne maîtresse”, Eve m’a demandé qui c’était, alors je me suis pas méfié, j’ai dit que la seule qui avait pu prétendre au titre, c’était Ava. Bordel ! qu’est-ce que j’ai pas fait ! Elle l’a super mal pris. J’ai eu beau lui dire que ça avait duré que trois mois, qu’il y avait prescription, et que vous la connaissiez pas encore à ce moment, rien à faire, si elle avait croisé Ava elle lui arrachait les yeux en direct. Incroyable comme réaction. Du coup, faites gaffe, patron, vous risquez d’en entendre parler.

Estimant qu’il a assez fait mariner Callahan, il se laisse aller contre la banquette de cuir, et ajoute enfin :

-Et puis, votre copine, là… Qu’est-ce qu’elle peut bouffer ! Si vous m’aviez pas promis juré craché que vous alliez faire gaffe, je dirais qu’elle est enceinte.



Dernière édition par Rafael O'Riordan le Dim 21 Aoû - 22:28, édité 1 fois
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Message#Sujet: Re: A nos amours || Finn   A nos amours || Finn Icon_minitimeDim 21 Aoû - 22:18



A nos amours
Rafa & Finn
Tout à ses angoisses et à sa contrition, Callahan ne voit même pas que Rafa se fout de sa gueule. C’est dire dans quel état il est. Il va même pour expliquer, dépassant sa peur et ses hésitations, le plus sérieusement du monde, ce qu’il aurait du lui dire et pourquoi il a merdé et qu’il est désolé, quand O’Riordan se marre et l’absout. « Non, non je sais bien, mais bon, c’est quand même pas à toi de gérer ça… » Il hausse les épaules, manière de dire, à supposer que ça existe. « A force de me faire des films, de toute façon, si j’avais dit un truc, j’aurais absolument voulu vous accompagner et ça aurait fait foiré les choses. » La part irrationnelle de son esprit, celle l’a même qui l’a empêchée de dormir et qui à l’heure actuelle, refait les pires scénarii même si Rafa et Eve sont revenus, n’a pas cessé de lui souffler que les pires horreurs pourraient se produire et qu’il culpabiliserait toute sa vie si Eve faisait une fausse couche sans qu’il ne soit là et ça aurait vraiment été une crasse de laisser un Rafa tombant des nues gérer ça si ça était arrivé. C’est le traumatisme qui parle et Finn est incapable de s’expliquer. La part rationnelle, elle, lui a dit que c’était une mauvaise idée, lui a rappelé que son second saurait gérer, et qu’il n’arriverait rien – et de fait c’est ce qu’il s’est produit.

Mais il a tout de même l’impression d’avoir été un peu lâche, comme là, à l’instant, alors qu’ils parlent de ce sujet très annexe qu’est Antony Mariotti. Et pourtant Finn s’intéresse – « de la magie ? ah bah chapeau, c’est une bonne idée » - et note soigneusement les détails, pas totalement dépourvu d’empathie – « bon, on verra à l’occasion, même si c’est pas moi qui ferait ça ».

Ça ne peut pas durer, décide-t-il finalement, et ça ne lui ressemble pas de fuir, alors l’acteur finit par faire le grand saut et aborder l’autre sujet délicat de la conversation, celui qui le concerne. Pourtant, juste quand il change d’avis, on dirait que c’est Rafa qui prend le relai pour le torturer, comme si Finn n’y réussissait pas très bien seul, lui racontant par le détail des choses qu’il lui semble déjà savoir parce qu’il en a eu le récit en direct. « Oui, oui… » Elle a des sautes d’humeur, oui, il sait, il l’a vue, au fait, que diable ! Callahan peine à retenir ses mouvements d’impatience, de plus en plus stressé, ayant la désagréable impression que son second trouve hilarant de le faire marner. « Oui, je sais tout ça, j’y ai déjà eu droit au téléphone. » Accouche, bordel, manque-t-il d’ajouter, et c’est vraiment le cas de le dire, parce finalement, le couperet tombe. Elle est enceinte, évidemment, Finn n’a pas rêvé et il ne peut retenir un gémissement d’angoisse, sous le regard hilare de son second, qui s’amuse définitivement beaucoup. « Oh, ça va, hein, arrête de te foutre de ma gueule, toi, hein. » Gronde-t-il quand même pour la forme avant de se prendre la tête dans les mains.

Son cerveau tourne à mille à l’heure sous l’effet de la panique et une impression soudaine de vertige le saisit, alors qu’il est pourtant assis. « Ça devait pas se passer comme ça…ça devait pas arriver aussi tôt. Merde, on a pourtant fait gaffe…enfin, je suis pas allé chez Matthews pour rien, quand même ! » Le mafieux se parle plus à lui-même qu’à Rafa, refaisant le film et essayant de comprendre. Il lui faut un peu de temps pour comprendre et se souvenir. Ca doit être la fois où il a dit qu’il était d’accord pour ce projet complètement fou. Finn peut encore entendre Eve dire qu’il ne peut rien arriver en une fois. Il se souvient aussi d’avoir songé que ça ne fonctionne pas comme ça et d’avoir renoncé, trop enthousiaste à l’idée de la retrouver. Ça lui semblait annexe, il avait envie d’y croire et d’oublier le risque. Gêné comme il l’est rarement à l’idée de discuter avec quelqu’un d’autre, des conséquences de ses ébats, même Rafa, il ne peut donc s’empêcher de grogner, offusqué ce dernier ne compatisse pas au moins un peu devant la panique qui le gagne et le sérieux du problème qu’il rencontre : « Mais arrête, c’est pas drôle, à la fin. J’aimerai t’y voir, toi, si ça te tombait dessus comme ça… »

C’est que Finn est un peu honteux de leur imprudence, comme deux adolescents à qui personne n’aurait expliqué la vie, ce qu’ils ne sont pas, du moins en théorie. A moins que l’intensité qu’ils y ont mis ne soit qu’un acte manqué, comme si leur corps et leur avaient pris le dessus sur la raison en assumant que cet enfant, ils le voulaient véritablement maintenant, pas dans quelques temps et qu’ils ne voulaient pas attendre ? Ils auraient voulu l’avoir aussi tôt, ce bébé, ils ne s’y seraient pas pris autrement. Au moins, songe Callahan, on ne pourra pas leur reprocher de ne pas avoir mis du cœur à l’ouvrage, d’avoir manqué d’enthousiasme ou de sincérité quant à leur amour : il n’y avait même que ça qui comptait, même, à ce moment, et ça lui tire un sourire attendri, le premier depuis qu’il a vu ses doutes confirmés par son second. « Quand même, je savais bien que j’étais pas tout à fait dingue... »

Finn peine à réaliser, se demandant s’il est encore possible que Rafa et lui se trompent. Mais non. C’est trop gros, trop énorme, il y a trop de signes pour qu’ils fassent une erreur collective. A vrai dire, le mafieux serait presque déçu si c’était le cas. « On va avoir un gosse, pour de vrai. Merde, tu te rends compte…c’est incroyable. » Murmure-t-il rêveusement avant d’allumer une nouvelle cigarette, l’autre s’étant éteinte dans ses mains, l’esprit tout entier pris à des tas de questions sans réponses, mais qui ne parviennent pas à effacer un sourire qui germe peu à peu sur ses lèvres malgré la panique. Il a besoin de le répéter, encore et encore, pour se convaincre que c’est réel. Est-ce que c’est bien ou mal ? Bien sûr, ils ne l’avaient pas envisagé comme ça. Ils devaient faire ça dans quelques années. Mais qu’est-ce que c’est vraiment si grave que ça ? Ça change beaucoup de choses, sans doute, par rapport à eux. C’est vrai que ça aurait mieux de se connaitre et d’avoir le temps de trouver leur propre équilibre. D’être sûr de vouloir passer sa vie l’un avec l’autre. De ne pas avoir besoin de faire tout dans la précipitation, de prendre leur temps. Finn n’arrive pas à trouver ça grave, pour lui-même, parce qu’il est sûr qu’il aimera toujours Eve.

Mais elle, qu’est-ce qu’elle en pensera ? Jusqu’à là, il a raisonné comme si le fait qu’elle serait d’accord pour le garder était acquis, alors qu’il n’en sait rien. Non, elle voudra forcément, se dit Finn. Cet enfant, elle le voulait plus que lui, au départ, Eve, c'est même la meilleure preuve qu'elle l'aime, celle qui aide Finn à se calmer lorsqu'il doute. Elle ne voulait pas passer sur la table, non plus. Il lui semble donc qu’ils se sont mis d’accord non seulement pour avoir un enfant un jour, mais que le but de cette conversation était aussi de définir une ligne de conduite commune au cas où ça arrivait avant, et qu'ils se sont mis d'accord pour le garder si c'était le cas. Reprenant brusquement contact avec la réalité, il se met donc à interroger Rafa, seule personne qui en sait potentiellement plus que lui : « Et elle ? Ça va quand même ? quand tu dis qu’elle était chamboulée, elle était pas trop triste, quand même ? Pas malade ? pas trop fatiguée ? » Le voilà reparti dans ses tornades habituelles de questions, parce qu'il a peur, aussi, pour sa compagne. « Peut-être qu’il faudrait demander à Matthews de venir la voir, non ? Non. Faut vraiment que je lui parles, d’abord… Tu crois qu’elle sait ? Elle m’a rien dit, à moi, alors j’ai supposé que non…» Le ton se fait pensif. Le mafieux a définitivement l’impression que sa compagne ne s’est aperçue de rien et que ce sera à lui de lui apprendre. A moins qu’elle ne s’en soit aperçue à LA ? « Elle t’en a parlé, à toi ? Ça va être marrant, sinon, comme conversation… »

Il y a un silence bref, puis Callahan déclare d’un ton décidé : « Je vais reprendre un Irish Coffee. » Il va être père, sans doute, et il ne sait même pas la moitié de ce que ça implique. Ça tourne et ça défile dans son esprit sans que Finn ne puisse s’en empêcher. Mais l’angoisse de ne pas être la hauteur ne fait pas disparaitre son léger sourire, ni un sentiment assez doux qui surnage parmi tout le reste. Avec un sourire timide, qui ne lui ressemble pas, si peu, Finn finit donc par dire, hésitant : « Je sais pas si je m’emballe mais… je crois que je suis content, Rafa, même si c’est le bordel. » Est-ce qu’il se précipite trop ? est-ce qu’il a le droit d’être heureux ? Même ça il n’en sait rien. Mais il l’est, ça c’est sûr. Peut-être que c’est parce que c’est Eve. Ou qu’il a l’occasion de prouver que cette fois, il sera à la hauteur, contrairement à la dernière fois. Ou bien, finalement, parce que c’est une chance de faire mentir le destin de sa famille, parce que pour une fois, il lui semble qu’il lui arrive quelque chose de bien, et qu’il ne sait juste pas s’il le mérite.
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Message#Sujet: Re: A nos amours || Finn   A nos amours || Finn Icon_minitimeLun 22 Aoû - 22:18

A nos amoursFinn & Rafa

Évidemment, ce n’est pas charitable, de faire mariner Finn comme ça, mais Rafa estime que c’est de bonne guerre. Après tout, c’est lui qui a dû se coltiner Eve, ses nausées, ses envies de tartines de ketchup à trois heures du matin et ses sautes d’humeur. C’est lui aussi qui va devoir se fader les angoisses du futur papa, les cent mille interrogations existentielles qui ne vont pas manquer de l’assaillir, enfin le putain de barnum qui accompagne toute grossesse, mais puissance Callahan. Neuf mois comme ça, ça promet du bon temps, non ? Il suffit de le voir prendre sa tête dans ses mains et parler à toute vitesse, comme un qui réciterait son chapelet. Ouais, parole, on va bien se marrer, se dit Rafa en contemplant la scène. Enfin, manière de parler. La formulation la plus exacte serait : on va en baver des ronds de chapeaux, mais c’est pour la bonne cause.

Car Rafa a fini par se faire à l’idée que la planète terre accueille un jour le fruit des amours d’Eve et de Finn. Il trouve toujours que c’est l’une des plus mauvaises idées depuis celle du capitaine du Titanic d’aller chercher à la source les glaçons pour son whisky, mais dans le clan, on n’est plus à ça près. Les plans foireux, c’est une sorte d’art de vivre. Et puis, qui sait ? Peut-être que ça lui fera du bien, au patron, d’avoir un môme à lui. Peut-être que ça calmera un peu certaines angoisses - au prix d’autres, mais on ne peut pas tout avoir. Alors oui, il ricane, sans beaucoup de charité, le Rafa, d’une part parce qu’il estime que c’est un simple acompte sur les emmerdements à venir, et d’autre part parce qu’il sait qu’à la fin des fins, le patron sera heureux.


-Eh, c’est bon, je vais pas prendre le deuil, non plus, rétorque-t-il quand Callahan lui ordonne de cesser de rire. Faudrait savoir, patron, quand je tire la tronche ça vous vexe et quand je prends les choses du bon côté ça vous emmerde. Je sais plus, moi !

On ne peut nier qu’il y a eu un changement dans l’attitude de Rafa au sujet de cet enfant ; il en a pris son parti, pourrait-on dire. Le souvenir amer du combat de boxe avec le patron n’y est pas pour rien, mais c’est surtout sa lucidité habituelle qui lui a fait comprendre que de toute façon, c’était inéluctable. Ce Finnegan, comme dit Santina, quand il a une idée dans la tête, il ne l’a pas autre part.

-Et puis ça vous tombe pas dessus de nulle part, pas vrai ? reprend Rafa, en endossant à nouveau le rôle, plus agréable, du meilleur ami. Vous en aviez envie, tous les deux, vous en avez déjà parlé, c’est juste le timing qui va pas, en fait. Mais bon, vous auriez pu continuer à discutailler trois ans de plus que vous auriez pas été plus prêts, à mon avis. Ça rassure, de parler, mais c’est bien tout. À un moment, faut se jeter à l’eau. Enfin, façon de parler, nuance-t-il en vitesse en se remémorant le jardin de Chouvalov. Si ça arrive maintenant, c’est que c’était écrit.

Il accompagne cette affirmation d’une tape sur l’épaule, pour dire au patron qu’il n’est pas tout seul, et que comme d’habitude, on partagera les emmerdes, et qu’on trouvera même sans doute le moyen d’en rigoler. Il sait tout ça, puisque ça a toujours été leur façon de fonctionner. Ils seront juste un peu plus nombreux à bord, et ils se débrouilleront pour que ça fonctionne.

Sean et Connell ont entamé une partie de fléchettes, à grand renfort de provocations et de rire. En les regardant distraitement, Rafa tâche de dissiper les angoisses du patron :


-Eve ? Non, ça allait. Quelques nausées mais vu ce qu’elle bouffait, c’est miraculeux qu’elle ait pas été plus malade. Même moi, j’ai du mal à la suivre, par moments. C’est dire. Je mets dix livres sur Connell, tiens. Elle doit savoir, mais elle m’a rien dit. Elle avait toujours une excuse, le décalage horaire, ou que je conduisais trop sec, ou je sais pas quoi, mais à mon avis, c’est des boniments, tout ça. Par contre, si j’étais vous, patron, j’éviterais de faire venir Matthews. Elle va mal le prendre, si vous voulez mon avis. Parlez-lui d’abord, et puis proposez-lui de faire venir le doc, mais dans cet ordre, si vous tenez à la paix de votre ménage. Plus haut, Connell, bordel !

Tout doucement, les angoisses du patron semblent refluer. Il commande un autre Irish coffee, suivi par son second qui fait signe à Liam d’en mettre deux, et puis, en attendant les consommations, il se met à sourire, d’un sourire plein de tendresse qu’on ne lui voit pas souvent. Il est content, qu’il dit. Cette confidence lui vaut une nouvelle tape amicale sur l’épaule, et surtout, une nouvelle vanne de son second hilare :

-Bien sûr, que vous êtes content, patron. Je l’ai toujours su que votre but c’était de rajouter toujours plus de bordel au bordel ambiant, et là, ça va être un feu d’artifice. Eh, on tape pas, hein !

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Message#Sujet: Re: A nos amours || Finn   A nos amours || Finn Icon_minitimeLun 29 Aoû - 23:56



A nos amours
Rafa & Finn
L’esprit de Finn ressemble, à la minute où Rafa lui parle, à des montagnes russes qui se seraient emballés et dont les freins auraient été sabotés. Quant à son estomac, il lui semble qu’il vient de monter dans un grand huit tant il a le vertige et qu’il panique. Merde, comment c’est possible ? Et Eve, comment elle va le prendre ? Est-ce qu’elle voudra toujours ? Ce n’est tout de même pas pareil d’avoir un gosse avec une fille qu’on connait depuis six mois – ou un gars, d’ailleurs, c’est bien ce que Eve pourrait penser, elle en aurait tout à fait le droit. Il faut se jeter à l’eau ? Oh, merde. La noyade. Chouvalov, j’avais oublié Chouvalov. Ce con là va encore vouloir me foutre dans son lac. Faut que je l’épouse, pas le choix…mais non, tu peux pas, crétin, elle ne veut pas, et toi non plus, allez, réfléchis…

Mine de rien, c’est terrorisant. Faire des projets qui ne se limitent pas à braquer une banque, c’est nouveau, pour Callahan, alors forcément, lorsqu’ils deviennent vrai à une vitesse bien plus rapide que prévu, il panique. Et encore plus à cause du projet lui-même, avec toutes les émotions et inquiétudes qu’il charrie : la preuve, Callahan ne sait plus bien lui-même s’il a envie de dire à Rafa qu’il devrait pleurer avec lui au lieu de se moquer, ou s’il veut des félicitations.

Si ça arrive maintenant, c’est que c’était écrit. La remarque de Rafa est frappante et tombe à point nommé, comme la tape amicale qu’il assène à Callahan et qui a pour mérite de faire revenir Finn a la réalité. Un moment il a eu l’impression de manquer d’air et si quelqu’un d’autre, à part O’Riordan, avait prêté attention à lui, l’acteur n’aurait pas manqué de passer pour fou. Heureusement à cette heure il n’y a pas grand monde, et les rares membres du clan qui sont là, comme Sean et Connell, savent que tant qu’on ne leur demande rien, il faut foutre la paix au patron. Mais son second a raison. Il n’est de toute façon plus temps d’hésiter et de tergiverser, puisque ça arrive maintenant. La seule question valable, c’est comment ils vont faire. Pour le reste, c’est normal d’avoir des doutes - Eve n’a-t-elle pas dit elle-même que ce serait la décision la plus importante de leur vie ou quelque chose comme ça ? – mais ils sont infondés, et Callahan le sait, tout au fond de lui. Ils étaient partis pour quelques années à rester ensemble de toute façon, alors si ça arrive un peu plus vite que prévu, ça ne change rien, sinon qu’ils vont devoir s’organiser. Ce sera compliqué, sans doute, mais pas impossible. Contrairement à sa réaction initiale, celle qu’il a eu la première fois que Eve lui parlé de ce désir d’avoir un enfant avec lui, Callahan se dit cette fois qu’ils ont réussi à surmonter le reste, et qu’ils réussiront ça aussi. Alors, il finit par esquisser un sourire et se mettre à son tour à la mode des remerciements, rétorquant presque timidement à Rafa : « C’est gentil, mon vieux, merci. C’est juste qu’il s’agirait de pas se noyer en le faisant, tu vois…ca va peut-être passer, hein, mais tu vois c’est un peu l’impression que j’ai, pour l’instant. Enfin…c’est impressionnant, tu vois, quand même. » Non, O’Riordan ne voit pas justement, puisque c’est typiquement le genre de choses qu’on ne peut pas envisager avant de les vivre. Finn lui-même est surpris d’en arriver à avouer ça à Rafa. Non qu’il ne puisse pas tout lui dire puisqu’ils partagent tout et qu’ils ont déjà eu des affres bien plus anormaux, violents ou glauques qu’une naissance. Mais justement, le fait de se retrouver à douter, à avoir peur, à être paumé, ça, c’est bien plus difficile à dire, tant il est habitué à porter rage, fureur, joie et violence comme autant de masques et de remparts contre le traumatisme et les angoisses qui parsèment sa vie.

Mais ça fait du bien de le dire. Du bien de se dire que malgré son insupportable assurance, Rafa est toujours dans le coin et qu’il est toujours là. Ça, et la normalité de certains morceaux de conversation - « Tenu. » réplique à la volée le mafieux, prenant de son côté parti pour le porte-flingue du clan – que son second instille l’aident à envisager la situation un peu plus sereinement, ou du moins à se concentrer sur le principal, à savoir Eve. C’est qu’il s’agit d’être à la hauteur, et de la protéger, maintenant, elle et l’enfant qu’elle porte, jusqu’à l’accouchement. L’accouchement, bordel ! Voilà autre chose qui lui fait peur. Mieux vaut ne pas y penser pour le moment. S'il compte bien, en partant de septembre, ils ont encore six mois pour y penser, presque sept.

Déjà, il faudrait être sûr qu’elle sache et en parler avec elle. Prendre les choses dans l’ordre : voilà un autre conseil de bon sens de Rafa, mais comme toujours. Ça aussi, ça fait partie de la normalité : à lui les inquiétudes, les idées fantasques, et à son second le bon sens et les conseils qu’il écoute d’une oreille attentive, même lorsqu’ils lui déplaisent. Bon, au moins, la rousse n’a pas l’air d’aller trop mal. Pensivement, Finn approuve l’idée d’en parler avec sa compagne avant de faire venir le médecin, sans savoir qu’il n’en aura pas l’occasion, aspirant nerveusement un peu de tabac : « Ouais, c’est ce que je me disais aussi, t’as raison. Je vais voir. Peut-être qu’elle attendait juste d’être rentrée de LA pour m’en parler… » Ça lui semble improbable, qu’elle ne sache pas, tout de même, elle est tout de même mieux placée qu’eux deux pour ça. Callahan fronce les sourcils : « Est-ce que…est-ce qu’elle était comme ça, la première fois, ou c’est mieux ? » En apparence, Finnegan suit d’un air concentré le mouvement incessant des fléchettes – tchac, et un encouragement pour son poulain : « Vas-y Sean ! » - et la question est posée mine de rien. Mais il faudrait aveugle pour ne pas voir à quel point ça l'inquiète. Le simple fait qu’il se soit résolu à évoquer cette première grossesse, pendant laquelle il n'a vu qu'une Eve terrorisée et dont la fin a été si douloureuse, est révélateur. Rafa a été là plus que lui la première fois. Callahan ne peut s’empêcher d’en avoir honte, parce qu’il n’a même pas de point de comparaison, et qu'il voudrait cependant que ça se passe mieux.

Mais cette fois il est prêt, ceci dit, et quoiqu’il se passe, il se rattrapera, il sera là. Parce qu’il veut être là. Et parce que, comme il le dit à Rafa, cette fois, il est content. Ça émerge, à la fin, et ça le rend même capable de repartir à vouloir mettre une taloche à son cadet, rigolard : « Eh, qu’est-ce que j’ai dit pour l’insolence, te dérobe pas ! » Mais Finn ne met aucune calotte, pas plus qu’il ne se donne pas la peine de contredire Rafa. Le chaos est son élément naturel : dans la panique, il trouve son compte et c’est là qu’il élabore les meilleurs plans. Non, il se rassoit juste sans que son sourire n’ait disparu de son visage. « Je suis censé le prendre comme des félicitations de ta part, laisse-moi deviner ton argumentaire ? Je te remercie, alors. » Évidemment que ce sont des félicitations, qu’il prend à leur juste valeur. Dans leur langage à eux, qui consiste à se cogner dessus en guise de signe de fraternité, ç’en est forcément et pour un peu, Finn trinquerait à la santé de son futur enfant – c’est fou comme c’est doux, cette pensée, leur enfant – avec son second, le futur parrain, s’il ne fallait pas juste s’occuper du minuscule détail qu’est la conversation qu’il doit avoir avec Eve pour annoncer les choses officiellement.

Revenant à elle et à des sujets plus sérieux, Callahan remarque cependant pensivement, une fois son Irish Coffee récupéré : « Je préférerai que ça le soit pas, le bordel, cela dit. Au moins pour que Eve ait la paix, quoi, déjà… » Les mauvaises langues dublinoises à la table diraient sans doute à raison que la jeune femme est la principale menace pour elle-même. C’est un sujet compliqué et il va falloir qu’ils parlent de ça aussi ensemble…Finn soupire et se frotte les yeux pensivement. « Enfin, en tout cas, je vais lui en parler. Peut-être pas ce soir si elle est crevée, mais dans les prochains jours… Ah merde, Sean, quand même, tu pouvais pas le louper celui-là ! Tiens, doit y avoir 10 livres… » Callahan sort un billet de son portefeuille, et la discussion continue, revenant à leurs affaires puisqu’on parle de paris, et au résumé de la semaine, côté Cohan, puis à Robin, alors qu’il insiste encore concernant la nécessité d’être honnête avec elle - « Ca te posera problème, sinon. Puis tu lui dois bien ça. Crois-moi, on ne construit rien sur un mensonge. »  - jusqu'à ce que Rafa se remette à s'endormir et que le patron propose de lui prêter le bureau pour qu'il pique un somme. Et de temps en temps, Finn se prend à sourire, parce que Eve est enceinte, et qu’à la fin, quoiqu’il ne connaisse pas le quart du début de commencement de ce que ça implique comme rôle, il est heureux de se dire qu’il va être père.

(C) CANTARELLA.

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